Mon programme anti-dépression

Nous utilisons en psychothérapie la métaphore du squatteur : imaginez quelqu'un qui s'est invité chez vous sans vous demander votre avis ; il s'est installé sur le canapé de votre salon et vous donne des ordres (« Fais-moi à manger, apporte-moi une bière, cire mes chaussures... »). Si vous lui obéissez, il ne partira jamais, et se dira qu'on est trop bien ici ! En lui désobéissant, vous lui rendrez la vie moins agréable et, peu à peu, il aura envie d'aller voir ailleurs.
Il s'agit de considérer la dépression comme un squatteur, ce qu'elle est d'ailleurs (elle s'est installée sans votre accord !), et de lui désobéir : « Je ne suis pas ma dépression. Ses intérêts ne sont pas les miens. »

Note à l'entourage : ce qu'il ne faut pas dire à une personne dépressive !
- Tu as tout pour être heureuse !!!
- T'es chiant.
- Mais bon sang, arrête !
- Tu vois l'exemple que tu donnes ?
- Prends un verre, ça fait du bien.
- Trouve-toi un boulot.
- Franchement, arrête de te plaindre, y a la guerre en Syrie.
- Sors, vois du monde. Bouge.
- C'est juste une petite déprime.
- C'est dans ta tête, alors t'es pas malade.
- Pitié, essaie de sourire.
- On n'a qu'une vie.
- Les médicaments, c'est de la merde.
- C'est encore pour te faire remarquer, c'est ça ?
- Sors-toi les doigts du cul.
- Ça va passer. Il suffit d'attendre...

Avez-vous pensé aux médicaments ?
Il arrive parfois qu'on soit tellement ancré dans la douleur qu'on ne peut pas avoir la lucidité nécessaire pour réussir à remonter la pente. Ces deux semaines d'exercices ne vous ont pas suffisamment aidé ? Si vous aviez du diabète, vous prendriez de l'insuline sans discuter, et ce ne serait pas un échec. Vous êtes dépressif, il existe des médicaments. Ce n'est pas baisser les bras que d'en prendre, c'est admettre qu'on a besoin d'aide, et c'est combattre la maladie avec les armes adaptées à notre douleur.
C'est une béquille temporaire, souvent salutaire. Et qui peut nous aider à faire les efforts nécessaires.

Deux bonnes nouvelles. La première, c'est que vous allez vous remettre, vous allez guérir : on guérit toujours d'une dépression. Évidemment, le plus tôt est le mieux.
La seconde, c'est que vous pouvez participer à votre guérison, faire en sorte qu'elle survienne plus vite, ou que la dépression soit moins intense. Pour cela, de petits efforts sont utiles, des petits exercices à mettre en place chaque jour, comme ceux proposés par Caroline dans ce livre.

Aggraver notre dépression, même sans le vouloir, nous savons très bien faire cela. C'est la spirale infernale, ou le cercle vicieux de la dépression.
Voilà le scénario : je me sens incapable de faire face à la vie comme d'habitude. Alors je commence à m'affoler et à me critiquer. Ça me déprime et m'angoisse encore plus, donc je me sens encore plus incapable. Comme je ressens aussi une fatigue anormale, j'ai tendance à trop me reposer ; mais plus je me repose, plus je me sens ramolli, fatigué. Etc.
Peu à peu, ces nœuds coulants se mettent en place et m'étouffent. C'est pour cela qu'on dit parfois que la dépression est une maladie « auto-entretenue » : on peut, par maladresse plus que par envie, évidemment, l'entretenir et la faire durer.

Une des façons les plus simples d'être heureux consiste à laisser filer les choses qui vous rendent triste, ces fils du passé qui vous retiennent. Parfois, sans le savoir, vous supportez le poids de problèmes familiaux vieux comme le monde et qui ne vous concernent plus directement. Contentez-vous des vôtres, cela suffit amplement.

Cultiver ses émotions de gratitude, ce n'est pas niaiseux et ne fait pas de vous un ravi de la crèche ! C'est comprendre que presque tout ce qui nous fait du bien nous vient, au moins en partie, d'autrui. On en prend conscience, on le reconnaît et on s'en réjouit.

La dépression fait de nous de grands experts en découragement, démotivation, pessimisme et négativisme. On finit par ne plus s'en apercevoir parce qu'on oublie que c'est la dépression qui parle à notre place, voit le monde à notre place, avec ses yeux. On s'est effacé, on a disparu. Réaffirmons-nous !

Mon meilleur conseil : restez à l'écart des personnes négatives, elles ont un problème pour chaque solution.

Ce carnet est une boîte à outils, une méthode que j'ai élaborée pour cesser de tomber plus bas quand tout va mal et pour remonter la pente, jour après jour. Fondée sur des exercices très simples, elle permet de briser le cercle infernal des ruminations et des pensées négatives automatiques. Mais pour cela, il va falloir que vous participiez, que vous vous munissiez d'un crayon et que vous soyez prêt ou prête à vous laisser guider.