À la recherche d'autres rivages…
Décembre 2018
Ulysse, un financier converti en gardien de phare.
Seul Ulysse savait : il était libre et ce phare, perché dans la solitude de ce point reculé, à l'ouest de la Méditerranée, était la fenêtre ouverte sur la liberté d'une vie choisie loin de tout faux-semblant ou diktat.
La liberté de pouvoir vivre pleinement sa seule et unique passion : l'Écriture.
Il avait été mis en garde quant aux effets potentiels d'une solitude prolongée. Il savait que parfois, les cieux se troublent et retiennent prisonnier un goéland dont le rire égaré résonne, silencieux. Et dans ce silence ombrageux, le mot, écho d'antan se fige, victime malgré lui des tourbillons de l'existence.
Deux ans déjà.
Deux ans ici dans ce phare de Gibraltar, isolé entre deux continents.
Depuis son perchoir dominant la mer, à l'abri des vents et frôlant presque les cieux, seules les notes d'Automne de Vivaldi emplissaient ces lieux d'un autre âge lorsqu'un bruit fracassant l'arracha malgré lui à sa jouissance extatique.
Sursautant, bousculant par mégarde sa tasse de thé dont le liquide, noirâtre, dévora les feuilles de son carnet, diluant son écriture nerveuse et en recouvrant les mots. Ses mots, désespérément noyés, suffoquaient dans les flots sombres dont les arômes entêtants, l'écoeuraient désormais.
Ulysse se précipita vers la lucarne et …
Un voilier gisait là, semblable à une plume blanche se mouvant vertigineusement à la surface de l'eau.
Lui, le financier converti en gardien de phare, l'écrivain dont le manuscrit s'était noyé, victime d'un bruit, d'un signe de vie, se lançait, s'élançait à l'aventure.
Dans les flots, une voix fluette…
Des pleurs qui disaient, dans une langue universelle, la douleur, la perte et l'angoisse. Et qui vinrent à bout d'Ulysse, mettant en lambeaux sa sérénité apparente.Je suis Maïmouna.
Je suis sénoufo et malienne.
J'ai treize ans.
J'ai quatre frères et trois soeurs.
Et je suis montée sur le bateau,
il y a longtemps, je crois.
Un jour, je ne sais pas quel jour,
je suis montée sur le bateau car Ma m'a dit, monte.
La France ;
le Djinn aux cheveux longs couleur de blé t'attend…
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