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Critiques de Rachel Kushner (86)
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Le Mars Club

Un roman sur l’univers carcéral américain au féminin et sur la violence latente de la société. Une violence invisible qui fait encore plus de dégâts que la violence explicite. Une belle écriture pour un prix Médicis étranger 2018 mérité.
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Le Mars Club

Récompensé par le prix Médicis étranger 2018, ce roman de Rachel Kushner nous embarque forcés et contraints dans un univers impitoyable! Une plongée de l'horreur dans l'univers carcéral américain, mais le nôtre est-il différent?

Le roman s'ouvre sur une chaine, le transfert de prisonnières d'une prison à une autre, nous sommes en Californie. Romy Hall, 29, est l'une d'elles. Condamnée à deux peines consécutives de réclusion à perpétuité plus 6 ans , Romy subit son sort avec la pensée que son fils Jackson est en bonnes mains, celle de sa mère. Mais lorsqu'elle apprend que ce n'est plus le cas , le monde bascule et ..

Ce roman m'a semblé interminable, bien écrit certes mais douloureux et insupportable. La jeunesse de Romy dans les quartiers pauvres de San Francisco, le deal les viols, , les épreuves qu'elle a vécu pour aboutir dans cet univers carcéral... une lecture difficile , trop difficile.

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Télex de Cuba

Cuba, 1958. La fin d’une époque, l’avènement d’une nouvelle ère, révolutionnaire. Presque 60 ans après, le pays ne s’en est pas encore remis.

Mais revenons aux années 50. L’époque pour laquelle sonne le glas, c’est celle de la « colonisation » de l’île par les gigantesques compagnies américaines, venues exploiter sans vergogne les ressources naturelles locales, nickel et canne à sucre en tête. Ca ressemble furieusement à de l’esclavagisme, entre Yankees qui font trimer les Cubains qui eux-mêmes tuent à la tâche (au propre et au figuré) Haïtiens et Jamaïcains.

Mais cet « âge d’or » n’aura qu’un temps, car la révolte couve dans les bidonvilles ouvriers et les montagnes de l’arrière-pays. Le jeune Fidel Castro, son frère Raul et leurs partisans ont pris le maquis. Révolutionnaires idéalistes, ils mènent une guérilla visant à la fois les intérêts américains et le gouvernement cubain en place.

Au fil des presque 500 pages de son roman, Rachel Kushner nous raconte 7 années de l’histoire cubaine, de 1952 à la chute du président Batista en 1959, chassé du pouvoir par les frères Castro.

Entre l’arrivée en 1952 de la famille Lederer, attirée comme tant d’autres par cet Eldorado caribéen, et l’évacuation chaotique des expatriés américains 7 ans plus tard, ce roman choral adopte tour à tour le point de vue des différents protagonistes : privilégiés américains, rebelles romantiques, trafiquants d’armes ou belles danseuses espionnes. L’auteur ne prend le parti de personne et au contraire, égratigne tout le monde. Des riches amerloques racistes à qui tout est dû, flanqués de leurs épouses oisives ou dépressives quand elles ne sont pas alcooliques (cela m’a évoqué « une histoire birmane » d’Orwell), aux "fiers" guérilleros de la Sierra Maestra préparant la révolution en jouant aux cartes et vomissant leurs tripes à la vue du sang humain, en passant par les politiciens corrompus et incompétents et les mercenaires se vendant au plus offrant.

On en retient que, au milieu de ce panier de crabes, les intentions les plus pures (à l’époque !) sont néanmoins à mettre au crédit de Fidel et de ses compagnons. Tous les autres ne sont mus que par l’appât du gain, au mépris de toute morale.

Les personnages les plus attachants sont les adolescents, qui observent les comportements parfois étranges des adultes. Plus lucides que leurs aînés, ils n’en pensent pas moins, sagement se taisent, puis finissent par agir selon leur cœur, quitte à trahir leur caste d’expatriés nantis.

Ce premier roman est admirablement maîtrisé dans sa construction. Petites histoires, grande Histoire, humour, ironie, séduction, nostalgie, destins croisés, style et belle écriture, tout est là pour faire de ce récit une saga romanesque remarquable.

J’attends avec impatience le prochain télex de Rachel Kushner !

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Le Mars Club

Mettre tant d'humanité dans un roman se déroulant dans le milieu carcéral, avec comme personnage principal une jeune femme/mère condamnée à une double perpétuité, c'était une gageure !



Et bien le pari est réussi, ce livre m'a bouleversée, enthousiasmée, révoltée, attristée, m'a fait sourire, pleurer, m'a poussée à relativiser, à réfléchir.

M'a profondément émue.



Il est difficile de raconter en quelques mots ce roman alors je vous parlerai de l'écriture de l'auteure qui a su faire passer tant d'émotions, d'humanité et de sensibilité dans son livre.

La parole est donnée essentiellement à la jeune héroïne qui se raccroche à l'existence de son jeune fils ( confié à sa grand-mère maternelle), pour tenir et trouver à son existence carcérale un but qui la ferait survivre.



Il y a aussi les paroles croisées de deux amants maudits, dans deux prisons différentes, qui se dénigrent et s'accusent mutuellement de la déchéance de leur vie.



On est touché par les violences, les non-dits, le quotidien sans lumière de ces prisonniers qui ne retrouveront pas leur liberté, mais aussi par les concessions, les arrangements, les situations humiliantes et/ou déshumanisantes, que ponctuent pourtant des moments de vrai partage, de petites joies, d'amitié. Heureusement.



