Elle avait réussi donner un sens à ma vie en la transformant en un bordel perpétuel.
Ceci est mon histoire vraie, avec des mensonges à l'endroit, à l'envers, parce que la vie cest souvent comme ça.
J'étais donc arrivé à ce moment si particulier où l'on peut encore choisir, ce moment où l'on peut choisir l'avenir de ses sentiments. Je me trouvais désormais au sommet du toboggan, je pouvais toujours décider de redescendre l'échelle, de m'en aller, fuir loin d'elle, prétextant un impératif aussi fallacieux qu'important.
Ou bien je pouvais me laisser porter, enjamber la rampe et me laisser glisser avec cette douce impression de ne plus pouvoir rien décider, de ne plus pouvoir rien arrêter, confier son destin à un chemin que vous n'avez pas dessiné, et pour finir, m'engloutir dans un bac aux sables mouvants, dorés et ouatés. Je voyais bien qu'elle n'avait pas toute sa tête, que ses yeux verts délirants cachaient des failles secrètes, que ses joues enfantines, légèrement rebondies, dissimulaient un passé d'adolescente meurtrie, que cette belle jeune femme, apparemment drôle et épanouie, devait avoir vu sa vie passée bousculée et tabassée. Je m'étais dit que c'était pour ça qu'elle dansait follement, pour oublier ses tourments, tout simplement.
- Roulez plus vite sinon vos mensonges vont nous rattraper! hurlait-elle, debout, les bras levés dans l'automobile décapotée.
——
- Allons-nous marier tout de suite, sinon après nous allons oublier!
— Vous jurez devant tous les anges que vous me suivrez partout, vraiment partout ?
— Oui, partout, vraiment partout!
Allons nous marier tout de suite, sinon après nous allons oublier !
Ma mère vouvoyait également la demoiselle de Numibie, cet oiseau élégant et étonnant qui vivait dans notre appartement, et qui promenait en ondulant son long cou noir, ses houpettes blanches et ses yeux rouge vioent, depuis que mes parents l'avaient ramenée d'un voyage de je ne sais où, de leur vie d'avant. Nous l'appelions "Mademoiselle Superfétatoire", car elle ne servait à rien, sauf à crier très fort sans raison.
Car comme toujours, il savait faire de beaux mensonges par amour.
Elle souhaitait épater son fils une dernière fois, tout simplement.
En voulant tout éteindre, tout arroser, le passage des pompiers avait aussi étouffé le feu de ses yeux.