Oeuvres complètes

Le peintre qui peint là n'a pas de maitre :
c'est lui le maitre, et de lui prend leçon
la nature qui forme oiseaux et nids.

Que cet avis comme plomb aux semelles
marcher te fasse à pas lents d'homme las
vers le oui et le non que tu vois mal ;
car cil est bien à bas parmi les sots
qui sans distincte vue affirme et nie,
soit qu'il faille avancer soit faire volte.
Souventes fois l'opinion hâtive
se laisse dévoyer par fausses traces ;
l'affection lie alors le juger.

Quand par vive plaisance ou par douleur
dont soit comblée telle de nos vertus,
l'âme s'y coule et s'y ramasse à plein,
tous les autres pouvoirs semblent dormir :
et ceci contredit l'erreur qui cuide qu'une âme en nous sur une autre s'allume.

D’où peut venir à l'esprit connaissance
de ces primes données, nul ne le sait,
ni sa tendresse aux premiers appétibles,
mise en vous seuls comme goût en abeille
de faire miel ; et cette prime envie ne mérite louange en soi, ni blâme.

Et de même celui qui d'un père de quelque sien aïeul bonnes gens a pris descendance et est mauvais homme, non seulement est vil, mais très vil et digne de toute moquerie et honte plus qu'aucun autre vilain.

À propos de quoi il faut noter que c'est moult périlleuse négligence, de laisser la mauvaise opinion prendre pied, car de même que l'herbe foisonne dans le champ non entretenu de culture, et monte haut et couvre l'épi du froment, en sorte que de biais regardant le froment n'apparaît pas, et finalement se perd le fruit: de même dans l'esprit la mauvaise opinion non châtiée et corrigée s'accroît et foisonne, de telle façon que les épis de la raison, c'est-à-dire la vraie opinion, se cachent, et comme ensevelis se perdent.

et tous ceux de cette espèce sont les abominables méchants d'Italie qui tiennent pour vil ce précieux vulgaire, lequel s'il est vil en quelque chose ne l'est qu'en ceci, qu'il sonne dans la pute bouche de ces adultères ; sous la conduite desquels vont les aveugles que j'ai cités au premier chef d'accusation.

Je ne puis donc rien dire de l'instant
où je la contemplai, sinon ceci:
de tout autre désir mon coeur fût libre
aussi longtemps que l'éternel Plaisir,
rayonnant droit en elle, me combla
de son reflet venant de son beau visage.
En me vainquant par l'éclat d'un sourire,
elle me dit: "Détourne-toi; écoute;
le paradis n'est pas tout en mes yeux."

Et le bon maître commença : " Regarde
celui qui tient une épée à la main
et vient devant les autres comme un prince :
Tu vois le souverain poète Homère ;
après lui vient Horace, satiriste,
puis Ovide en troisième, enfin Lucain."

Qu'Amour vous recommande
mon coeur servant, puisqu'il vous l'a donné
et qu'en regard Merci
de moi vous porte un brin la souvenance ;
car de votre valeur
avant que je me sois guère éloigné,
jà m'emplit et conforte
du revenir la souëve espérance.
Dieu, comme je ferais brève demeure
si je suivais mon gré !
car souvent la mémoire
me revire à chercher votre semblance.
Adonc en mon partir et séjourner,
ma gente dame, à vous je m'accommande.