Car lorsqu'elle apprend que son fils n'a plus sa grand-mère, décédée dans un accident, Rachel l'héroïne, perd ses repères, ses espoirs et ce qui la faisait tenir : et là, franchement, je me suis demandée comment elle faisait pour ne pas baisser les bras et se résigner, comment accepter une vie sans but et sans visite, sans plus rien qui vaille la peine de s'accrocher.

C'est donc une héroïne forte et oui, très attachante, qu'on suit dans ce roman. On ne peut se détacher de son parcours, de ses espoirs, de ses décisions qu'on se surprend même à valider...



Enfin, la parole est également donnée à un jeune enseignant qui tente d'humaniser la prison en passant par la littérature, voire la lecture et le partage de lectures. Innocent mais pas naïf, humain mais inhibé, il se débat entre son empathie pour les prisonnières et l'éthique.



Tous ces personnages évoluent dans des décors réalistes de villes et quartiers populaires, où on sent bien que la misère ne leur laisse pas beaucoup de chances d'échapper à la violence psychique et physique. Ces descriptions de villes, qu'on pense connaître, mettent à mal nos clichés et fantasmes sur les villes américaines. Et c'est dérangeant mais passionnant.



Un roman que j'ai adoré, vous l'aurez compris, très bien écrit, et surtout montrant dans l'écriture, l'intrigue, la forme narrative et les descriptions un vrai talent de la part de l'auteure et une humanité extrêmement touchante.



Un grand merci aux éditions Stock et à NetGalley pour la découverte de cette auteure et de ce magnifique roman de la rentrée littéraire.









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Le Mars Club

Le Mars Club de Rachel Kushner est un roman de la rentrée littéraire découvert grâce aux éditions Stock via net galley.

Le Mars Club m'a permis de côtoyer le monde carcéral le temps de ma lecture. Romy Hall, 29 ans, vient d’être transférée à la prison pour femmes de Stanville, en Californie. Cette ancienne strip-teaseuse doit y purger deux peines consécutives de réclusion à perpétuité, plus six ans, pour avoir tué l’homme qui la harcelait. Dans son malheur, elle se raccroche à une certitude : son fils de 7 ans, Jackson, est en sécurité avec sa mère. Jusqu’au jour où...

Je n'en dirais pas plus, car j'ai apprécié de lire ce roman sans en connaître plus auparavant.

Le Mars Club est un très bon roman.

J'ai aimé les différents personnages, à commencer par Romy. J'ai apprécié le fait que ça se déroule en partie en prison mais également dans le San Francisco des années 80. L'ambiance m'a plu.

J'ai aimé ce roman de la rentrée littéraire 2018, je trouve qu'il mérite un joli quatre étoiles :)
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Le Mars Club

Si on m'avait dit que je me passionnerais pour un roman dont l'intrigue se déroule essentiellement en prison... Ce n'est pas un univers qui m'inspire en général, ni en littérature, ni au cinéma. Mais si le roman de Rachel Kushner m'a embarquée c'est, je crois, pour ce qu'il raconte de la société américaine en utilisant le prisme du monde carcéral, donnant ainsi à voir une réalité bien plus percutante et nuancée. Avec des personnages toujours en équilibre précaire, sur un fil. Forts et faibles à la fois. Terriblement humains.



L'héroïne est une jeune femme de 29 ans, Romy Hall qui rejoint la prison de Stanville en Californie. Elle a été condamnée à deux peines de réclusions à perpétuité pour avoir tué un homme qui, selon elle, la harcelait. Un de ses anciens clients lorsqu'elle se produisait au Mars Club, un club de striptease de San Francisco. Son fils de sept ans, Jackson vit désormais chez la mère de la jeune femme. Mais lorsque cette dernière meurt subitement, Romy mesure toute l'étendue de son impuissance. Que reste-t-il à espérer de la vie quand aucune autre perspective que l'enfermement n'existe ? Comment rester humain malgré tout ?



Au fil de l'intrigue, nous suivons la vie de Romy et de ses codétenues avec une foultitudes de figures à la fois très détaillées, riches et attachantes, même dans ce qu'elles ont de plus dur ou violent dans leur comportement. Et nous remontons le temps pour explorer le chemin qui a mené Romy dans cette impasse, dans le San Francisco des années 80, celui des paumés, à la traîne du rêve américain. A commencer par la nécessité de nourrir son fils, qui la conduit tout droit au Mars Club, à se déshabiller pour quelques billets et la possibilité d'adapter ses horaires à ses contraintes familiales. Et avec le parcours de Romy, c'est toute la question des violences faites aux femmes qui irrigue le récit.



Mais il y a une autre figure forte dans ce roman. Celle d'un homme, Gordon Hauser qui vient enseigner la littérature aux prisonnières volontaires ; qui croit au pouvoir de la lecture bien plus qu'en la nature humaine. Un homme à la psychologie complexe, en dehors de toute naïveté, confronté à un monde dont il connait les côtés les plus noirs au point de préférer la compagnie des grands auteurs, à commencer par Dostoïevski à celle de ses congénères. Un très beau personnage, dont le regard sur le monde est nourri de ses observations autant que de ses lectures et dont on sent toute la difficulté à supporter le poids de plus en plus lourd de cette charge.



"A force d'être employé, le mot violence était vidé de son sens, c'était devenu un terme générique, et pourtant il avait encore du pouvoir, encore une signification, de multiples significations. Il y avait des actes de violence brute : battre quelqu'un à mort. D'autres formes plus abstraites : priver des gens de boulot, de la sécurité d'un toit, de bonnes écoles. D'autres enfin se déployaient à grande échelle : la mort de dizaines de milliers d'irakiens en une seule année à cause d'une guerre perfide, basée sur le mensonge et l'incompétence, un gâchis qui risquait d'être sans fin mais, d'après les procureurs, les vrais monstres étaient les adolescents tels que Button Sanchez".



