Chaque société, selon les époques, obéit à un ensemble de normes particulières et à sa propre vision de ce qu’est une vie bonne. On appelle « morale » cet ensemble de normes et cette vision. Dans l’Antiquité, l’enfant grec apprenait dès son enfance qu’il n’y avait rien de plus beau ni de plus désirable que de participer en citoyen à la direction de sa cité et, le cas échéant, de mourir pour elle au combat.
Les transgressions de demain, induites par la grande convergence NBIC, passeront dans les mœurs de la même manière : par l’émotion. Qui n’a pas vu un homme politique, après un drame particulièrement choquant, plaider par médias interposés pour que telle loi soit adoptée dans les plus brefs délais ? Un chien tue un bébé ? On fait d’urgence une loi sur les chiens méchants. Un manège de foire tombe ? On bouleverse le calendrier législatif pour voter une loi sur les manèges, quand bien même la réglementation est déjà drastique et l’accident imprévisible.
Les ordinateurs vont devenir intelligents et passer graduellement de nos bureaux à nos cerveaux. Le phénomène est d’une logique implacable. Nous avons par nature envie de tout contrôler, de notre naissance à notre mort. La technologie et les sciences vont nous permettre d’assouvir de mieux en mieux ce besoin.
Transgresser, repousser les limites, refuser la stagnation, est le propre de l’Homme depuis la nuit des temps. L’Homme a peu à peu domestiqué la nature et les animaux. Il en fait autant à présent de sa propre destinée.
Le débat a son importance, bien sûr, mais le « sens de l’Histoire » est bien celui d’une inéluctable acceptation des pratiques que le progrès rend possibles et que l’émotion rend « nécessaires ».
la transformation du vivant semblera de plus en plus légitime dans une société où la lutte contre nos faiblesses biologiques et nos souffrances sera prioritaire aux yeux de l’opinion. Les citoyens penseront que les technologies NBIC sont moralement acceptables, parce qu’elles permettent de dépasser nos limites et de réduire les blessures de la vie.