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Citations sur Journal, tome 1 : 1892-1907 (14)

8 août 1906
Je prends contact avec la laideur moderne. L'aimable docteur Joseph Termier, frère de Pierre, a une automobile pour les besoins de son art. Il me propose une petite excursion et j'y consens, par curiosité, à la condition qu'on ne fera pas de vitesse. Cette expérience me suffit. je comprends l'espèce de jouissance physique procurée par la trépidation et la translation rapide ; mais il y a de la vilenie, comme dans toutes les choses modernes, et la laideur surabonde. On sait l'abus atroce de cette hideuse et homicide machine, destructive des intelligences autant que des corps, qui fait nos délicieuses routes de France aussi dangereuses que les quais de l'enfer et qu'on ne pourra jamais suffisamment exécrer.
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Réponse à un imbécile, dictée à un secrétaire bénévole :
… Léon Bloy, heureux d’apprendre qu’il est votre « confrère », s’afflige néanmoins de voir que vous ne l’avez pas lu. Le Désespéré et Léon Bloy devant les Cochons disent complètement ce qu’il pense du duel. Il me charge de répondre selon sa conviction très ancienne et très fortifiée, à vos deux questions :
1° Le duel est une ânerie inventée par des malfaiteurs ;
2° Dans les questions d’honneur, il n’y a de vrai et de décisif que les coups de pied dans le cul.
Recevez l’assurance de mes sentiments confraternels.
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Reçu un numéro de septembre 98 de l'Humanité nouvelle, revue évidemment littéraire, où un monsieur proclame ceci :
"Dieu seul est épargné par Léon Bloy (!) ; son âme, pour un court instant dégorgée de pus, s'aromatise de louanges vers Celui qui créa le morpion, l'hyène, la vipère, la mouche charbonneuse, le crapaud, le vautour, la punaise et l'acarus de la gale et qui sut, un jour, les réunir en un seul être pour l'édification des catholiques et la gloire des lettres françaises."
J'ai copié la phrase parce qu'elle me pénètre de consolation et me semble plus honorable que cinquante brochures apologétiques. Le Mendiant Ingrat fut l'occasion de ce suffrage.
Envoyé à un pauvre habitant de Paris une autorisation de mendier pour moi ainsi libellée : "Vivant à cinq cent lieues de Paris, privé de tout moyen d'existence et menacé de périr, j'autorise mon ami dévoué L. D. à mendier pour moi." Suivait une liste de victimes, une dizaine de noms d'individus rêvés exorables.
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Avantage de la laideur sur la beauté. La beauté finit et la laideur ne finit pas.
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Dialogue au seuil de l’église :
– Comment se fait-il, madame Bloy, dit une mercière, qu’on ne vous voit jamais parer les autels, comme font toutes ces dames ?
– C’est parce que je ne suis pas digne.
– Comment pouvez-vous dire cela ? Vous, une personne si pieuse, qu’on voit toujours à l’église !
– C’est vous, madame, qui êtes pieuse, puisqu’on ne vous y rencontre que le dimanche, ce qui prouve que vous n’avez besoin de Dieu qu’une fois par semaine. Mais nous autres qui en avons besoin tous les jours, nous sommes évidemment de la canaille.
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A propos des lieux communs dont je veux un jour élaborer l'Exégèse, je dis à de Groux que telle parole banale, éternellement ressassée par les imbéciles, est une affirmation prodigieuse de leur néant, et que, par conséquent, elle est divine.
(Le mendiant ingrat)
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Appris une curieuse monstruosité. Il y a des femmes qui se font endormir pour échapper aux douleurs de l'enfantement. Cela me rappelle la grande dame du XVIIIe siècle, qui se soûla pour mourir. Mais cette nouveauté est peut-être plus démoniaque
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2.- Dimanche de Pâques. Allant à l'église, entendu le carillon infâme du temple. Rien ne peut être imaginé de plus odieux, de plus intolérable que cette chaudronnerie d'enfer qui suffit aux protestants. Il y a là, m'a dit notre curé, une pauvre vieille cloche catholique âgée de quatre cents ans qui pleure d'entendre les autres.
Nous avons découvert qu'une masse de petits gâteaux danois faits ici, cette semaine sainte, en vue de Pâques, a disparu complètement. Ils ont été mangés, sans doute, par une jeune fille assez agréable à voir qui a passé chez nous trois jours. La gourmandise soutenue par une faculté remarquable de s’empiffrer est une chose très scandinave. Mais plus scandinave et plus protestant encore paraît être le désir des vierges de se faire tripoter par les messieurs. J'ai cru démêler ça chez cette jeune personne, parfaitement élevée d'ailleurs.
Dans L'Aurore venue ce matin (de vendredi, 31 mars), lu article d'Urbain Gohier qui "entreprend de refaire un peuple". La lecture de ce républicain merdeux produit en moi quelque chose d'apocalyptique. Faut-il que la France soit châtiée, quasi maudite, pour que de tels couillons surgissent !

(Avril 1899)
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A un bienfaiteur ingrat :
Je ne vous ai jamais dit qu'il ne fallait pas vous plaindre. Moi-même je me plains souvent. Je vous ai reproché surtout et même exclusivement, je crois, le mystère dont votre amitié s'enveloppait. Relisez-moi. En général, je trouve cela peu digne d'un homme et, dans la circonstance, j'y ai vu un enfantillage mauvais, désolant. Votre lettre veut être profondément humble, mais elle est saturée d'amertume, et je devine que vous avez lutté beaucoup pour obtenir la grâce de m'écrire, sans violence ; violence, je le dis en passant, qui ne m'aurait pas déplu. Ce qui peut me déplaire, c'est de vouloir à toute force que je sois un saint et un prophète et de me parler en conséquence. Alors, comme je tiens de mon origine un sentiment très-vif du ridicule, je ne connais plus d'autre besoin que celui de me défendre avec les armes que Dieu m'a données, et on est sûr d'écoper ferme […]
Rien n'est plus facile que d' «être avec moi». La recette infaillible, c'est d'avoir, je ne dis pas de la bonté, mais de la bonhomie, et de ne pas m'infliger une situation de bonze, que je trouve ridicule, rapetissante, humiliante en vain et qui me fait horreur. Or vous êtes figé dans le respect. Il faut changer cela. Alors seulement nous pourrons marcher ensemble. J'ai soif d'être regardé comme un pauvre homme, très-isolé et plein d'amour. Rien de plus. Vous ne connaissez pas ma faiblesse, ni mon ignorance, ni mon abjection véritable, ni ma tristesse de démon, et vous ne savez rien de la Joie qui est au fond de mon âme.
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oh la la !!!
Pour lui tous les écrivains de Zola à Verlaine & co ne lui arrivent même pas à la cheville!
C'est vraiment trop "drôle" à lire son journal ,regarder le lien que j'ai mis précédemment.
Si vous avez du temps ça vaut 10 !!!
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