Oui, à travers ce roman d'une puissance tout en subtilité, c'est bien la société américaine que l'auteure ausculte, une société où affleure la violence sociale, conséquence directe d'un modèle basé sur l'individualisme. Un thème exploré par de nombreux auteurs mais que Rachel Kushner renouvelle avec force et talent avec ce voyage au cœur de la privation de liberté où chaque individu continue à lutter pour préserver une petite étincelle de vie, sinon d'humanité.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Les lance-flammes

Un grand merci à l'inégalable Masse critique de Babelio et aux Editions Stock.



Le deuxième roman de Rachel Kushner, Les lance-flammes, a été porté aux nues par plusieurs auteurs anglo-saxons parmi les plus célèbres. Ce qui, au demeurant, est plutôt inquiétant : quand des écrivains adoubent l'un des leurs, le lecteur lambda se sent un peu prisonnier d'opinions de gens qui savent mieux que lui ce qu'est un bon livre. Non ? Non, pas forcément, puisque tous les avis se valent. Les Lance-flammes contient de très bonnes choses à commencer par un portrait très dense d'une héroïne, Reno, qui traverse les années 70 à grande vitesse entre les ateliers d'artistes de New York et une villa bourgeoise dans les environs du lac de Côme, en passant par la Rome des "années de plomb" et le Grand Lac Salé, à moto s'il vous plait. Dans ses meilleurs moments, le livre va à toute berzingue et il est passionnant à lire. Mais, oui car il y a un mais, Rachel Kushner s'arrête parfois à des feux rouges virtuels et nous inflige de longues conversations fastidieuses ou encore s'empêtre dans des digressions sur l'air du temps. On a franchement l'impression que la romancière en remet un peu pour "faire" plus littéraire au point que le style dépasse le fond. A la lire, on se sent un peu comme le cachet d'aspirine au contact de l'eau : effervescent un temps et puis impuissant une fois l'effet initial absorbé. Des qualités d'écrivain, Rachel Kushner en possède, c'est irréfutable, et un remarquable sens du découpage narratif (voir les flashbacks sur le grand-père du fiancé de Reno, qui a fait fortune avec le caoutchouc, du Brésil à l'Italie fasciste). Porté par un bel élan, Les lance-flammes est parfois freiné par un excès de travail sur la forme. Mais Rachel Kushner a le feu sacré, il faudrait aveugle pour ne pas le voir. Et on est curieux de voir l'adaptation que Jane Campion tirera de cette somme de près de 550 pages s'il se confirme qu'elle la tourne bien.
Lien : http://cin-phile-m-----tait-..
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Le Mars Club

Roman choral.



D’emblée nous sommes dans l’histoire : Romy est en prison, en Californie. Elle a tué un homme. Peu importe que cet homme la harcelait : elle a été condamnée à perpétuité : son avocat commis d’office n’a pas su toucher le jury et lui faire obtenir les circonstances atténuantes (un homme qui se déplace avec des béquilles ne peut pas être un harceleur…et puis franchement une strip-teaseuse, vous parlez d’un métier …)



Ce sera donc la perpétuité …et même deux fois la perpétuité en fonction du système en vigueur aux Usa …



En plus de Romy, l’auteur nous fait part des pensées de Betty (dans le couloir de la mort, accusée d’avoir fait tué plusieurs hommes dont son mari..), de Button une adolescente condamnée elle aussi pour meurtre commis quand elle était mineure et qui accouche en prison, de Sammy une latino américaine qui a passé plus de temps en prison que dehors…

Parmi les personnages masculins, Gordon est professeur et donne des cours aux détenues, Doc dans une autre prison est un flic pourri (meurtre lui aussi …complice de Betty), Kurt le harceleur assassiné…



Pas de réinsertion possible, pas d’espoir…

Cependant Romy tient le coup, elle pense à son fils Jackson, 7 ans au moment de son arrestation, 11 ans maintenant …avant d’apprendre qu’elle a été déchue de l’autorité parentale.



Ce livre au delà du portrait de cette Romy, si forte, est une mise en accusation du système judiciaire américain qui envoie ses citoyens en prison à perpétuité (cas de trois récidives pour cambriolages…) ou dans le couloir de la mort …



Effrayant et terriblement réaliste…La misère dans les années 80 aux USA …la drogue. Et plus tard la guerre du Golfe les soldats qui défendent la « liberté » des américains…

Ces américains qui peuvent se retrouver du jour au lendemain en prison broyés par l’appareil judiciaire….



Un roman passionnant mais très dur.
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Le Mars Club

Romy Hall (nom de scène Vanessa), se produit au club de strip-teaseuse Mars Club à San Francisco. Au début du récit, elle est conduite au pénitencier pour femmes afin de purger une peine de réclusion à vie. On n’en connaît pas la raison.

Romy et ses co-détenues ont abouti dans le ventre d’une prison à haute sécurité en passant par les mêmes chemins, ceux des familles dysfonctionnelles, de la drogue et du décrochage scolaire. Victimes et bourreaux se rejoignent dans ce roman introspectif sur les notions de vengeance, de punition, d’enfermement et des actes initiaux qui y mènent. À tour de rôle, chacun raconte son histoire et témoigne d’une existence chaotique assombrie par le vice, la cupidité et l’obsession. Un portrait dur et saisissant des bas-fonds de la ville même, San Francisco, bien loin des cartes postales touristiques qu’on a en en tête. Et, comme dans la vie réelle, la rédemption ne s’obtient pas facilement.

