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Critique de Fabinou7


L'écrivain danois Hans Christian Andersen est mondialement connu. Ce conteur du XIXème siècle est une source d'inspiration pour les blockbusters des studios Disney, de la Reine des Neiges à La Petite Sirène.

“Une sirène n'a point de larmes, et son coeur en souffre davantage”

Mais son oeuvre est bien moins féérique que les happy endings des films pour enfants… prenons La Petite Sirène par exemple, un conte bien plus dur, bien plus cruel que la production de Walt Disney qui finit bien et que nous avons tous en tête. Pour comprendre ce conte il faut se tourner vers la biographie d'Andersen : homosexuel malheureux, amoureux éconduit qui désespérément voulait, lui aussi être un autre, renoncer à ses écailles, sa queue de poisson (sans jeu de mots…) pour qu'enfin Edvard Collins, l'homme dont il est épris pose un regard sensuel sur lui. C'est presque une parabole transgenre, Andersen avouant courageusement dans leur correspondance sa “nature féminine”. le refoulement, l'absence de vie sentimentale épanouie et le malaise d'une transidentité impossible à franchir sont donc à l'origine de ce pacte funeste.

“— Mais si tu prends ma voix, demanda la petite sirène, que me restera-t-il ? — Ta charmante figure, répondit la sorcière, ta marche légère et gracieuse, et tes yeux expressifs : cela suffit pour entortiller le coeur d'un homme. Allons !”

Les contes d'Andersen sont d'une très douce mélancolie ; on pense à l'histoire d'amour confinée de la Bergère et du Ramoneur (qui inspira le très beau dessin-animé “Le Roi et L'Oiseau” avec la poésie du scénario de Jacques Prévert), du funeste courage du Petit Soldat de Plomb ou encore les pérégrinations de la Petite Poucette qui rappellent la dure condition des femmes de l'époque, le chant du Rossignol pour l'Empereur de Chine sur la cupidité humaine, Les Fleurs tragiques de la Petite Ida, et les malheurs du Vilain Petit Canard risée de tous car différent, minoritaire, concluant à son sujet : “Il n'y a pas de mal à être né dans une basse-cour lorsqu'on sort d'un oeuf de cygne.”

“— Vous avez là de beaux enfants, la mère, dit le vieux canard au ruban rouge. Ils sont tous gentils, excepté celui-là ; il n'est pas bien venu : je voudrais que vous puissiez le refaire.”

Mais l'écrivain scandinave fait aussi montre d'une malice et d'une drôlerie très appréciables dans “Grand Claus et Petit Claus” ou encore “Les habits neufs de l'Empereur”, critique comique de l'absurdité de l'aveuglement social que nous jouons tous, par crainte de sortir du rang, ce qui donna d'ailleurs une expression idiomatique en anglais “the Emperor's new clothes” pour désigner ce silence autour de l'éléphant au milieu du salon !

Le crève coeur, cri de détresse sociale, qui rapprocha d'ailleurs Charles Dickens et Andersen, tous deux attentifs au sort des plus démunis au XIXe siècle, est bien sûr l'histoire de la Petite Fille aux Allumettes. Tout y est : inégalités, pauvreté, violences intra-familiales, travail des enfants… L'auteur décrit d'une façon poétique et sans pathos le dernier délire d'une gamine des rues entrain de mourir de faim et de froid dans l'égoïste Saint-Sylvestre bourgeoise de Copenhague: “le jour de l'an se leva sur le petit cadavre assis là avec les allumettes, dont un paquet avait été presque tout brûlé”.

Les contes d'Andersen s'adressent aux enfants de 7 à 77 ans, ils sont moins légers que l'on peut le croire, plus drôles aussi parfois, mais toujours savoureux et émouvants.

Joyeuses, chaleureuses fêtes de fin d'année je vous souhaite un trop plein de livres et de bulles (pas nécessairement dans cet ordre-là…) !
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