- Vous savez, Jamal, ça ne sert à rien de trop regarder en arrière, d’essayer d’attraper le brouillard du passé. Ça fait plus de mal qu’autre chose, et je sais de quoi je parle...
Quand je tiens compagnie aux livres, je ne m’ennuie jamais. Un jour, Spencer m’a donné un exemplaire corné de Tom Sawyer, et m’a dit qu’ »il n’y a rien de plus triste qu’un livre qu’on oublie. Un bouquin, à chaque fois qu’on le lit, on lui redonne un peu de vie ».
Le monde est ce que tu en fais. Ce que tu veux bien y voir et y chercher.
Elle est là, dès que je ferme les yeux. Son corps recouvert de boue, ses vêtements déchirés. Sa bouche ouverte sur un gouffre noir .
Elle est là.
"Le scandale Stilth"... C'est ainsi, désormais, qu'on parle de mon enquête. Personne, sans surprise, n'a repris le titre de mon article : "L'affaire Clara Miller". Dans les affaires criminelles; dès que l'on parle de meurtre, de viol ou de violence, c'est systématiquement le bourreau qui est à l'honneur. Ca m'a toujours gêné... Car c'est leur offrir bien trop de visibilité, une forme de glorification malsaine. C'est aussi occulter l'horreur de leurs actes. On devrait, au contraire, taire le nom des tortionnaires, les oublier, les effacer pour se rappeler uniquement les noms de celles et ceux qui ont souffert...
Mais pour qui se prennent-ils, ces imbéciles ?
L’interview du Globe vient de paraître, malgré nos menaces. J’appelle Claire, mon assistante.
— Il ne faut surtout pas que Mike apprenne que le magazine est sorti. Appelle miss Berkley de ma part, à Lost Lakes, et demande-lui si le coursier a déjà livré les journaux pour la revue de presse de Mike. Si ce n’est pas le cas, dis à l’intendante de récupérer le numéro du Globe et de le mettre de côté. Et surtout, répète-lui bien qu’il ne faut pas que Mike tombe dessus.
— OK. Je m’en occupe de suite.
Kelton a donc pris le risque de sortir le magazine. Il doit vraiment espérer en vendre un bon paquet.
Dans les grands récits d'aventures, le héros n'hésite jamais. Il va de l'avant. Mais dans la vraie vie, c'est un peu plus compliqué...
Noah n'est jamais rentré dans le moule. Il était en décalage. On ne savait jamais à quoi s'attendre avec lui. Et moi, j'ai toujours aimé ça. C'est ce qui le rend unique.
Parce qu'elle ne rentrait pas dans la norme, parce qu'elle leur faisait peur, ses proches ont fa d'elle une paria.
Et si on vivait, maintenant qu'on est morts ?