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Télex de Cuba

Cuba, un eldorado pour Américains ? Cuba, île capitaliste dont les richesses (plantations sucrières, mines de nickel…) étaient détenues par une poignée de yankees privilégiés, incarnation d’un colonialisme qui n’assumait pas son nom ? Cuba dans les années 40 et 50 c’était cela. Pas de Fidel Castro au pouvoir, pas de nationalisations massives des productions, pas de Baie des cochons ni d’embargo, de fermeture des frontières, d’anti-américanisme, d’accointance avec l’URSS communiste. Rien de tout cela. A cette époque, une succession de chefs autoritaires, Batista en tête, faisaient amis-amis avec les plus riches entrepreneurs américains à qui ils offraient sur un plateau d’argent leur pays, une main-d’œuvre peu onéreuse facilement exploitable (Cubains mais surtout Haïtiens et Jamaïquains encore plus désœuvrés), des lois libérales plus que favorables et bien entendu une police entièrement dévouée à la chasse aux rebelles et autres opposants et agitateurs politiques. C’était cela Cuba et c’est ce que Rachel Kushner nous offre avec son très beau Telex de Cuba, véritable saga, mêlant souffle romanesque et roman choral, récit des derniers mois vécus par une poignée d’Américains nantis sur cette île. Nous sommes en 1958 : Fidel, son frère Raul et une armée grandissante de rebelles communistes sèment le trouble et la terreur, marchant sur la Havane et son gouvernement corrompu. Cette armée, soutenue par la population, menace les possessions américaines, cibles privilégiées. Dans notre roman il s’agit d’une vaste exploitation de cannes à sucre détenue par un Américain, reposant sur un encadrement 100% américain : ingénieurs, contremaîtres, gestionnaires débarqués avec leurs familles, abandonnant avec circonspection la mère patrie. « Parqués » dans des résidences fermées et surveillées, véritables eden de nantis, enclave américaine au cœur de la jungle cubaine, des cases dépenaillés et des ghettos noirs, ces exilés ne se soucient ni de la misère ambiante, ni de politique, s’accommodant parfaitement de cette boule de coton dans laquelle ils se prélassent, insensibles à ce qui se déroule sous leurs yeux aveugles. Nous suivons les derniers sursauts d’un idéal qui est sur le point de prendre fin. Finis courbettes et asservissement, compromis et compromission de la part du gouvernement cubain prêt à tout pour faire partie de ce monde. Le rapport de force s’inverse et menace l’équilibre fragile sur lequel se reposait cette poignée de paumés, subitement confrontés à la fin de leur monde. Rachel Kushner dépeint avec justesse cet état de fin qui n’empêche pas pour autant les illusions de ces gens qui veulent encore y croire. Telex de Cuba est une vraie peinture sociale qui ne tombe jamais dans la caricature manichéenne : d’un côté les gentils Cubains révolutionnaires (loin d’être tendres et pour beaucoup peu soucieux d’idéologie politique), de l’autre les méchants Américains dont on peut reprocher pour beaucoup de s’être mis des œillères car après tout, on leur offrait tout pourquoi le refuser. J’ai beaucoup aimé ce roman et son rythme qui alterne tout du long le point de vue de plusieurs personnages, prisme narratif qui donne une vraie dynamique. L’écriture de Rachel Kushner est une écriture riche et puissante, qui ne s’essouffle jamais. Sa sensibilité, son refus de juger, la justesse de son ton et l’acuité de ses portraits font de Telex de Cuba un roman d’une profonde qualité, fort enrichissant pour moi qui connais finalement peu de choses sur Cuba. Je ne peux que le recommander.
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Le Mars Club

Un grand merci aux Editions Stock et à Netgalley pour ce partenariat très apprécié.



Ce roman est très touchant et très surprenant, plein d’humanité. On y suit la vie de Romy Hall , âgée de vingt-neuf ans. Elle a tué un homme qui la harcelait et vient d’être condamnée à deux peines de perpétuité plus six ans. Son fils de six ans est en sécurité auprès de sa grand-mère maternelle et Romy s’accroche à cette certitude bien qu’elle n’ait aucun espoir de retrouver la liberté un jour. On découvre sa vie en prison, avec d’autres femmes dans une situation aussi désespérée que la sienne. Comment survivre dans ce monde sans espoir ? Il y a une hiérarchie parmi les prisonnières, des relations faites de violence, mais aussi d’amitié, comme une lueur d’espoir dans un monde qui en est dépourvu.



La mère de Rachel meurt dans un accident et la jeune femme perd ses repères et ce qui l’encourageait à tenir le coup. Pourtant elle aura le courage de s’accrocher, c’est une héroïne très forte et pleine d’humanité. Son amant est aussi dans une prison et tous les deux s’accusent mutuellement de s’être gâché la vie. Rachel nous raconte aussi son passé et la manière dont la vie l’a broyée. Elle travaillait dans un club bas de gamme de San Francisco.



Gordon Hauser est un autre personnage lumineux de ce roman. Il enseigne la littérature aux prisonnières qui le désirent et espère ainsi leur ouvrir un peu l’horizon. Il connaît le côté sombre de l’âme humaine et sa charge lui pèse de plus en plus.



