Elle s'appelle Matin, cette jolie librairie dans la lumière. Comme ce matin, où l'homme a aperçu la libraire derrière la vitrine, auréolée de la lumière du soleil, pénétrée par sa lecture. Matin, comme le titre du livre que le héros du roman dans lequel elle est plongée lit dans le train. Matin aussi, comme ce matin il y a dix ans, quand tout a basculé pour elle. Est-ce pour cela que ce livre la touche autant, ou parce qu'il semble être le « roman miroir de la journée la plus horrible de sa vie » ?
L'histoire de cette jolie librairie dans la lumière débute sur cette sensation familière : L'auteur questionne le choix du livre, cette alchimie qui peut nous attirer d'abord, puis nous apporter un peu de réconfort. Il évoque la résonance qu'ont parfois certains livres au point qu'ils pourraient aussi bien parler de nous. La libraire a-t-elle pressenti, en choisissant cet ouvrage d'un auteur inconnu, que ce livre était fait pour elle ? D'où vient ce lien invisible que nous ressentons parfois entre nous et un livre, comme s'il nous était adressé ; Cette « coïncidence » du bon livre au bon moment pour panser nos plaies, poser les bonnes questions, suggérer des réponses qui nous aident. Juste un murmure, un appel discret. A peine une caresse, celle d'un bruissement inaudible.
Mais
Franck Andriat pousse plus loin ce fil conducteur, en intercalant les chapitres de vie de la libraire avec les chapitres en papier de l'héroïne du dernier roman qu'elle a choisi. La plume, le thème, les personnages la troublent : Une rencontre entre deux lecteurs dans un train. le livre cité dans le roman… Cette histoire va-t-elle finir aussi mal que la sienne ? Et puis cette coïncidence des prénoms aussi, comme si elle lisait un livre dont elle serait l'héroïne. Ça vous est déjà arrivé, à vous aussi ? Toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant exis…
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Avec une ambiance douce et feutrée qui sied à toute librairie, quelques phrases bien senties et des personnages tout en sensibilité,
Franck Andriat met en abîme la rencontre entre un livre et son lecteur. Mais il raconte aussi la connexion qui se produit parfois entre un auteur et son lecteur, entre un lecteur et un libraire, et même entre deux lecteurs entre eux ! Certaines tombent ponctuellement au bon moment même si elles ne durent pas ; mais d'autres nous marquent et survivent longtemps en nous. Jusqu'à ne plus savoir où s'arrête la réalité et où commence la fiction…
Comme beaucoup de livres sur les livres/libraires/librairies, il n'échappe pas à certains clichés, mais en même temps c'est un peu ce qu'on vient y chercher. A lire pour l'ambiance plus que pour la surprise donc, même si celui-ci nous offre un petit suspense bien venu grâce à sa construction gigogne, raison pour laquelle je n'en dirai pas plus : sur seulement 140 pages, je vous laisse découvrir l'histoire de cette rencontre, d'un livre comme une bouteille à la mer. Je n'ai pas été aussi séduite que je l'espérais, mais j'ai trouvé intéressante l'idée de la mise en abîme. Car les livres sont comme les trains : une histoire pourrait bien en cacher une autre…
« J'ai pour la première fois l'impression que mon livre vit parce qu'il a permis de créer un lien »