Si la gorgone Méduse était dominicaine,
et qu'elle avait une fille, ce serait moi.
J'ai l'air d'une créature mythologique.
Un monstre chimérique, qui interrompt
toutes les conversations.
Cheveux frisés comme des départs de feu,
fusant vers le plafond. Lèvres serrées,
lames de couteau. Cils longs. Trop longs.
J'en suis presque jolie.
Si la gorgone
était dominicaine, si elle avait une fille,
mon sang toujours versé pour les exploits
de ces pseudo-héros qui nous massacrent.
Fille, de Méduse, j'apprendrais les secrets
de ces regards qui pétrifient les hommes
et les arrêtent en pleine conquête comment
ça se fait qu'ils continuent à venir ?
comment les empêcher de nous conquérir ?
On est différentes, cette poétesse et moi. On se ressemble pas, on vient pas du même monde. Pourtant on est presque pareilles quand je l’écoute. Comme si elle m’entendait.
Ce qui
m'apaise
c'est mon carnet,
écrire écrire écrire,
tout ce que j'aurais voulu dire,
transformer en larmes de poèmes
toutes mes pensées coupantes,
les imaginer trancher net
mon corps pour
que j'en
sorte.
Les autres filles disent que je me la pète. Pute. Pouffe.
Nympho.
Quand ton corps prend plus de place que ta voix,
la rumeur vient se coller à toi.
Mieux vaut laisser parler ses poings.
Mieux vaut laisser
tes épaules se hausser
si des insultes prennent la place de ton prénom
quand on s’adresse à toi.
Je me suis construit une carapace aussi épaisse que moi.
Et c'est ainsi que Xiomara
persuada le monde entier
à mains nues, les phalanges en sang
de l'appeler par son prénom,
de ne pas s'attendre à ce qu'elle soit
une sainte, mais juste une femme normale,
adulte, quelqu'un à respecter.
depuis toujours elle avait su
que le monde ne chanterai pas ses louanges,
mais elle attraper tous les
clichés qui la tenait captive,
et le rat serrer la gorge
jusqu'à ce que d'une voix étranglée
Ils soufflent enfin la vérité.
On se rappellera Xiomara
sous bien des angles : la lycéenne,
le miracle, la jumelle aimante,
la petite fille toujours incomprise.
Mais plus essentiellement encore,
on se rappellera l'effort
qu'elle fit toujours pour devenir
la guerrière qu'elle voulait être.
Parfois quelqu'un dit quelque chose
Et ces mots-là te mettent le feu,
comme le clic, clic, clic du briquet
fait éclore sur un cercle de la gazinière
un bracelet de flammes bleues...
Elle m'a traînée à l'église
comme on emmène un prisonnier en taule
et j'ai pas le temps de lui dire que Jésus,
pour moi, c'est devenu
un peu comme un ami d'enfance
qui tout à coup redébarque, qui a changé,
qui s'incruste chez toi sans demander,
qui t'envoie des sms tout le temps,
et cet ami j'ai l'impression que j'en ai plus besoin maintenant.
Je sais, je sais... écrire ces mots, c'est déjà un blasphème.
Les mots, ça donne la permission
d'être soi-même. De l'être complètement.
Le monde est presque en paix
quand on cesse d'essayer
de le comprendre.
Je sais juste qu'apprendre à croire à la puissance de mes propres mots, ça a été l'expérience la plus libératrice de mon existence. C'est celle qui m'a apporté le plus de lumière. Et ce ne serait pas ça un poème ? Une lumière dans le noir.