Mais la nuit, la terreur envahissait les rues. Des dizaines de fourgons cellulaires émergeaient du portail de fer de la Loubianka et partaient en mission. A leur vue, le Moscovite ne manquait pas de détourner les yeux, comme tout homme qui chasse la pensée d’une mort inévitable. Mon Dieu, pourvu que ce ne soit pas pour moi, pas pour les miens, voilà, Dieu merci, ils sont passés. Où il y avait lieu, à l’adresse figurant sur le mandat, les fourgons s’arrêtaient et les hommes de la Tchéka pénétraient sans hâte dans les maisons. Le bruit de leurs bottes dans l’escalier ou celui de l’ascenseur montant en pleine nuit étaient devenues le fond ordinaire des terreurs moscovites.
"Au nom de l'union des Républiques Socialistes Soviétiques pour crimes commis contre le peuple soviétique... à la peine de mort par pendaison... sans droit au recours en grâce..." On passait le noeud coulant au cou du coupable, après quoi le camion --un véhicule tous usages, vraiment -- repartait en marche avant et le supplicié chutait, exécutait sa dernière danse accompagnée, comme l'affirment les experts, des visions érotiques les plus voluptueuses.
Joseph n'a qu'un égal au monde : Adolf. Le xx° siècle fleurit sous deux formes admirables du socialisme : celui de classe et celui de race.