je me noie dans mes larmes
je m’étouffe dans mon chagrin
je n’ai même plus de mots
plus rien ne vient
j’ai juste mal
pardon pour tout cela
il y a des blessures
dans mon corps
qui ne guérissent pas
et il y a des lésions
dans ma tête aussi
qui ne s'en vont pas
non plus
ce n'est pas grave
le temps fait bien les choses
mais aujourd'hui je ne sais plus
si elles partiront
un jour
…j’ai fondu en larmes en lui répondant
que mon art était tout ce que j'avais
la seule et unique chose que j'étais
et que si l'on venait à me l’ôter
il ne me resterait rien
de nouveau on me somme
de ne rien lâcher.
on me demande de tenir
et d’encaisser les coups
toujours.
mais à quel moment
m’autorisera-t-on enfin
à laisser tomber ?
à quel niveau de douleur
de détresse
et d’atrocité
dois-je donc en arriver
pour gagner le droit de
craquer, m’effondrer, et
tout abandonner ?
redevenir
juste un instant
l’enfant qui respirait
le parfum
dans le cou
de sa mère
on nous parle si peu
de la douleur de la rupture
lorsqu’elle n’est pas amoureuse
on ne nous en parle pas
on ne nous y prépare pas
à ces amitiés qui s’étiolent
à celles qui s’envolent
ou encore de ces personnes
qui arrachent un bout de nos cœurs
en quittant nos vies sans prévenir
on nous parle sans cesse
de l’amour amoureux
des papillons, de la chute
mais jamais de toutes ces autres formes
puissantes et destructrices
qu’il peut prendre aussi
mes plus grosses peines d’amour
n’ont jamais été amoureuses
tout
absolument tout
était légitime
j’avais le droit
d’avoir mal
de vouloir tout arrêter
d’avoir besoin de temps
de douter
de pleurer
de crier
j’en avais le droit
et maintenant
j’ai le droit aussi
de lâcher prise
je me suis assez battue
pour moi
et contre moi aussi
surtout
j’ai parfois l’impression
que la santé mentale est une course
à qui aura le plus mal
qui verra le plus de spécialistes
et obtiendra le plus de diagnostics
et moi je suis là, en larmes
avec mes mécanisme psychiques déjà toxiques
à me persuader que la légitimité de la souffrance
se mesure au nombre de comprimés
qu’on avale pour supporter la vie
et parfois je voudrais hurler à mon cerveau détraqué
que je suis tout aussi légitime
que je n’ai pas besoin de plus
et que me faire du mal
ne m’apportera pas davantage
peut-être que la fatigue
c’est juste ce moment où
tout se déconnecte
où plus rien n’est clair
les larmes coulent seules
les raisons sont floues
surgissent et s’effacent
rien n’a vraiment de sens
mais les nerfs lâchent
et tout disjoncte
j’ai envie de m’adresser à toi, parfois
mais c’est difficile
de savoir comment te nommer
hypersensibilité
anxiété
dépression
ou tout cela et plus encore
à la fois
[…]