J'ai retrouvé dans "
Eugénie Grandet" les longues descriptions méthodiques et les interminables énumérations des objets, costumes et décors de l'action comme dans "
Le père Goriot". A la manière d'une caméra qui avance vers le lieu central de l'action et nous montre le cadre,
Eugénie Grandet débute exactement comme "
Le père Goriot". On a l'impression qu'
Honoré de Balzac reprend une recette qui fonctionne. L'habillage change, la structure reste. On passe de la pension parisienne où loge Monsieur Goriot à la demeure provinciale des Grandet. Mais la dernière partie du roman change brusquement de rythme. Celui-ci s'accélère.
Balzac insère de nombreuses ellipses et on s'aperçoit que les descriptions initiales n'ont plus lieu d'être puisque l'action reste fidèle au même endroit et aux mêmes personnages, la ville de Saumur, les Cruchot et les de Grassins. Tout a été dit dans la première partie du roman et
Balzac n'y revient plus. du coup, la pénibilité de lecture que le lecteur a en mémoire se transforme, après coup, en un plaisir masochiste de souffrance rédemptrice.
J'ai donc pris un réel plaisir de lecture à travers cette oeuvre balzacienne, du fait, notamment, de son intérêt sociologique et historique. Il est passionnant de voir et découvrir la vie de sociétés et micro-sociétés au début du XIXe siècle. Cela donne envie de visiter Saumur et sa région pour tenter d'y sentir cette mélancolie qui enveloppe la totalité du paysage local : personnages, mobiliers et immobiliers, éléments naturels et artificiels. Ce tableau historique est une sorte de témoignage des transformations subies par l'Europe occidentale des débuts de la révolution industrielle.