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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Fantastique, incroyable, quel tour de force littéraire, stylistique, imaginatif, quel coup de gueule romanesque!
De quoi ça parle? D'une société toute entière, et en particulier d'une famille, la famille Brame, une famille typique du pays d'Egalie: madame a un poste à responsabilité, monsieur est père au foyer et dans leurs deux enfants, c'est le jeune garçon qu'on incite à avoir un comportement correct et à ne pas traîner dehors tard le soir, car des bandes de femmes avinées pourraient abuser de lui.
Tout est retourné ici, à commencer par le vocabulaire auquel il est apporté un soin extrême, tout un travail sur les expressions destiné à démontrer la différence de société. Ce sont les hommes qui sont soumis à des diktats impossibles de beauté, il faut être petit, replet, avec la barbe frisée, porter des chaussures inconfortables et se farcir une pilule aux effets secondaires bien mauvais pour la santé quand madame ne veut pas d'enfants....
Et dans cette société, nous suivons plus particulièrement le jeune Petronius, adolescent d'abord puis jeune adulte, qui se révolte contre ce monde où le métier de ses rêves est un métier de femmes uniquement, où il est considéré comme de la chair fraîche, où sa mère rabaisse son père qui a dû renoncer à ses rêves....
Bon, je ne vais pas m'étendre, on a tous compris l'idée, ce renversement destiné à démontrer par l'absurde l'horreur du monde patriarcale dans lequel nous vivons, car toutes les horreurs qui ne nous font plus que tiquer, tellement nous en avons hélas l'habitude, frappent encore plus sous le prisme nouveau de cette inversion.
Exceptionnel, heureusement que cela a été enfin traduit!
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Ne vous laissez pas avoir pas les apparents comique et légèreté de la 4e de couverture ! Sous cette suggestion de paysage marin monté en vitrail (merci à David Pearson pour cette belle couverture) se déroule l'histoire cynique et impitoyable d'une satire de notre société sans rien épargner des horreurs faites aux femmes en les appliquant... aux hommes. Tous les outils d'une domination d'un sexe sur l'autre sont déployés en passant par celui des mots : inutile de dire que 1984 est au nombre des inspirations de l'auteure ! On se retrouve ainsi avec un véritable OVNI littéraire entre les mains, traduit avec tout le talent de Jean-Baptiste Coursaud, bien justement récompensé pour son travail dans la transmission de la culture norvégienne en France. Sa plume fait naître des petits bijoux d'inventivité qui s'imbriquent d'eux même dans le jeu de miroir de l'oeuvre.

Celle-ci alterne entre métaphore de notre monde et le conte de sa propre uchronie avec beaucoup d'intelligence, sans jamais que l'un éclipse l'autre. J'ai beaucoup apprécié la dénonciation de la presse et la mise en scène de Petronius, tantôt mauvais fils hystérique (ou plutôt... orchisique ?), tantôt sous le joug d'une mère tyrannique, toujours monté en exception à ne pas suivre.

C'est un livre écrit tout en finesse. Et effroyablement exact dans son portrait de l'absurde. Ce qui me pose un dilemme face au travail éditorial : la 4e de couverture est l'un des synopsis les plus mensongers jamais lus, de plus, sa manière de souligner le comique trompe beaucoup les attentes et peut prendre au piège un public qui ne souhaite pas lire les agressions à l'encontre du personnage principal, ni l'atmosphère parfois pesante d'éphébophilie. Je me retrouve à avoir conseillé un roman en vérité peu adapté au public que le synopsis attirerait. Mais est-ce que le roman lui-même doit être sanctionné pour autant pour sa justesse parfois trop crue ? En parallèle, l'aurais-je lu si le synopsis avait été plus près du récit ?

