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5/5 (sur 2 notes)

Nationalité : Allemagne
Né(e) à : Lódz , le 20/05/1929
Mort(e) à : Francfort , le 26/02/2016
Biographie :

Karl Dedecius est né en Pologne, à Lódz, en 1921, dans une famille allemande. Il a grandi dans un environnement bilingue polono-allemand et il a pu se familiariser avec deux traditions littéraires, deux cultures et deux civilisations.
Karl Dedecius a traduit plus de trois cents auteurs polonais en langue allemande. Il a fait découvrir au public germanophone des auteurs polonais éminents comme Zbigniew Herbert, Szymborska, bien avant que le public international ne leur prêtât attention.

Karl Dedecius fut maintes fois récompensé pour son travail de traducteur et de découvreur littéraire. En 1990, il a reçu le prestigieux prix de la Paix des libraires allemands. Il a publié plus de cent livres en allemand dont de nombreuses monographies et anthologies consacrées aux auteurs polonais. Il a fondé la série éditoriale « Bibliothèque polonaise », qui témoigne de la persévérance et de la riche contribution de ce connaisseur hors du commun de la culture polonaise
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Source : Editions Noir sur Blanc
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Citations et extraits (6) Ajouter une citation
Maciej Niemiec ( 1953/2012 )

EN BUVANT DU WHISKY SUR LA ROUTE DE GENF TO AMST
De Genf to Amst, ça leur a pris 4 jours, conduisait le moins shooté du moment ;
Où nous étions sur la route, j’en sais rien, je conduis pas, donc je buvais. La radio
Jouait dans la tire, et parfois me parvenaient des nouvelles, mais en parlions-nous,
J’en doute – car que pourraient se dire des gens sans fusils, comme nous,
Faiblement formés à la guerre, comme nous, sur les ruines de l’Europe.
Peut-être même que j’achèterais un fusil, et alors ? Devrais-je tirer sur des gens ? –
Eux, mes copains et copines, ils voulaient simplement acheter à Amst de nouveaux
Champignons, mélangés dans des laboratoires avec quelque chose. (Moi je préfère
[le whisky.)
Chacun a la perception qu’il mérite. À quoi bon des champignons si sans eux
De toute façon on voit le monde trop distinctement. Quelqu’un a dit un jour, contre
Le whisky : – Mais pensez-vous à la perception ? – Je ne la lui souhaite pas,
Celle dont je me défendais alors en buvant du whisky ; c’était une vision
Permanente face à laquelle chaque homme normal se défendrait et roulerait
De Genf to Amst, pour en trouver une autre, quelques cocktails et champignons
Qui lui permettent de s’oublier lui-même dans un monde sans direction,
À moins qu’on ne soit chef de quelque mafia, telle que la Chine ou les Pakistanais.
Je connais seulement un peu l’histoire de l’Europe et de quelques femmes.
Que dire ? – Comme d’habitude depuis des millénaires le monde se rebelle
Contre lui-même, surtout dans les pays pauvres traditionnels – les massacres
Y deviennent endémiques quand en sont partis les puissants. (C’est pourquoi
Je bois du whisky ?) Là-bas aussi il y a des gens, mais dans la tête ils ont d’autres
Labyrinthes. D’Europe nous leur avons refilé nos illusions, kalachnikovs,
[missiles et perspectives
D’armes encore plus efficaces, et ils apprennent à s’en servir, au nom de la liberté,
Et nous, de plus en plus désarmés, mis à part l’ironie, comme si lui incombait de
[sauver
Ce monde qui ne lit plus que des livres sacrés et inactuels. (Moi je préfère lire plus.)
– Voyageons plus loin, copains et copines, unis par le pressentiment de la vision
D’un monde un peu autre, voyageons, de plus en plus non alignés, franchissant
Des frontières de moins en moins visibles. – To Amst ? – OK, pourquoi pas. Ale
Potem wracam na Belleville. – Elle te manque ta place sur la Place d’It ?
– Oui, mais, surtout, va t’faire foutre ailleurs. – Voyageons, vers Ixtlan. –
Ou peut-être que c’est toujours la même chose publique [1]
[1]
[Note du traducteur.] Traduit « pospolita rzecz », inversion… dans toutes les directions,
Dont on rêve en ces voyages incroyablement pas trop conscients,
C’est quelque Pologne autre qui n’a jamais été. – Royaume perdu.
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Maciej Niemiec ( 1953/2012 )

