C’est l’une des histoires les plus savoureuses du XIXe siècle : le collectionneur Charles Ephrussi acheta à Manet sa nature morte « Une botte d’asperges » pour mille francs au lieu des huit cents prévus. Devant ce généreux écart, l’artiste peint un légume isolé sur un petit format, et lui adresse le tableau avec le mot suivant : « Il en manquait une à votre botte ». Le détail est devenu, à la faveur d’une anecdote pleine de sel, une œuvre à part entière. Et l’esthétique de la fraction, de la fragmentation, va devenir au XIXe et XXe siècles, une ligne de force majeure de l’histoire de l’art.
« Entrer dans le détail » est un exercice jouissif et constructif, où l’on a le sentiment qu’un monde nouveau se niche dans le moindre recoin, où l’on savoure la beauté de ce qui semble à première vue anodin, où l’on fait en somme l’expérience permanente de la surprise…