De tout coeur je conseille cette curiosité littéraire, mais pas sans poser un panneau "lisez prudemment" à destination des plus sensibles, et un carton rouge pour l'éditeur.
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Egalie est une ville dont le fonctionnement a un petit côté ère victorienne mais où les rôles sont complètement inversés. Les femmes gouvernent et travaillent. Les hommes s'occupent des enfants et préparent le bal des débutants. On découvre le fonctionnement et le quotidien d'Egalie via le regard de Pétronius, un adolescent de 15 ans qui va prendre conscience de son statut d'homme en devenir. Il commence à douter du leitmotiv qu'on leur serine depuis toujours : vous êtes chanceux d'être dans une société si égalitaire. Petronius veut être marine-pêcheuse mais son rôle est déjà décidé, comme tous les garsons, il devra faire des enfants et s'en occuper.
Ce roman commence avec une scène typique de la puberté qui fait jaser toutes les connaissances. Tout le monde fait remarquer à Pétronius qu'il faudrait enfin penser à son 1er soutien-verge, faire attention à l'hygiène, à ses poils et être décent. Passé cette scène frappante qui fait si bien écho à la pression encore subit par les jeunes femmes, le roman se focalise sur le quotidien banal de Pétronius et le début d'une rébellion. Ce train-train inversé permet d'illustrer un panel impressionnant de situations qui casse le mythe de la société égalitaire. du côté des hommes, on découvre par exemple le bal des débutants où les garsons sont traités comme des bouts de viande, les dragues lourdes, les métiers non accessibles « aux plus faibles », les relations toxiques et même les viols conjugaux ou non. du côté des femmes, on retrouve les clubs pour femmes où on joue et boit, les débats politiques orienté en faveur des femmes, le côté prédatrice agissant en toute impunité, le pouvoir de décider ce qui est ouvert ou non aux hommes mais aussi ce qui est décent ou non. Inversé les codes pour mettre en exergue des injustices est un exercice risqué qui demande beaucoup de finesse. L'équilibre trouvé par l'autrice permet un ton très juste sans tomber dans une virulence qui pourrait braquer une partie du lectorat.
Qui dit rôles complètement inversés, dit langage courant lui aussi inversé. Il y a un travail de linguistique, grammaire, conjugaison et dans notre cas de traduction impressionnant par sa finesse. Aucun détail n'a été oublié, le féminin l'emporte, le neutre est un mot féminin, les expressions sont aussi féminisées par exemple courir plusieurs hases au lieu de lièvres. Les noms de lieux et de personnage ne sont pas en reste et souvent lié au corps ou au sexe en générale : mamelon, rut, brame, phallustrie…
Les filles d'Egalie est une satire avec des aspects parodiques. La critique de la société fonctionne car les sujets même d'apparence légère sont traités en allant au fond des choses. Les filles d'Egalie a été publié pour la première fois en 1977 en norvégien. le concept était précurseur et a été régulièrement abordé depuis. Sa traduction tardive peut donner un sentiment de déjà-vu et il semble dommage que ce fait puisse desservir cette oeuvre dont l'ironie et la finesse mérite d'être mis en avant.
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Les filles d'égalité ,Gerd Brantenberg ,édition Zulma ,Z...comme quoi le Z peut être une lettre magnifique lorsqu' elle n'est pas volée par un sombre et triste guignol.
Z comme Zulma ,mais surtout comme Zahra ❤ et Zineb❤Zimbabwe, Zorro ,Zoé, Zen ,Zèbre, Zebulon,Zan,Zumba....bref revenons à nos 🐑 🐑 🐑, 🐑.
J'aurai pu choisir de faire ce post le 8 mars ,journée de la femme ou le 9 mars, le jour de ma fête et accessoirement le jour de l'anniversaire de Pepsi ,mon teckel mort il y plus de 40 ans.
Mais voilà, la journée de la femme c'est tous les jours ,je ne suis pas catholique (ni une sainte )et Pepsi a droit à sa journée rien qu' à lui.
Donc me voilà en train d'essayer de vous parler d'un livre incroyable, drôle, jubilatoire ,fantastique dans le sens extraordinaire et fantastique (car ce n'est pas demain la veille au regard de nos sociétés que cela risque d'arriver!)un vrai miracle d'humour et d'écriture pétillante, intelligente ,vive et inoubliable.
Imaginez une vie où les femmes sont à la place des hommes ,dans la ville ,dans la cité, dans le paysage politique, social ,culturel.
Imaginez qu' elles dirigent le monde et soumettent aux hommes les servitudes de la vie quotidienne, les disctats de la mode ,de la " beauté".
Imaginez qu' elles grondent leurs garçons quand ils se promènent seuls ,un peu tard dans la rue alors que les femmes rôdent.
Imaginez qu' elles ne veulent pas que leur fils fassent un travail de femmes comme marine pêcheuses ...
Imaginez tout ça et rentrez dans cette histoire qui vous fera rire aux larmes(car bien entendu vous imaginerez l' homme de votre vie avec des bigoudis dans la barbe et réclamer des nouveaux papillons à la mode pour se faire beau),vous reflechirez également aux conditions des femmes dans ce monde ,de vos mères, de vos filles ,de vos soeurs ,de vous même.
Et vous aimeriez finalement que les hommes de votre famille ,mari ,fils ,frères, père lisent ce roman ...
Entre rire et réflexions, ce livre est un régal, une cascade de phrases ,de mots percutants .
Alors oui, c' est un livre profondément féministe et ça fait du bien.
Il faut que je retourne à mes taches ménagères avant de passer l' après midi avec la femme de ma vie ,ma fille Zahra ❤ où nous discuterons à bâtons rompus de nos conditions de femmes et de citoyennes dans ce monde qui est tout sauf le monde d' Egalie .
