Tu sais, je vais te filer un truc pour que le désespoir ne gagne pas ton cœur dès la première page.
L'adolescente roulent des yeux en s'affalant sur sa paume.
Je vous écoute. Je souris discrètement.
Un roman c'est comme la vie. Au lieu de toujours penser a l'avenir et au nombre de pages qu'il te reste, concentre toi sur le chapitre du moment.
Lia n'aime pas les hommes. Et c'est comme ça. Mais elle va devoir vivre avec un homme toute sa vie parce que des gens pensent qu'une femme qui aime une autre femme a le Diable au corps...
Connor laisse échapper mon prénom entre deux râles. Puis brusquement, je rouvre les yeux. Mon cœur martèle ma poitrine et mon esprit s'affole. Un visage vient de s'immiscer, sans crier gare, dans notre tableau. J'ai beau me concentrer sur Connor, imprimer chacun de ses souffles, chacune de ses caresses, des yeux fauves brillant d'insolence me bousculent et me ramènent dans mes songes. Des cheveux en bataille et vivant de couleurs me rappellent les heures précédentes ainsi que la joie que je ressentais. Une voix que j'ai trouvée bien trop à mon gout se glisse dans mon cerveau, telle une mélodie, m'obligeant à ne penser qu'à elle.
Connor bascule hors du précipice, me dit qu'il m'aime, et moi, iris rivés au plafond, je ne pense qu'à elle.
Ne cours pas après les autres pour être aimée, ne fais pas des choses que tu ne veux pas faire pour qu’on veuille de toi. Les personnes qui t’aiment vraiment n’ont pas besoin que tu te plies en quatre pour leur plaire, tu n’en as pas besoin.
Laisser quelqu’un nous ramener à bon port, c’est accepter de perdre le contrôle, accepter de vivre. C’est accepter le fait que quelqu’un puisse se battre pour nous. Et on doit se battre pour ça.
« Tu l'aimes ? »
Non, je bois chacune de ses paroles, absorbe chacun de ses rires, capture chacun de ses sourires. Elle me fait tourner la tête. Elle m'entraîne dans les rues. Elle me fait danser. Elle ne me promet rien, à part de la légèreté et le présent. Elle me rend heureuse. Je connais l'amour. Il est étouffant, fait de moi sa prisonnière et m'impose toutes ses décisions.
Alors que là,
là,
là...
Là.
Je brise toutes les règles.
Je hurle dans mes pleurs.
Je hurle dans ce corps qui a bien trop crié.
Je hurle comme une vieille chanson que l’on connaît sur le bout des doigts.
Je suis tombé…
I fell…
Maintenant, je comprends. Tomber amoureux n’a rien d’une ascension. C’est une chute. Lente. Interminable. Brutale.
Une décharge me parcourt de la tête aux pieds. Nos corps imbriqués l'un contre l'autre, la musique en fond sonore, tout diffère de ces danses endiablées que nous avons partagées. Cette attirance et cette tension qui nous animaient ne riment plus avec charnel, elles se font amoureuses.
Et je sens son cœur qui bat, bat.
Le temps s'étire un instant, juste ce qu'il faut pour que sa main atteigne la mienne. Ses doigts s'enroulent autour des miens. Ils caressent ma paume. J'en ai des frissons et le cœur réparé. Et j'explose en mille couleurs lorsqu'elle chuchote, son fichu sourire au coin des lèvres :
— Tu danses ?