Parfois n'importe où est mieux qu'ici...
Je dois apprendre à ne pas croire à tout ce que j'écris.
Car qu'est n'importe où sinon un autre ici, qui nous attend ? Et pourquoi devrais-je m'attendre à ce que le prochain ici soit meilleur que le précédent ? Ou pourquoi, parmi une multitude de possibles n'importe où, celui-ci, et non un autre, deviendrait-il un nouvel ici ?
Un jour, Elmira m'a demandé : 《Pourquoi bougez-vous tout le temps sans jamais aller nulle part ?
- Parce que je ne peux pas payer le loyer》, dis-je. Je savais que cette réponse la satisferait.
Pour celui qui permet à son passé de prendre plus d'emprise sur lui que tous ses avenirs possibles, la mémoire devient une prison.
Loui Shew ne portait pas de montre (《Cela gâche le plaisir de vivre, monsieur Poe, que de contrôler les heures qui passent》).
Vous aurez observé, mon cher, combien à présent Edgar fait la confusion entre son histoire - plus elle l'obsédait et plus le dénouement lui échappait - et les événements de sa propre vie. Qui sommes-nous pour le contredire ? Un écrivain utilise ses rêves secrets pour échapper à l'ennuyeuse réalité. Mais qui saurait dire où finissent les uns et où commence l'autre ?
Pourquoi le ciel, la nuit, est-il noir ? Pourquoi ne flambe-t-il pas ? Pourquoi la lumière de l'infinité d'étoiles de cet univers infini ne diffuse-t-elle pas une lumière, éblouissante, aveuglante ? Edgar Poe avait posé la question et y avait répondu : Quand notre regard se perd dans les lointaines profondeurs de l'espace il se porte aussi en arrière vers l'aube des temps, à une époque où les étoiles n'étaient pas encore nées.
Poe - y avait-il une question à laquelle il n'avait pas répondu, même la plus audacieuse ? À présent, il était mourant, et Mary se sentit submergée par la tristesse, non seulement pour l'homme dont les jours s'achevaient prématurément mais pour le monde qui allait être bientôt privé de son génie.
Dans les rêves, il y a toujours des réponses, si l'on sait où - ou plutôt comment - les chercher. On ne peut en dire autant, hélas, de la réalité. Les questions abondent. Mais non les réponses.