Et nous rêverons d'un monde meilleur pour les générations à venir ,pour les petites filles et les petits garçons d'aujourd'hui d' une société où tous pourront s'épanouir, faire le métier qu'ils souhaitent, vivre en harmonie les unes avec les autres (oui je sais j'ai écrit les unes au lieu des uns ....mais pourquoi ce ne serait pas le féminin qui l'emporterait sur le masculin ?qui porte le monde à bout de bras ,non mais !?)
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Quand les gens deviennent des genres … quand les humains deviennent des fumains… quand « il n'y a pas à avoir peur »devient « elle n'y a pas à avoir peur » …
Quand « il fait chaud » devient « elle fait chaude » …quand « mon dieu » devient « ma déesse » … et bien sûr quand on parle des mademoiseau !
Et quand on ne prend plus la mouche … mais … qu'on prend le moucheron !
Que la lecture est perturbante, elle accroche, elle défit notre compréhension, elle nous interroge !
Comme le précise Gerd, « le langage devait subir une modification tant il était truffé d'expressions patriarcales », alors la lecture sera tâtonnante, notre esprit conditionné devra mot après mot traduire et s'approprier la signification du langage.
C'est un véritable exploit que réalise l'auteure en nous emmenant vivre en Égalie.
Et dire que ce livre a été publié en 1977 en Norvège !
Il est regrettable qu'il est fallu attendre 2022 pour en trouver la traduction française !
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Véritable coup de coeur. Ce roman sorti pour la première fois en 1977 en Norvège est encore terriblement et tristement d'actualité. Il s'agit d'une satire sociale (un peu jubilatoire il faut l'admettre) où les rôles sont inversés : les hommes sont le reflet des femmes de notre société, des objets réduits à leur sexualité et à la paternité. On les pousse à avoir honte de leur corps, ils sont violés, moqués, interdits d'exercer certains métiers (ou du moins fortement dissuadés et humiliés lorsqu'ils essayent) absolument tout est le reflet de notre patriarcat. Et moi qui suit pourtant éveillée depuis plusieurs années sur les questions d'égalité homme/femme je me suis pris plusieurs uppercuts dans la figure face à la pertinence et l'intelligence de cette satire. Et notamment, à plusieurs reprises, je me suis sentie horrifiée à l'idée qu'on puisse infliger ça à des hommes et c'est là que prend sens tout le formatage que nous subissons, parce que les hommes nous le font effectivement subir, c'est notre réalité et ça ne semble pas les écoeurer, eux, puisqu'ils sont sourds à nos revendications. (pour rappel, le roman date de 1977 !)
Je crois que j'ai enfin trouvé le livre qui permettrait à n'importe qui de se mettre à notre place, les hommes devraient le lire et les femmes aussi pour mieux réaliser les injustices. L'autrice a été jusqu'à retourner les discours naturaliste et avec une intelligence telle que le discours est aussi cohérent (et donc incroyablement injuste et stupide) que celui qu'on nous sert pour nous expliquer pourquoi nous sommes faîtes pour la maternité et rien d'autre. Dans ce roman c'est leur sexe qui est honteux, qui doit être caché, leurs poils qui sont écoeurants, leurs corps qui doivent correspondre à des standards, c'est à eux qu'on coupe la parole, qu'on accorde ou non protection et richesse. Ce sont les hommes qui ont disparus des manuels d'histoire, qu'on ne prend pas en compte dans les sondages, les statistiques, à qui on ne donne pas la parole etc.
Dans ce livre, l'autrice réinvente entièrement la langue pour la féminiser par exemple on ne dit plus "il n'est pas vrai de dire" mais "ELLE n'est pas vraie de dire" et le féminin l'emporte évidemment toujours sur le masculin, c'est un peu perturbant les premières phrases puis ça devient jouissif, j'ai d'ailleurs décidé désormais de changer mon vocabulaire légèrement, c'est à dire par exemple de dire "nom de déesse !" plutôt que "nom de dieu" ou encore : je suis hyper emballée par l'expression "j'en ai rien à cypriner !" elle passe crème (sans mauvais jeu de mots ahah)
L'autrice inverse complètement les rapports sexuels et là aussi ça fait une petite déflagration dans le cerveau. Avec ses mots on se rend compte à quel point c'est évident, limpide : les hommes sont de mauvais baiseurs parce qu'ils ne pensent qu'à leur plaisir, on le sait aujourd'hui (du moins pour le peu qu'on s'y intéresse), on en parle de plus en plus mais là, quand elle décrit un rapport sexuel initié par une femme égoïste pour son unique plaisir, et que l'homme se retrouve à notre place pour sa première fois, excité mais frustré et déçu on se dit "mais putain mais c'est ça !" Je ne saurais même pas comment l'expliquer, il faut le lire pour comprendre.
Ce livre est édifiant à tout point de vue. C'est un must have pour la réflexion, un excellent point de départ pour n'importe qui voudrait ouvrir les yeux un temps soit peu. LISEZ-LE !
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🎭 le féminin l'emporte.
Imaginez une société où le féminin l'emporte ? Gerd Brantenberg vous souhaite la bienvenue en Égalie ! Vous allez suivre le quotidien de Petronus qui rêve de s'émanciper de sa condition d'homme pour devenir marine-pêcheuse. Mais qui imagine un homme prendre la mer ? Quelle femme acceptera que son mari ne se consacre pas entièrement à élever ses enfants ? Et puis les combinaisons ne sont pas équipées de soutien verge, c'est impensable…