Ce livre montre une fois de plus l’envers du rêve américain durant les années Bush. Il va sans dire que la situation ne s’est pas améliorée depuis cette époque pour les plus pauvres, toujours plus nombreux. On est à des années-lumières du San Francisco rêvé par les Européens et de sa célèbre maison bleue adossée à la colline. On est dans un monde noir où les plus faibles n’ont pratiquement pas d’espoir de s’en sortir et pour qui la prison est presque une destination obligée. Rachel symbolise aussi toutes les violences faites aux femmes dans ce monde socialement si violent. Il y a aussi une réflexion sur ce qu’est la vraie violence : Celle des délinquants, des drogués et des prostituées ou celle de l’oppression sociale ?



Un très beau livre qui a bien mérité son Prix Médicis étranger et que je vous recommande chaleureusement.
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Le Mars Club

Un peu déçue par ce livre, je dois avouer que j'avais été très attirée par la couverture et je ne m'attendais pas à cela.



Romy Hall est condamnée à perpétuité pour le meurtre de son petit ami Kurt Kennedy.

On découvre alors son univers en prison, la chute de sa vie personnelle (sa mère qui gardait son enfant décède...).



Je n'ai pas vraiment réussi à rentrer dans l'histoire ni à m'attacher aux personnages, dommage...
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Le Mars Club

Ce roman nous montre la face cachée du San Francisco des années 80 loin de l attrape touristes habituel. En effet elle est dépeinte dans tout ce qu elle a de glauque mais c est dans cet univers qu a grandit Romy. Et pour elle malgré le côté désabusé de ses souvenirs dans sa ville cela reste de "bons souvenirs", car cela lui rappelle sa vie quand elle était libre.

J ai trouvé que San Francisco pouvait presque prendre la place d un personnage a part entière tellement elle est important pour l héroïne.

Toujours avec la volonté de dévoiler la dure réalité l auteur dresse un portrait sans fard du système judiciaire défaillant et de son univers carcéral. Un univers régit par l administration laissant le moins de place possible à l humain et au seconde chance.

L utilisation de la polyphonie et des flashbacks permet d immerger le lecteur dans tout ce qui entoure l héroïne et de comprendre ses décisions.
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Les lance-flammes

Education sentimentale, intellectuelle, artistique et politique d'une jeune fille dans le New York des années 70, cette fresque ambitieuse de Rachel Kushner déborde d'énergie.

D'abord parce que la jeune Reno, fan de ski, de moto, de vitesse et d'images en mouvement, va rencontrer des personnages incroyables, des artistes parfois doués, parfois superficiels mais bouillonnants de vitalité, des camés en tous genre , des militants d'extrême-gauche et des aristocrates italiens.

Et l'auteure, comme son héroïne, parle de ces expériences en initiée puisqu'elle partage les mêmes passions.



Elle sera confrontée à des artistes insouciants qui brûlent leur argent en s'achètant 500 tee-shirts et 500 jeans pour ne pas avoir à les laver, à des performeurs fous, à des gangs comme les motherfuckers.



Sa rencontre amoureuse avec Sandro, fils d'industriels italiens, lui permettra de bénéficier d'une magnifique moto avec laquelle elle battra un record féminin de vitesse mais aussi de découvrir l'histoire de cette famille richissime d'exploiteurs qui a fait fortune dans le caoutchouc. Quelques aller-retour dans le passé du grand père ne laissent aucun doute sur les compromissions avec l'Italie de Mussolini.

Le séjour en Italie permet de confronter la jeune femme à la grande bourgeoisie et au mépris de classe, tout en documentant les années de plomb, le développement de la lutte armée et les attentats des Brigades rouges.



De retour à New York, après sa rupture avec Sandro, elle retrouve ces artistes égocentriques et narcissiques qui se servent des femmes et ne leur laissent aucune place. Toujours vulnérable, Reno décide de prendre sa vie en main et conclue: "Je dois fixer une limite arbitraire au coeur de l'attente, l'absence sans limites et m'en arracher. Partir sans réponse. Passer à la question suivante".



Le roman est brillant, intense, généreux et bavard. C'est peut-être son intensité, son éparpillement qui peut parfois perturber le lecteur et l'exclure à certains moments trop discursif... Mais mieux vaut un roman qui a beaucoup a dire et qui le dit au risque de perdre le lecteur qu'un roman bien trop fade qui ne sert qu'un confortable divertissement.

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Les lance-flammes

Hasard de lecture, je lis ce roman juste derrière "John l’enfer" qui se déroulait en 1977 à New-york. Pour celui ci c’est la même date et New-York est un lieu important dans ce roman, (ainsi que le Nevada et l'Italie)



Au départ on suit deux histoires en parallèle : D’un côté, un italien nommé Valera en 1912, de l’autre USA - Nevada 1977- avec un début sur les chapeaux de roues : Une jeune femme artiste (photographie et cinéma) participe à une course de vitesse dans le désert du Nevada : 238 km/heure, la moto part dans le décor ....suspense... on repart en Italie dans les années 30...



On se doute rapidement que les histoires vont se rejoindre : L’italien de 1917 a pour nom de famille Valera et est passionné de moto (il est dans l’armée dans une section de motocyclistes) et la jeune femme a une moto Valera et un ami qui s’appelle Valera également.



Finalement, l’histoire qui a lieu en 1977 prend assez vite le pas sur l’autre histoire «italienne » qui se déroule par " bond " entre les années :  1912,1917,1939, 1950...



On finit par « suivre » seulement Reno (surnom de la jeune femme qui est originaire du Nevada),  elle vient de finir ses études et se rend à New-York dans le but de devenir une artiste reconnue : elle a 21 ans, plein d’illusions et devient rapidement amoureuse de Sandro (Valera), un artiste célèbre d’une quarantaine d’années.



