Disons tout de suite que les Français n'étaient pas les seuls à avoir des buts de guerre ambitieux. Les Allemands étaient décidés à affaiblir considérablement la Russie en lui enlevant la Pologne et les provinces baltes qui seraient soit rattachées, sous une forme ou une autre, au Reich, soit divisées entre celui-ci et l'Autriche-Hongrie. À l'ouest, certains imaginaient de considérables annexions aux dépens de la Belgique et de la France. Mais l'échec sur la Marne et la prolongation indéfinie du conflit convainquirent les dirigeants allemands qu'une victoire totale sur tous les fronts ne serait pas possible. Il faudrait donc essayer de détacher tel ou tel adversaire, et donc de moduler les buts de guerre en conséquence. L'essentiel était de garantir la sécurité du Reich à l'avenir. Comme la voie des annexions territoriales avait ses limites (nécessité de se ménager la possibilité de conclure une paix séparée avec tel ou tel, et danger d'accroître encore le nombre des allogènes), l'instrument privilégié serait une union économique de l'Europe centrale (Mitteleuropa) permettant à Berlin d'exercer ce que nous appellerions aujourd'hui son "soft power", sur l'Europe centrale et occidentale, en fait son protectorat sous l'apparence d'un simple contrôle économique.
Chauvel aurait préféré que l'on négociât avec les Soviétiques, tout comme de Lattre et le président Vincent Auriol. Mais ce fut l'absence totale de volonté de compromis du côté soviétique qui poussa les Français à se rallier définitivement et complètement au camp occidental. L'orientation occidentale de la France a été largement l'oeuvre de Staline...
Une conséquence importante - et un vrai tournant de la guerre - fut que les Britanniques, qui introduisirent enfin la conscription en 1916, devinrent de plus en plus impliqués dans le conflit et remplacèrent les Russes, dont les difficultés de toute nature croissaient, comme premiers alliés de la France.
Les Alliés avaient multipliés les propositions contradictoires. Elles allaient les hanter par la suite.
Le coté manipulateur de Gorbatchev est à garder présent à l'esprit.