🎭 Une satire puissante.
Vous l'avez compris, dans ce roman le masculin et le féminin sont inversés.
Cette inversion des genres, de la langue, des clichés, de la morale, des injonctions montre combien le monde dans lequel nous vivons est oppressant pour les femmes et surtout combien il peut être absurde. Ces travers mis en lumière, personne ne peut rester indemne.
Au début de ma lecture, le comportement des femmes me choquait alors que je ne vis pas à mille lieux des enjeux et de la cause féministe, cela prouve la puissance du procédé satirique, les amateurs d'Orwel ou Swift ne diront pas le contraire. 😉

🎭 Un travail d'orfèvre sémiologique.
L'autre point fort de ce roman est le travail fait sur l'inversion totale du langage. Dans nos langues, le patriarcat est partout, le masculin l'emporte, mais pas seulement, il se trouve aussi dans nombre d'expressions que nous utilisons au quotidien. Mais aussi dans certaines que nous n'utilisons pas comme “garce” ou “damoiseau” car jugées péjoratives. C'est un travail remarquable auquel s'est livrée l'autrice dans sa langue natale et par Jean-Baptiste Coursaud pour nous l'offrir en français. Cela vient appuyer considérablement la force du récit.

🎭 Un roman toujours d'actualité.
Paru en 1977, ce classique de la littérature féministe nous parvient enfin. Nos sociétés ont considérablement évolué depuis les années 70, sur certains points le roman nous montre que nous avons eu des avancées et sur d'autres, il nous rappelle qu'il reste du travail à faire.