Le milieu de l’art à New-York dans les années 79 m’a à la fois plu et semblé bien vain : être original à tout prix, s’étourdir dans des fêtes,....

Les personnages secondaires m’ont également intéressée (surtout Ronnie Fontaine, l’ami de Sandro : sympathique, ambigu, jeune homme issu d’un milieu pauvre qui se retrouve célèbre du jour au lendemain grâce a son art)



Sandro et Reno partent quelques jours en Italie dans la famille de celui ci : une révélation pour Reno ...la confrontation avec la violence dans l'Italie des années 1970 et la prise de conscience de la différence entre les classes sociales.



En conclusion : le portrait passionnant de l’évolution d’une jeune femme (durant deux ans, de 21 à 23 ans) même j'ai trouvé quelques longueurs cependant sur la vie "artistique et nocturne dans le New York de la fin des années 70."
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Le Mars Club

Le livre débute sur le transfert de prisonnières vers une prison pour femmes de Californie. Romy Hall, jeune maman de 29 ans fait partie du convoi et est le personnage central de notre histoire.



Avant de se retrouver dans ce fourgon, notre héroïne arrivait tant bien que mal à joindre les deux bouts. Originaire de San Francisco, elle y a passé sa jeunesse et y a vécu ses premiers excès. Bon nombre de ses amis d’alors ont eu du mal à décrocher des mauvaises fréquentations ou de la consommation de stupéfiants.



Son travail de strip-teaseuse au Mars Club n’était peut-être pas le métier dont elle rêvait enfant, mais il lui convenait et avait le mérite de lui offrir l’indépendance et un toit sur la tête à son fils de 7 ans. Pourtant, tout bascule lorsqu’elle tue un client qui la harcèle depuis des mois.



Elle doit alors purger une peine de réclusion à perpétuité et n’a d’autre choix que de laisser son enfant à sa mère. Cet enfant est ce qui la fait tenir, lui permet de garder espoir durant son emprisonnement.



Au fil des pages, divers portraits sont brossés : celui de Romy et de ses codétenues mais également ceux du personnel de la prison. Cette poignée d’êtres humains qui gravite autour de la prison représente à elle toute seul un échantillon de la société américaine que Rashel Kushner se fait un plaisir de décortiquer.



Le Mars Club oscille d’ailleurs entre le présent avec le quotidien dans la prison et le passé avec des flash-back des vies des différents personnages qui nous aident à mieux appréhender la personnalité de chacun.



À mon sens l’un des passages les plus passionnants est celui de la jeunesse de Romy Hall dans le San Francisco des années 80. Il est plaisant de voir une autre facette de la ville, loin des clichés. Il n’est pas question ici de découvrir les quartiers colorés d’artistes et hippies mais bien la réalité d’une ville rongée par la pauvreté et la drogue.



Le Mars Club (aux éditions Stock) soulève des thèmes importants tels que les violences faites aux femmes, la notion de légitime défense, la situation des transsexuels en prison et de manière plus large bien sûr les limites du système carcéral. Rashel Kushner a par ailleurs mené un vrai travail de fond avant de se lancer dans l’écriture, allant à la rencontre de détenues et employés de prison. Cela se ressent, le roman n’en est alors que plus profond et crédible.



Si vous aimez ce genre de récits, sur le même sujet, j’ai trouvé le livre Orange is the new black peut-être plus abordable. Je n’ai pas vu l’adaptation en série mais le livre retranscrit bien la prise en charge des détenues aux États-Unis mais aussi les failles et injustices du système carcéral.
Lien : http://ivredelivres.com/mars..
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Le Mars Club

La construction narrative du troisième roman de Rachel Kushner, le Mars Club, n'apparaît pas comme complexe de prime abord. Et pourtant ! La narratrice qui prendra la parole le plus souvent, à la première personne, pour raconter sa tragique histoire s'appelle Romy Leslie Hall : la détenue W314159. Une autre détenue, Fernandez, interviendra elle aussi à la première personne, mais une seule fois (II, chapitre 13) pendant que Romy est soignée à l'hôpital, puis à l'infirmerie de la prison. Un troisième narrateur s'exprime à la première personne ; il est facile à repérer puisque la police de caractères change dans les cinq chapitres de son journal présentés ici : Ted Kaczynski, mieux connu sous le surnom d'Unabomber, militant écologiste devenu terroriste en raison de son opposition à tout progrès technique. Enfin, un narrateur à la troisième personne intervient dans tous les autres chapitres. de plus, le lecteur est fréquemment pris à partie : « Je vous raconte, c'est tout », prévient Romy. Elle rappelle aussi que le lecteur n'est pas dénué de pouvoir ; il peut parfois être sommé de donner son avis ou de réfléchir sur un point précis : « Peut-être déciderez-vous de lier mon sort au soir où j'ai trouvé Kurt Kennedy en train de m'attendre, mais pour moi […] ». Rachel Kushner nous entraîne ainsi dans ces méandres narratifs sans que nous en soyons conscients, ou plutôt, sans que ces subtilités n'entravent notre compréhension du texte. le roman adopte les cinq parties de la tragédie, dans cinq « actes » très inégaux en taille.