CRÉPUSCULE
1
Je regarde mais ne reflète pas
En retour. Les fenêtres de la cour tournent le dos, comme moi
Et la lumière baisse comme une fièvre.
Un oiseau dont une nouvelle fois je ne connais pas le nom
Trace au-dessus des toits un prompt signe d’oubli.
Je parviens déjà presque à le déchiffrer.
Rien n’a changé. Immortel crépuscule. Je suis le même.
Ont changé les pays, les villes, les amis, les maisons, les femmes.
Pas d’effort ce soir. Je suis assis dans la cuisine et regarde par la fenêtre.
Je suis parvenu à maturité. Je ne désire rien.
2
Cela hésite pour rien. Un paysage prédéfinitif. De cette fenêtre.
Sur la table un désordre de choses.
Un rien qui est harmonieux parce
Qu’il existe.
C’est moi qui dis rien. Lui ne dit rien.
Choses qui existent depuis longtemps, souvent
Plus longtemps que moi. Elles existent
Souvent. Elles sont utilisées. Sans quoi
Elles ne pourraient pas. Ce sont les choses qui sont définitives.
Pas nous ; ou plus que nous. Usées
Pour finir. À
Jeter. Sans
Mort, sans son
Baiser.
3
Caresses imaginées durant ces vingt dernières années,
dont nous prenons finalement le risque.
Que du coton et de la soie, rien d’artificiel. Interminables
allergies. Rien n’est plus d’aucun
secours, cela n’est plus d’aucun
secours, même précisément cela.
4
Et je suis tombé comme si c’était dans un film,
je suis tombé et en même temps j’étais assis à la table de montage,
c’était parfaitement réglé, cette chute, l’escalier
verglacé et le héros, moi, dans un vrai cul-de-sac, parti dans une glissade
et avec cette vision – par bonheur contrôlée – d’encore cinq
mètres d’escalier verglacé en contrebas, pourtant
toujours lucide, avec mon frère jumeau à cette table
où s’est révélé combien de choses nous séparent, et combien
cela dure depuis toujours, surtout la technique du montage, donc
tout de suite j’ai bu et j’ai freiné à mort, je ne suis pas
tombé mais je me suis jeté sur l’herbe
tout près de l’escalier (en ce temps-là on changeait
de saison), y épanchait ses fleurs ce qui s’avéra
(là-bas, nulle part) n’être qu’un arbuste de mimosa.
5
Parfois mes mains tremblaient, je ne pouvais même pas
boire un café, j’étais jeune et je n’osais pas toujours commander une vodka,
c’était trop intime parfois, la vodka et moi nous avions nos petites affaires, que
je ne voulais pas forcément exposer à tous ; je me souviens comment une fois
H. arriva dans la librairie, jeta sa casquette par terre et dit tu sais – ils m’ont coupé
la ligne, il est vrai que je ne paie pas depuis un an mais
après tout ils ne savent pas pourquoi. C’est exactement
ce que je veux dire : ne cherchez pas trop, n’allez pas trop loin.
Le crépuscule arrivera seul,
ou en compagnie de la nuit.
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Maciej Niemiec ( 1953/2012 )

VOYAGE HIVERNAL

Sur la vitre poudre blanche
que personne n’enlève.
Personne ne regarde par la fenêtre.
La mort se balance gaiement sur un fil de fer.
Celle qui m’est apparue en rêve
n’avait ni visage ni mains,
un corps blanc à côté dans l’eau
qui coule par les escaliers depuis les étages supérieurs.
Ne t’étonne pas, ne te demande pas comment on peut – être.
Cette fois encore le voyage sera important : le départ ne différait
en rien du retour. L’eau miroite
dans la neige fondue près des rails. Ce avec quoi on se souvient
effleure les troncs d’arbres, s’arrête un bref instant près des fenêtres,
bien que cela le sache – personne ne retrouvera ce
que personne n’a perdu.
Voyage hivernal, hôpital express,
piqûre qui ne guérit pas, bien que la douleur disparaisse.
Elle fond rapidement comme les figures derrière la vitre
qui ne sont inscrites dans aucune formule,
la plaine est vide comme si personne ne regardait.
Une femme dort blottie dans un coin du compartiment.
Regarde-la, touche-la, elle sait.
Avant qu’à nouveau ne se perde dans les fourrés des murmures
cette voix que tu désires entendre, distinguer :
« Après le pont à gauche tourne, quelques marches en descendant,
sentier à travers un feuillage
par lequel tu arrives à une porte, en bas
près des marches de l’escalier se dresse une bouteille vide,
maintenant monter l’escalier ».
Quand je t’ai retrouvé,
je t’ai demandé :
ne meurs jamais.
Das Unzulängliche,
hier wird’s Ereignis ?
I eto boudiet vietchno natchinatsia.
Blouses blanches des champs,
rose noire sauvage,
vrillée comme un fil de fer barbelé.
Tournent en rond
les cercles du paysage.
Personne ne sait où est partie la Fée.
– Noyé ivre de l’eau glacée des songes,
avec tes doigts enlève la neige durcie de ton visage,
de ton souffle fais fondre la glace sombre de la vitre,
et ne dors pas…
Seras-tu éveillé ? Le doigt dans la septième côte ?
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ÉCLAIRCIE

