Bien sur, tu ne sais pas grand chose, dit Moroes. Les jeunes ne savent jamais grand chose. C'est ça être jeune, j'imagine.
Avant la guerre les choses étaient différentes .Bon sang ,à l'époque ,on essayait de faire notre boulot,payer nos dettes et poignarder nos semblables ,hommes et femmes ,dans le dos.Nous n'avions pas idée que cela finirait si mal.Nous étions gras et heureux comme des vers sur un cadavre.
A mi-chemin entre celle d'un lézard et d'un troglodyte, la tête du monstre arrivait à hauteur du rebord de la fenêtre. Son groin était plus fin et délicat que celui des hommes-lézards qu'elle avait combattus. Une immense crête couvrait une ligne médiane, des yeux jusqu'au crâne. Dépourvu de lèvres, la bouche garnie de croc en dents de scie accompagnait le regard jaunâtre de choses mortes.
Et si une vraie guerre éclatait, eh bien, c'était le problème des militaires. Des militaires. Pas le nôtre.
A la lumière rasante du crépuscule, les pierres rouges étincelaient comme des rubis sous un ciel indigo. La beauté du tableau était gâché par la forme noire qui planait au-dessus de l'édifice.
Les contours rouge sang du monstrueux amas flottant étaient composés d'arêtes tranchantes, comme s'il se fût agi d'un gigantesque bloc de pierre arraché à la terre par quelque cataclysme inouï.
La sorcellerie seule avait pu accomplir pareil prodige. Le bloc écraserait la moitié d'Immersye s'il tombait. Au sommet se dressaient des murs si hauts qu'ils disparaissaient dans les nuées.
-Qu'Est-ce que c'est ? chuchota Giogi,effaré.
-La forteresse de Flattery, l'informa son oncle l'air sombre. Il est venu avec elle.
Déjà ébloui par la Pierre du Trouveur, le monstre ne vit pas venir le danger : une bouffée de givre cassa les tentacules verdâtres, brutalement gelés. La Pierre enchantée tomba ; le spectateur battit en retraite.
Sous les rayons de lune, ses mains levées devinrent translucides puis disparurent. Sa vue se brouilla.
Quand la vision lui revint, le monde avait changé autour de lui : il était devenu invisible.
- C’est que… (Elle lui adresse un regard en coin, sous ses longs cils.) C’est que, éclata-t-elle, je n’ai nulle part où aller ! Il me trouvera où que je sois ! Et il sera d’autant plus furieux contre moi, finit-elle d’une voix brisée.
Bravo ! Excellent numéro d’actrice.
Olive aurait applaudi, si elle avait eu des mains.
- Je vois, dit Giogi, solennel.
Ne sois pas idiot, Giogi !
- Je vous offre ma protection.
Quelle cruche !
- C’est généreux de votre part, maître Giogioni, mais je ne puis accepter. Flattery est un mage aussi puissant que violent, et emporté. Je refuse de vous faire courir de tels risques.
Réfléchis, Giogi, implora silencieusement Olive. Elle cherche à t’apitoyer, c’est tout. Prends-la au mot ! Accepte son refus. Tu ne tiens pas tant que ça à te dresser contre des mages puissants et emportés !
- J’insiste, dit le jeune homme.
Je le savais ! pesta-t-elle, désespérée.
(page 72 - Fleuve Noir - 1995)
- Elminster a pris ma défense.
- Vous avez diantrement confiance en ce vieil hibou.
- Les ménestrels ont l'habitude d'écouter ses conseils.
- Et vous vous attendez à ce qu'ils passent l'éponge et vous rendent votre statut de maître ?
- Naturellement.
(page 17 - Fleuve Noir 1995)
- Qu’est-ce que ça va me coûter ?
- Trystemyne a pensé que nous devions vous aider.
Le seigneur de Valombre avait été des plus gracieux avec elle, même si ses sujets étaient quelque peu bizarres. Les tatouages ne réagissaient pas à la proximité de la pierre ; elle la prit.
- Pourquoi ? murmura-t-elle.
- Souvenez-vous de ceci, Alias : le bien et le mal ne le sont pas toujours.
Et il tourna les talons.
- Ne sont pas toujours quoi ? cria-t-elle.
- Le bien et le mal.
De nouveau seule, elle se hâta de rentrer, lasse de ces arcanes nocturnes.
(page 130 - Fleuve noir 1995)