Tous les personnages, sauf Kaczynski, racontent des anecdotes sur leur passé à la fois pour expliquer leur présent et pour oublier leur condition de détenus ou leurs déconvenues dans le cas de Gordon. Ils les livrent généralement par étapes, stimulant ainsi l'intérêt du lecteur pour ce qui va suivre, peut-être bien plus loin. le monde dans lequel ce roman nous entraîne est à mille lieues de l'Amérique fantasmée par beaucoup d'Européens. Romy Hall exerce la profession de stripteaseuse dans une boîte assez minable, le Mars Club, fréquentée par des hommes qui viennent chercher là un exutoire à leur misère sexuelle. Parmi eux, Kurt Kennedy que Romy surnomme le Pervers et qui va la harceler, la traquer. On sait très tôt que la jeune femme ne sortira pas de prison ; Kushner révèle l'absurdité de sa peine : à vingt-neuf ans, elle est condamnée à deux perpétuités consécutives, plus six ans… D'autres personnages féminins gravitent autour de Romy, à la fois repoussants et attachants. Toutes ces femmes ont connu la misère, la drogue, le manque d'amour, les abus de toutes sortes, les avocats commis d'office incompétents, etc. Elles cohabitent dans des conditions difficiles : la proximité, une nourriture médiocre, la drogue, des surveillants qui profitent de la situation et une hiérarchie précise entre elles, dangereuse à transgresser. Certaines détenues ont le droit de travailler (c'est un privilège) pour un salaire de misère, et là encore, Rachel Kushner met le doigt sur l'absurdité de la situation : les détenues fabriquent des meubles et des portes pour les tribunaux !

Romy nous parle de ses aventures amoureuses, des employés masculins et des clients du Mars Club, des dealers, des relations perdues de vue, des mauvaises rencontres… Une nuit où elle traine sans argent dans San Francisco, elle demande de l'aide à un homme qu'elle juge « respectable » : un peu âgé, une belle voiture, « l'air d'un père de famille » qui lui propose de monter dans sa chambre pour lui prêter de l'argent : « Vous n'y seriez pas allé. Je le comprends. Vous ne seriez pas monté dans cette chambre. Vous n'auriez pas erré seul dans les rues, à minuit, à onze ans. Vous auriez été en sécurité, au sec, dans votre lit. Chez vous […] Tout aurait été différent pour vous. Mais si vous aviez été à ma place, vous auriez fait comme moi. Optimiste, stupide, vous seriez monté chercher l'argent du taxi. »

Les personnages masculins que le narrateur à la troisième personne nous permet de suivre ne s'en sortent pas beaucoup mieux que les femmes. On a l'impression que ceux qui ne sont pas encore en prison iront un jour où l'autre. Deux d'entre eux jouent un rôle important dans cette histoire : Doc, un flic ripoux qui n'hésite pas à faire justice lui-même, envers lequel on ressent une certaine empathie jusqu'à ce qu'il avoue l'inacceptable, puis dont on partage de nouveau la souffrance ; Gordon Hauser semble d'emblée un personnage positif, généreux, attentif aux autres. Plus instruit que la moyenne des gens issus du même milieu, il subit malgré tout le déterminisme social qui l'empêche d'acquérir une vraie confiance en lui. Il enseigne dans un foyer, puis dans la prison pour femmes. Il s'investit, mais ses peurs le rattrapent.

J'ai beaucoup aimé ce roman âpre qui, à cause du lieu où il se déroule et des thèmes qu'il aborde, fait penser à la série Orange Is The New Black. Les personnages réagissent de manière parfois difficile à comprendre, mais leurs motivations s'éclairent au fil de la lecture. On réalise que le système de valeurs généralement prôné n'a cours ni dans la prison ni dans la rue, et qu'une autre morale s'applique. Kushner présente ici une féroce critique de l'Amérique de Bush, une réflexion qui permet de s'interroger sur les responsables d'un tel état de fait. Ce qui est sûr, c'est qu'il est quasi impossible de se sortir de ces situations : « Quand vous étiez originaires [de ces quartiers …], vous aviez de grandes chances d'avoir été formé […] à être fier, à être dur. Vous aviez peut-être des tas de frères et soeurs à surveiller et vous ne connaissiez sans doute presque personne qui avait fini le lycée ou qui avait un travail stable. Des membres de votre famille étaient en prison, des pans entiers de votre communauté l'étaient, et ça faisait partie de votre vie d'atterrir en taule, un jour. Bref, vous étiez baisé dès la naissance. »

Un motif d'espoir dans cet univers tragique : l'amour inconditionnel de Romy pour Jackson, son jeune fils, mais…



Pour le Grand Prix des lectrices de Elle : merci pour tous ces livres !
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Les lance-flammes

Âgée d’une vingtaine d’années, cette ancienne championne de ski qui dessinait des traces sur la neige, et que tous appelleront Reno puisqu’elle arrive du Nevada, débarque à New York pour allier ses deux passions que sont l’art et la vitesse. En rencontrant Thurman et Nadine la fofolle, elle plonge dans le milieu artistique et décadent du NewYork des années 70. Très vite, elle s’éprend du meilleur ami de Ronnie, Sandro Valero, sculpteur mais surtout fils de l’industriel italien qui produit les pneus des motos Valera.

Artiste, Sandro a rompu avec sa famille laissant son frère Roberto à la tête des usines italiennes. Il offrira toutefois à Reno le dernier prototype de moto Valera qui lui permettra de dessiner des traces dans les plaines de sel de Bonneville puis d’établir le record de vitesse féminin sur un bolide révolutionnaire.

Avant de partir sur le circuit de Monza, Sandro l’accompagne chez sa mère à Bellagio où elle découvre l’ambiance guindée de la haute société italienne et surtout la cruauté de l’odieuse mère de Sandro.