C’est quelque chose de non transparent,
dans la lumière silencieuse
d’un après-midi limpide, patiemment debout
dans les vitres de la grande fenêtre, dans le silence
de pierres de taille des murs froids,
façonné seulement par les clochettes
de la tour, par-delà les cloisons, par le son pur
des horloges inexactement concertées,
consonantes tout de même, à côté de soi, sans hâte
et à temps, juste à côté du temps, ce qu’il faut pour qu’on puisse entendre
ce que le temps n’est pas, et entendre sa propre voix, toute de temps,
de ce qu’il n’est pas, parmi les voix, invoquant
avec les versets du psalmiste, lointains et à l’instant proférés,
C’est quelque chose, pesant constamment vers le bas, planté dans l’espace
entre terre et ciel sphérique, à peine esquissé
par la forme d’un arbre, vers le bas et vers le haut, mais lumineux
et sans tache, comme si terre et ciel étaient
privés de pesanteur, et que la forme du monde était le vide,
bien qu’un oiseau, dont cela ne sait rien, les distingue,
C’est quelque chose, remuant à peine, sans lumière, semi-vivant, moi ?
Cela même qui regarde maintenant
le dessin de la tapisserie dans le café
et éprouve de la paix,
entendant la rumeur des voix et le tintement du verre.
À nouveau le monde est là
et ses deux principes : plus près ou plus dru.
Accueille cela, mon moi dont je ne sais même pas
si je peux t’appeler ainsi, accueille cela
que tu es.
Je suis toi –
remuant à peine, sans lumière, pesant constamment vers le bas.
Même moins – je suis.

Maciej Niemiec
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Maciej Niemiec

WERNICKE

Matin, température basse.
Le visage comme un poisson du frigo
tombe du miroir accroché
au fond du couloir.
La journée ne commence pas bien.
Ses étagères sont inclinées dès le matin,
par suintement accumulée depuis
des semaines de la vase, ils tombent
gelés, immangeables les poissons
dans leurs armures irisées
de chitine. Siffle la bouilloire froide
dans laquelle l’eau ne bout pas.
L’indescriptible est la matière des rêves.
L’appartement est parcouru par des étrangers,
sans y prendre garde ils piétinent le visage
qui gît sur le plancher comme une petite baleine.
Les amis morts murmurent quelque chose
sous le gazon. La mémoire, qui
ne falsifie pas, devient glissante comme une vitre.
Elle discourt dans une langue étrangère.
Elle rampe sur le mur
comme un dartre. Elle discourt
dans une langue étrangère pour les sources
d’où jaillit de la poussière.
Sa langue est aussi étrangère que si je ne l’avais
jamais eue dans la bouche. Elle dit que
l’invisible détruit ce qui est visible
et qu’il est difficile d’y trouver des directions. –
Sa musique obstinée contre
son silence obstiné. Les petites choses
ont grandi et veulent être comme le chaos
des grandes choses de l’éternité.
Elles ont des visages à voie étroite.
Elles voudraient grandir encore, et
privées de mémoire discerner les esprits,
alors que même eux, un jour, ont dit seulement :
Le vide est forme
Les démons sont entrés en vous
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Maciej Niemiec

À Dieu ne plaise qu’il faille passer ainsi l’éternité entière…
Seul le halo du réverbère de la place tombe sur le visage à travers la vitre.
L’horloge égrène les heures. Une pensée inachevée
Revient en écho de derrière la porte – jadis le temps
Ou plutôt l’espoir manquait pour parvenir à la source des mots.
Parvenir à la fin du rêve. Et le rêve déjà trop obscur
Pour s’endormir. En bâillant seulement. En désirant une inexistante.
Qu’il en soit seulement ainsi. Pas autrement. Il y a une autre insomnie
Où par une étroite sente descendent la pente des silhouettes obscures
Et aucune ne se retournera. Ou bien une pièce où une lumière éclatante
Brille jour et nuit. Une forêt dans laquelle les aiguilles des sapins tremblent
De coups de pistolet isolés, successifs. Une insomnie
Dans laquelle une lourde fumée s’élève d’un prisme de grêles dépouilles.
Mais ici rien. Le calme. Sur le mur tremble une ombre polymorphe.
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