Citations de William Thorp (14)
Comment est-il possible que la Californie, cet éden du rêve américain, cette promesse d'amour, de soleil et de vie nouvelle, ait versé dans l'horreur ? Accoudés au comptoir du Marie Donut's ou du Pine Cove, les QG qui leur servent de soupape, les policiers de Sacramento terminent souvent leurs nuits avec cette question. Aussi souvent, ils rentrent chez eux sans la réponse.
Il écoute le silence. Viendra bien le moment où le souffle d'un homme brisera ce calme apparent.
l'autre ne vous veut jamais du bien et (...) le mal est à chaque coin de rue.
Il se tourne vers ses collègues et leur dit : « Je crois qu'on un putain de violeur en série sur les bras. »
Mars 1977. Richard Shelby est assis sur le capot de sa voiture. Il a un pied qui touche le sol, et l'autre jambe appuyée sur le pare-chocs de sa Dodge. Il a éteint ses phares, coupé le moteur, et laissé la nuit l'avaler.
Si un oiseau survolait Rancho Cordova, il n'y verrait qu'une ville en pointillé, sans relief. Dans cette partie du comté de Sacramento, en Californie, où les maisons de plain- pied s'alignent comme des briques, personne n'a jamais eu l'audace d'ajouter un deuxième étage. Un homme agile pourrait sauter de toit en toit sur des centaines de mètres sans efforts. On entendrait alors seulement le bruit de ses pas résonner entre les murs préfabriqués. Avec la verdure épaisse et les chênes qui pointent vers le ciel, de nuit, cet homme serait aussi invisible qu'un chat en pleine chasse.
L'addition donne le vertige : entre 1979 et 1986, un tueur en série a assassiné dix personnes sur la côte californienne, sans que nul ne s'en aperçoive. Le 1er octobre 2000, l'Orange Country Register, journal local, titre en large et en gras : "Un tueur en série révélé par son ADN".
Comme toujours aux États-Unis, ce nouveau tueur ne tarde pas à se voir affubler d'un surnom : il sera l' "Original Night Stalker" - " Le Rôdeur de la nuit".
Le 28 mai, dans South Sacramento, une jeune femme et son mari sont attaqués par l'individu masqué. C'est la dernière fois que Richard Shelby foule l'une de ces scènes de crime. Il est retiré de l'enquête de l'East Aera Rapist. Sa hiérarchie s'est rendu compte, elle aussi, qu'il était épuisé et que l'affaire l'avançait pas.
Regardez là où vous pensez qu'il ne sera pas. Regardez les toits, les buissons, dans les arbres; regardez dans les endroits les plus insolites, et si vous ne le voyez pas, cela ne veut pas dire qu'il n'est pas, lui, en train de vous regarder à l'instant même.
S’entendre dire aux victimes que l’enquête est au point mort malgré une liste de cinq mille suspects passés au crible, malgré des douzaines d’hommes aux profils intéressants disséqués, lui est insupportable
Lorsque l'affaire de l'East Area Rapist éclate, il a apparaît vite que la prise en charge des victimes est calamiteuse. Les policiers masculins n'ont reçu aucune formation lative à ce genre d'enguêtes. A une victime de quinze ans qui raconte l'attaque qu'elle a subie, ils coupent la parole : « On veut les faits, rien que les faits. » Ce qui les intéresse est la taille du sexe de l'agresseur. La jeune ille n'en sait rien. Ils la pressent : « Si vous deviez le comparer à un hot-dog, il serait plus petit ? Et un cornichon ? Réfléchissez ! > Pour beaucoup des victimes, ces interrogatoires sont une deuxième agression. Elles sont interrogées à quelques mètres de là où, quelques heures plus tôt, elles étaient attachées. Elles Sont parfois couvertes d'une seule serviette ou d'un drap. On les trimballe d'une pièce a l'autre, on les prend en photo.
Le lendemain, le petit garçon lui raconte sa nuit : il a vu un homme, il marchait sur le toit, il portait une cagoule et a éclairé sa chambre de sa lampe torche. Shelby est pétrifié. Il sait que l'enfant n'a pas pu imaginer ça. Pas avec une cagoule et une lampe torche. Il n'a pas de doute sur l'identité du rôdeur : l'East Area Rapist est venu lui rendre visite. Les épaules d'habitude si hautes du détective sont soudainement bien basses : qui chasse qui, dans cette enquête ? (p. 66)
Poursuivre l'East Area Rapist donne parfois à Richard Shelby l'impression de courir après un mirage. Un homme sans visage, sans nom et sans passé. Pourtant, depuis quelques semaines, il a repris espoir. Le détective détient un nouveau portrait-robot dessiné. Sur celui-ci, le suspect, vêtu d'un treillis militaire, a des yeux plissés et une fine mèche blonde peignée sur le côté.
je disparaîtrais dans la nuit