« Sandro me servait de protection contre cet univers de luxe, de domestique et de coutumes, m’armait contre lui tout en m’y introduisant. »

L’auteur nous immerge alors dans cette Italie en pleine crise contre le fascisme avec l’action de Brigades rouges et les manifestations de la jeunesse gauchiste. Reno plonge dans cette atmosphère de rébellion des exploités contre les nantis et le luxe des riches rues de Rome.

Les lance-flammes est un roman ambitieux qui nous plonge dans le New York des artistes du milieu des années 70 puis dans l’Italie en pleine effervescence sociale.

Dans les deux cas, Rachel Kushner décrit parfaitement l’ambiance des milieux avec la rencontre de plusieurs personnages et la description de nombreuses scènes vivantes et perspicaces. Je peux même regretter que parfois, son ambition aille trop loin au risque de perdre le lecteur. Car elle souhaite nous donner tout ce qui constitue chacun. Du passé des Valera, de l’exploitation des indiens pour la récolte du latex, de l’histoire du gang des rues Motherfuckers des années 60, des records de vitesse, de l’insertion des mires sur les bandes cinématographiques, Rachel Kushner nous instruit. Certes, elle aurait pu se concentrer sur le roman d’initiation de cette jeune femme qui découvre l’art, la politique, l’amour et les différences sociales mais nous aurions pu alors lui reprocher le déjà lu.

Ce roman a sa patte grâce à son ambition et le charme de ses personnages avec une Reno adorablement jeune, n’osant dévoiler ni ses passions ni sa jalousie, un Sandro au charisme et charme indéniable, un Ronnie détaché et fragile, une Giddle paumée et extravagante et tant d’autres figures si bien campées.

Un roman ambitieux avec quelques longueurs mais qui mérite le détour.
Lien : https://surlaroutedejostein...
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Le Mars Club

Voici un roman noir qui dormait dans ma PAL depuis 2 ans. Mais pourquoi ne l’ai-je pas sorti plus tôt ?

Romy Hall commence deux peines d'emprisonnement consécutives dont une à perpétuité au centre correctionnel pour femmes de Stanville. Son crime? Le meurtre de son harceleur. À l'intérieur l’attend un monde où les femmes doivent se bousculer et se battre pour le strict nécessaire. Un monde aussi impitoyable qu’à l’extérieur. Dehors il y le San Francisco de sa jeunesse. Le club de strip-tease Mars Room où elle était autrefois danseuse. Il y a surtout son fils de sept ans, Jackson.

Jackson que la mère de Romy élève, car Romy a été déchue de ses droits parentaux Enfermé là à la prison de Stanville, Romy lié des amitiés autour de l'alcool brassé dans des chaussettes et des histoires partagées par les égouts. Son avenir semble tout tracer. Elle est résignée à vivre une longue et inébranlable attente, jusqu’à ce qu’ elle apprenne que sa mère, à qui elle avait confié Jackson, son fils de 7 ans, vient de mourir.

Ses nouveaux faits d’au-delàs des barreaux de la prison obligent

Romy à agir et à essayer prendre en main son destin. Rachel Kushner nous offre

un roman intrépide, audacieux et déchirant sur l'amour, l'amitié et l'incarcération. L’auteur nous trimballe dans les différents univers de Romy, son quotidien de détenue, mais aussi celui qui était le sien alors qu’elle était strip-teaseuse au Mars Club, et sa jeunesse à San Francisco dans les années 80. Avec Romy on rencontre l’Amérique des marges. Et avec elle « Le Mars Club » prend des tournures de polar, et des allures de roman noir. Un roman noir sur les laissés-pour-compte de la société américaine. Un polar sur le désarroi des minorités fassent aux pouvoirs des plus forts. Une histoire sombre que l’on lit en apnée dans l’espoir d’ un peu de lumière et depossibilité de rédemption.


Lien : https://collectifpolar.com/
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Le Mars Club

Romy purge une double peine à perpétuité dans une prison californienne. Elle a laissé son fils de 5 ans à la garde de sa mère, avec qui elle n'a plus vraiment de contact. Comme pour toutes ses co-détenues, c'est la vie qui l'a amenée là.



Entre les moments mornes et tristes passés en cellule, au réfectoire, dans la cour, dans l'atelier... Romy se remémore la vie d'avant; celle où elle vivotait à San Francisco et où elle était danseuse au Mars Club.



Cette lecture était assez déconcertante...



Rachel Kushner dresse de sa plume habile l'univers carcéral américain sans jamais tomber dans le pathos. Ce qui nous empêche de nous attacher aux personnages et nous oblige à regarder froidement la vie de l'héroïne s'écouler sans que rien ne parvienne à la retenir. Et Romy se souvient, par bribes décousues, de son passé, pas plus glorieux que son présent. Ces bribes font effets de suffocations dans un environnement oppressant, déshumanisé, sans espoir,...



L'auteur nous invite à suivre aussi quelques tranches de vie d'autres protagonistes, plus ou moins proches de Romy, mais sans début, sans fin; dans un ordre totalement décousu. De nombreuses portes sont ouvertes, nombreuses seront celles qui ne seront pas refermées. Ce qui laisse au lecteur un sentiment de malaise, d'incompréhension parfois, d'inachevé souvent. Un peu à l'image de la vie de l'héroïne; c'est sans doute un point fort du livre tout en restant son point faible si on ne prend pas de recul sur sa lecture. Et on tournera la dernière page en ne sachant pas, dans l'immédiat, que penser réellement de ce prix Médicis étranger.
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