Citations de Riikka Pulkkinen (219)
L'amour naissant a besoin du rêve. Besoin de réveils au milieu du songe, de pensées qu'on n'arrive pas tout de suite à situer.
C'est toujours comme ça, dit Riitta. Parle avec ta mère, évoque avec elle ce qui a été. Et quand l'heure viendra, lâche prise.
Aujourd'hui je pense pourtant que les vrais renversements prennent toute une vie, ils sont toujours silencieux et se produisent quand personne ne regarde.
Nous nous faisons autres et restons les mêmes, et j'aime son soupir à l'instant où je m'ouvre à lui et l'appelle à venir, et il vient.
Nul en ce monde n'a les moyens de tenir l'amour pour infantile et la foi dans le changement pour fausse.
Aimer est la seule façon de rendre le monde vrai, comme elle disait parfois. Elle disait : "Aucune révolution n'en est capable." Etait-ce puéril ? Je ne sais pas.
Les paroles de condoléances sont une langue étrangère pour ceux qui vivent leur jeunesse, c'est une langue qui fait mal quand on la parle.
En nous enroulant de rêves nous nous faisons l'un l'autre réels.
Quand il dit "Je le veux", il me regarde dans les yeux, derrière les yeux, et je pense qu'en réalité le visage humain est une béance, comme une clairière. Chaque prière et chaque espoir, la peur et la joie secrète, le bonheur de l'enfance, tout s'ouvre sur notre visage comme si l'on passait des profondeurs de la forêt à la lumière quand une personne dit "je le veux".
C'est le premier stade de l'amour. Quand on voit l'autre tout entier, et que l'on peut cueillir dans son regard chaque peur et chaque rêve comme un fruit mûr.
Ils se levèrent comme d'un commun accord, se regardèrent à la manière des gens qui, en vertu d'une étrange fantaisie, se sont tout révélé l'un à l'autre. Le sourire de la femme demandait de la grâce, de la solidarité, espérait de la discrétion. Martti répondit à son sourire.
- Alors, demanda-t-elle, qu'est-ce qui a été le plus difficile ?
Il réfléchit un instant.
- Ca a été de voir l'autre changer. De devoir la réapprendre. Et de voir en elle combien vous-même avez changé.
La femme hocha la tête, elle était satisfaite de sa réponse, c'était une parole éternelle et vraie.
- Quoi d'autre ?
Il s'entendit le dire. Il ignorait pourquoi, mais il n'eut aucun mal à le faire :
- Le plus difficile ce fut d'en aimer une autre.
Ils abordaient les régions des phrases vraies.
A quel moment les membres de votre famille deviennent-ils un miroir douloureux à regarder ?
Les relations entre les gens sont comme des bois touffus. Ou bien les gens eux-mêmes sont des forêts, les sentiers s'ouvrent en eux l'un après l'autre, chemins se demeurant mutuellement inconnus ne débouchant que par hasard sur les voies qui conduisent au bon endroit.
Le chagrin arrivait alors, il le laissait venir à lui, il l'essayait comme pour s'y habituer. Il le décelait dans la position de sa main, à demi-étendue. Il fallait lui ménager de la place, le prendre dans ses bras. Autrement cela survenait sous la forme d'une terreur, imprévisible et soudaine, à un carrefour alors qu'il traversait la rue ou bien au magasin quand il choisissait ses mandarines ou ses pommes de terre.
"Comment peut on aimer sans excès? Et pourquoi, même, le faudrait-il? Ça n'existe pas."
"Quelle autre vie y a-t-il que de se perdre dans les autres et se retrouver en eux?"
Les cris des hirondelles étaient en lui et non plus dans le ciel; il n'y avait plus de frontière nette entre lui et le monde.
- Il n'y a en cela aucune mystique. Je me défais de moi, je reçois le monde.
(le narrateur parle d'Art, du moment où il créé)
La réalité des enfants est faite de rêves et de jeux. Le mensonge s'y mêle sans qu'ils s'en rendent compte. À moins que ce ne soit le cas de toute réalité humaine. Rêves, jeux, mensonges.