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De l'air

De l'air est un recueil de textes écrits entre avril 2002 et août 2005, publiés dans des versions souvent remaniées, ils l'ont été à l'origine dans plusieurs revues dédiées à la poésie.



Dans une succession de poèmes en prose et en vers regroupés en cinq parties différentes (Histoire rayée, Constat de travail, Mémoire – mère, Trajets dedans seul et Calme calme), Antoine Emaz évoque des sujets divers, venus du dehors affectant le champ de l'intime.



Dans une écriture minimaliste, la tension chez Emaz est toujours à l'oeuvre, elle fait oeuvre. Mais il y a toujours aussi, chez lui, le besoin de dire simultanément le tragique et la beauté du vivant. Un besoin souvent différé, contrarié, mais réitéré.



Il y a l'irrespirable, le flux d'informations insupportables, l'environnement sociétal devenu invivable qui nous procure comme un manque d'air, une perte de souffle. Une histoire rayée, une violence, une incompréhension qui apparaissent jusque dans le visage d'un enfant devenu un soldat :





« pousser l'image hors de l'oeil - si on pouvait - la nuit reviennent ces têtes et leurs yeux vides sur un monde sans accueil - enfant aux yeux écarquillés Sierra Leone riant son arme sur le ventre - fierté stupide posture apprise ou imitée mais des yeux sans larmes et même heureux d'être vieux avant le temps - gouffre »





Et puis il y a la mémoire vie, celle de Mémoire-mère, la disparition de la mère au coeur de la « routine », ce temps dans le temps pris dans l'engluement, l'encrassement, comme dans un encombrement d'ombres.





« tout ça fini 

sortir à l'heure

entre les formes noires et blanches

qui vont vite et les autres

cheveux blancs et pantoufles

qu'il faut doubler

doucement



mécanique des corps

dans leur branle encore

sans compter ceux qui restent

derrière les portes



quelle pitié »





Dans cette lassitude de l'être, dans ce constat fait sur soi, il faut espérer, chercher le moment de la respiration, du calme, enfin. Dire combien les fleurs et les couleurs permettent ces respirations puissantes qui font du poème un corps-langage puissant jusqu'à ce « rouge » dans lequel plonger, et se retrouver :





« mémoire là qui remonte de la fleur une trentaine d'années amont sixième étage un pot de géraniums rouges et l'expérience de la couleur l'intensité possible de l'énergie qu'elle porte ensuite retrouvée dans deux panneaux mono-chromes de Lavier titrés rouge géranium par Duco et Ripolin ou l'inverse quelque chose d'évidence là brutale les mots ne collent pas aux choses mais ça n'enlève rien au poids de la fleur à son pouvoir d'imbiber l'oeil jusqu'à ce que tout le corps ne soit qu'infusion rouge sans comparé sans rien que la tension d'être de la fleur dans sa couleur »





La poésie d'Antoine Emaz est une trace d'air laissée sur la page, elle est une pensée qui persiste au creux de la fatigue, qui s'enquiert du possible retour à ce temps d'avant la parole, à ce temps où celle-ci nous donnait les moyens d'espérer.



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