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Critique de cathcor


le 16 mars 1990: j'entends pour la première fois le nom du diaphane jeune-homme, assis à la droite de Pivot.
En mai 2005: Babelio et les éditions Séguier, que je remercie, m'adressent "Hervé Guibert ou les morsures du destin".
Entre-temps, j'avais acheté deux livres d'Hervé Guibert, lu des articles, mais l'étude de Frédéric Andrau, complète, objective, nuancée, m'a beaucoup enrichie, comme elle enrichira ceux qui ont la volonté de dépasser l'image facile et médiatique de "L'homme au chapeau rouge", qui ne fut pas seulement le provocateur, victime - peu après son maître et ami Michel Foucault - du sida, mais un jeune homme aux talents multiples, passionné de littérature, de photographie et un être complexe et contradictoire.
Il écrivait depuis l'âge de 5 ans, lisait et relisait inlassablement des auteurs comme Knut Hamsun ou Thomas Bernhard, et son imagination foisonnante lui permit de jouer avec talent de ses fantasmes, de savoir lier mort, sexe, sang et beauté.. Son originalité essentielle fut de faire de sa maladie et de sa mort un objet littéraire.
Outre ses activités journalistiques, cinématographiques, il fut un théoricien de la photo et un photographe de talent que l'on découvre enfin. Ses photos se sont voulues l'écho visuel du sida, et furent aussi pour lui un moyen de supporter l'insupportable.
Si Frédéric Andrau met l'accent sur la gentillesse, la générosité, la fidélité d'Hervé Guibert, qualités qui tendent à être occultées par les éléments scandaleux de sa vie, il montre aussi les paradoxes et les contradictions du jeune homme, à la fois pudique et exhibitionniste, refusant les tabous, revendiquant dans son oeuvre une totale transparence et pourtant longtemps dans le déni de sa maladie, vivant le sida à la fois comme une immense angoisse mais aussi comme un moyen de s'ouvrir les portes de la renommée, fasciné en même temps qu'horrifié par la transformation et la dégradation de son corps.
Frédéric Andrau non seulement analyse finement l'oeuvre, mais en met en évidence les thèmes majeurs: érotisme, fantasmes, pornographie, et même pédophilie -ce qui, curieusement, ne fit pas scandale à l'époque - dérision, récurrence des autoportraits, fascination - et ce, bien avant les premières atteintes du sida - pour la mort, cette mort qui rôde en permanence dans ses photos comme dans ses écrits.
Par les éléments biographiques qu'il donne, sans aucun voyeurisme et même avec une immense discrétion, lorsqu'il évoque Christine, l'épouse, ou Thierry, le compagnon, Frédéric Andrau permet de voir plus clair dans cet enchevêtrement de la réalité et de la fiction propre à Hervé Guibert, et pour tout cela, on salue son ouvrage.

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