- Encore un meurtre, constata son père d'un ton préoccupé. Ils ont recommencé. On a retrouvé ce pauvre hère entièrement vidé de son sang. Hallucinant... Quelque chose m'échappe !
Il paraissait perplexe.
- Qu'en dis-tu ? demanda sa fille d'un ton inexpressif.
- Que c'est mauvais pour le commerce !
Le temps, ça vous file entre les doigts. Le temps ça vous vole en douce un peu de vos espoirs, de vos passions, de vos souvenirs. Quant à votre corps, votre force, ils déclinent lentement comme la flamme chancelante des chandelles au bout de la nuit… Le temps, ça réduit de plus en plus le champ des possibles avant de vous clouer un jour dans un fauteuil au coin du feu, plus bon qu'à manger sa soupe en se tachant. On se sent volé de sa jeunesse comme si un roué aubergiste venait de vous arracher des mains un plat que vous commenciez à peine de goûter et d'apprécier.
- Non, je n'ai plus l'âge pour ces folies. Mon vieux cœur a suffisamment palpité dans ma vie. Il est temps qu'il s'arrête. La sérénité...
- La sérénité n'est jamais qu'un autre mot pour désigner la mort, rétorqua Violetta. On ne voit bien qu'avec le cœur, la raison voile le regard !
A Venise, ville des songes et création de l'impossible, on gardait toujours l'impression que ciel et eau se trouvaient à portée de main.
Au jour qui se lève, son esprit tortueux préférait le coucher du soleil, les soirs qui étalent leurs ombres, le rythme paisible des heures nocturnes quand le monde se livre au sommeil.
Le pouvoir en place n’apprécie pas les gens qui réfléchissent. Réfléchir, c'est commencer à désobéir !
Il n'y a qu'à Venise où les pigeons vont à pied et où l'on met des ailes sur le dos des lions ! maugréa le moine en traversant un flot de volatiles qui ne daigna même pas lui ouvrir un passage.
Réfléchir, c'est commencer à désobéir. (p 69 Editions Actes Sud, coll. "Actes noirs")
Fan inconditionnelle de cet auteur et particulièrement de cette saga il est difficile de faire un commentaire "neutre".
Je dirais simplement qu'encore une fois M. Barde-Cabuçon fait preuve de son grand talent d'auteur en nous transportant dans un univers ou rien n'est tel qu'il n'y parait. Chacun porte un masque. Chacun cache quelques chose. Chacun joue sa partition sans se soucier des fausses notes.
Que dire du décor ?
En résumé: wow !
- (...) comme je traîne une mauvaise réputation auprès du Conseil des Dix...
- C'est vrai que tu t'étais permis de les insulter il y a quelques années, ce qui t'avait valu le cachot.
- Je les avais juste traités de babouins. Si je dois m'excuser, c'est seulement auprès des singes !