AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de fbalestas


Voilà un roman bien mené et bien écrit à propos d'une histoire qui n'est pas banale. Madeleine est une femme qui habite Roquebrune-Cap Martin dans l'arrière pays niçois. Elle se rend à l'enterrement de sa voisine qui lui évoque la disparition de sa grand-mère Jeanne. Ecoutant en même temps d'une oreille la radio, elle entend le nom de son village prononcé par un journaliste parisien, qui évoque les derniers jours du poète irlandais Yeats, qui a passé la dernière partie de sa vie dans le village de Madeleine.

Mais le journaliste lève le voile sur un scandale potentiel : « En 1939, Yeats est inhumé au vieux cimetière de Roquebrune-Cap-Martin en attendant de pouvoir rejoindre son pays natal. Seulement voilà, le début de la Deuxième Guerre mondiale rend le transfert impossible. Finalement, en 1948, l'Irlande demande que le corps du poète lui soit enfin restitué. Problème, il a été jeté dans la fosse commune. Impossible dès lors d'identifier ses restes mortels parmi ceux des autres défunts de la fosse. Les documents retrouvés révèlent aujourd'hui un imbroglio diplomatique de taille. On se demande bien qui est enterré en Irlande, au cimetière de Drumcliff, dans la tombe sur laquelle se penchent, chaque année, des admirateurs de poésie du monde entier. Yeats est-il resté à Roquebrune dans le cimetière marin de Saint-Pancrace ? Pour l'heure, aucune enquête n'est encore en cours …. »

C'est le début d'une quête que Madeleine va mener. Elle se sent en effet directement concernée puisque cette fosse commune est aussi celle qui a accueilli les ossements d'un membre de sa famille – et ce sera l'émergence d'un secret familial jusque là bien gardé. Et elle réussit aussi à fédérer d'autres villageois, choqués comme elle de ne pas savoir ce qui s'est passé avec les ossements du grand poète et parvient à les embarquer dans une enquête quasi policière, jusqu'en Irlande où elle trouvera une partie des réponses aux questions qui la taraudent.

J'ai consulté Wikipédia pour savoir ce qu'il en était de cette histoire. J'y ai lu la phrase suivante : « W. B. Yeats meurt à Roquebrune-Cap-Martin le 28 janvier 1939. Il est tout d'abord enterré dans le cimetière du village, avant que ses restes soient transportés en 1948 dans le cimetière de l'église protestante de Drumcliff, dans le comté de Sligo en Irlande... » Mais en est-on bien sûr ?

Maylis Besserie réussit le tour de force à nous passionner à partir d'un récit qui parle de cimetières, fantômes, thanatopracteurs, médecins légistes, autopsies et autres joyeusetés du même registre. On y apprend plein de choses !

Mais ce récit ne serait pas complet si l'autrice ne donnait pas également la parole au grand poète. On suit l'histoire amoureuse de Yeats pour Maud, une jeune héritière de vingt-trois ans qui commençait alors à se consacrer au mouvement nationaliste irlandais, objet d'une passion immodérée du poète pour sa beauté et ses manières franches, influence qui aura un effet déterminant et durable sur sa poésie et sa vie à venir. On apprendra qu'il aura tenté de lui proposer une vie commune – en vain. Mais le grand poète aura d'autres amours plus tard …dispersées, peut-être.

Elle réussit surtout à donner la parole aux muses poétiques qui parlent à l'oreille de William Butler Yeats avec des passages oniriques et poétiques très réussis – on sent que l'autrice connaît son sujet, et qu'elle a baigné dans la poésie du prix Nobel de littérature profondément vénéré en Irlande et c'est très enthousiasmant à lire.

Je n'avais pas lu le premier roman de Maylis Besserie, « le tiers temps », qui lui a valu le Goncourt du premier roman, mais elle parvient à nous intéresser à un fait divers prétexte à découvrir le poète irlandais : pour moi ce fut l'occasion de dépoussiérer un recueil de 45 poèmes traduits par Yves Bonnefoy de ma bibliothèque et ce n'est pas le moindre de ses mérites.
Commenter  J’apprécie          389



Ont apprécié cette critique (35)voir plus




{* *}