Je me suis vraiment régalée à découvrir ce roman, il est à mettre dans toutes les mains.
Lien : https://www.instagram.com/p/..
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En Egalie, les femmes détiennent le pouvoir et oppriment les hommes qui ne sont bons qu'à rester à la maison s'occuper des enfants. Elle en va ainsi. Les êtres fumains sont égaux mais surtout les femmes. Petronius, le fils de la toute puissante directrice Rut Brame veut devenir marine-pêcheuse mais sa mère ne veut rien entendre. Petronius va devoir procréer et donc paterner. Il ne pourra pas courir plusieurs hases à la fois. C'est irréaliste. Rut Brame voudrait bien lire son journal tranquillement, heureusement le potelé Kristofer son mari est aux petits soins pour elle. Mais, nom de Déesse, la révolte gronde chez certains hommes qui en ont marre d'être des citoyennes de seconde zone. Marre de porter des soutien-verge, de ne pas accéder aux métiers réservés aux femmes, d'être considérés comme des objets sexuels par celles-ci. Autour de mademoiseau Tapinois, le professeur martyrisé par ses élèves et de Petronius, une poignée d'activistes vont créer un cercle masculiniste pour tenter de faire valoir leurs droits au bonheur et à l'égalité sexuelle. Mais le chemin est long et semé d'embûches dans une société où le sexe fort fait la loi…
Sorti en Norvège dans les années 1970, Les Filles d'Egalie eut un grand retentissement mais il ne sera traduit en français qu'en 2022. Gerd Brantenberg renverse les valeurs dans cette société imaginaire dominée par le matriarcat jusque dans la langue utilisée, tout est écrit au féminin. C'est un miroir que nous tend l'autrice, regardez comment est le monde quand un sexe domine l'autre. le procédé pourrait être casse-gueule mais fonctionne étonnamment bien car tout est justifié par des arguments biologiques et par le poids de l'Histoire (elle en a toujours été ainsi) et la lecture du roman s'avère aisée, agréable mais surtout grinçante et très drôle. Une pépite !
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Le pays d'Egalie est dirigé par une femme, la directrice Brame, tandis que son mari veille avec amour sur leur foyer et leur fils Pétronius. A 15 ans, celui-ci s'apprête à faire ses premiers pas dans le monde, le soir du bal des débutants. Mais le jeune homme, long et maigre, dont l'apparence est à l'opposé des canons esthétiques en vigueur, refuse de rester cantonné à sa condition d'homme-objet et rêve de devenir marine-pêcheuse. Mais comment pourra-t-il échapper aux conventions et aux règles draconiennes qui régissent cette société matriarcale ?

Bienvenue en Egalie ! Ou plutôt en Inégalie. En effet cette société prétendument égalitaire est tout le contraire : aux femmes le pouvoir, les postes-clés, les décisions, le droit de se promener torse nu, les bars réservés, l'amour à la hussarde, le choix d'opter pour un partenaire à qui elles proposeront un "pacte protège-paternité". Aux hommes l'idéal domestique, l'éducation des enfants et les activités frivoles, la mise en plis de la barbe, les rondeurs si délicieuses et l'obligation, à l'adolescence, de porter un soutien-verge que l'on va exhiber sous la robe chasuble. Renversement des rôles donc, qui n'est pas sans rappeler les années où, en France, une femme ne pouvait ni travailler ni ouvrir un compte en banque sans l'aval de son mari.

En Egalie, la domination féminine est si puissante que la langue elle-même s'est féminisée : "elles" l'emporte au pluriel pour désigner des femmes et des hommes, "elle" est évident que la fumanité doit sa survie à la femme car "ce sont les hommes qui procréent" – à eux d'ailleurs de prendre la pilule. J'ignore si le norvégien comporte de tels marques genrées que le français, mais la traduction est une réussite, qui montre parfaitement à quel point la domination d'un sexe dit "fort" sur l'autre appelé "faible" ou "beau" est devenue parfaitement acceptée et inconsciente. Au-delà de l'histoire de Pétronius et de ses copains, qui entament leur révolution masculiniste, ce récit, écrit en 1962, montre bien les préjugés à l'oeuvre dans l'inconscient collectif et illustre, de façon parfois amusante, parfois grinçante, le long chemin que les femmes ont dû suivre pour faire craquer les coutures de leurs corsets – et qui n'est pas encore achevé.

Lien : http://usine-a-paroles.fr/le..
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« Les filles d'Égalie » de Gerd Brantenberg est une dystopie, sortie en 1977 en norvégien et en 2021 en français.
L'Égalie est une société inversée (d'après nos standards) ; les femmes occupent les métiers de direction, ce sont elles qui procréent donc elles ont le pouvoir, et les hommes s'occupent des enfants et de la maison, les métiers les plus pénibles parce qu'ils ont la force.

Ce livre est très déstabilisant, perturbant, dans sa façon d'aborder les choses et son écriture ; tout est écrit au féminin : Qu'elle fait bon vivre en Égalie !

À mettre entre toutes les mains…
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