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Citations sur La bête faramineuse (8)

Nous avions vu croître à quelques pas de nous et si haut qu’à la fin elle nous cachait le ciel la créature à la gueule déchirante. J’avais dû vaincre le froid intense, l’épouvante dont je gardais le goût aigrelet dans la bouche, me dresser contre l’arbre de fonte, porter la main gauche en avant, l’index tendu, en guise de canon, lever la droite sous le menton, l’index replié sur l’invisible détente. Puis j’avais crié de toutes mes forces pour rendre la balle aussi pointue et rapide que je pouvais, afin qu’elle atteigne sous l’épaisse toison fauve le cœur sauvage.
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C’est au pied de l’escalier, au bout du corridor, que j’ai entendu la voix de maman. Je dis de maman parce que nous la reconnaîtrions toujours, quelque altérée qu’elle soit, de si loin qu’elle nous parvienne, malgré le fracas de l’ouragan, de la bataille ou de la fin du monde et parce que je la voyais, maman, par la porte entrebâillée, agenouillée aux pieds de grand-père qui, lui, dans le fauteuil, nous faisait face, nous voyait, aurait dû nous voir rassemblant notre courage devant la première marche. Mais nous étions encore diaphanes, transparents au regard vide que j’avais croisé. Le chuchotement liquide, la voix de petite fille – de maman – nous parvenait toujours par la porte entrouverte du bureau. C’est la troisième marche qui nous a trahis. Le filet clair s’est brisé.
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Nous nous sommes enfermés dans la chambre bleue. J’ai ouvert le bocal. Les sphinx ont jailli vers la lumière mais nous les avons repris l’un après l’autre, sans difficulté, dans les plis du rideau. Michel les a transpercés tous les deux et piqués au fond du carton. Ils vrombissaient toujours, immobiles, flamboyants, autour de l’épingle. Nous pouvions effleurer du doigt leur petit toupet d’oiseau, la substance ductile et plumeuse du temps. Mais un remords se mêlait à notre joie secrète et nous évitions de trop nous regarder.
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Nous savions bien qu’elle ne dirait pas non, qu’elle ne pourrait pas nous empêcher de replonger dans l’eau bleutée du soir, à la porte ouverte, où elle avait laissé la grande valise noire et le carton à chapeau pour saluer grand-père, l’ombre indécise dans la pénombre du vestibule.
(Incipit)
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J'ai progressé malgré la houle. Quand une lame de fond s'enflait pour me renverser, je m'appuyais au mur que je ne voyais pas. Je me suis cogné à l'huisserie de la porte de la salle de bains, pas très fort parce que je n'allais pas très vite. Mais en même temps que l'air nocturne, le parquet, j'avais subi (le dedans) de profondes métamorphoses. J'étais fait soudain d'une chair translucide, d'une sorte de gelée où le moindre contact avec le dehors éveillait des trains d'ondes cruelles et lentes. J'ai attendu que les vagues s'espacent un peu. L'eau rendrait à ma chair une consistance suffisamment ferme pour que je puisse me frotter au monde, m'y mouvoir, le changer au moyen de lourds outils de fer. J'ai touché le froid de la faïence, de l'acier nickelé.
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Je lui ai demandé s’il avait pensé à se tuer. Il a dit que oui. À la fin du printemps- parce que c’est toujours la même attente crédule, la même grâce miraculeuse – et ensuite après nous avoir revus, tous.
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On s’enfoncerait lentement, avec effort, à travers l’épaisse litière jusqu’à ce que personne ne puisse s’imaginer que nous étions là, sur l’écorce terrestre en ce point minuscule, invisible sur la carte, sans repère, accident, signe distinctif.
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Je ne veux pas parler des lions que je n’ai jamais vus, mais de la chaleur, de la fatigue, de l’incommodité , quand on ne dispose pas immédiatement d’un lit pour dormir, de l’eau qu’on pourrait boire, des choses ou des personnes qui nous rendent la vie plus facile en nous épargnant d’avoir affaire trop souvent ou trop directement à nous-mêmes.
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