Un jour, mon prince... Rencontrer l'amour et le faire durer

Il y a un moment dans la vie où il faut décider des événements sous peine qu'ils ne décident de notre vie. Décider de ne plus s'abandonner à la fatalité, décider la renaissance amoureuse quand la relation devient difficile, décider de retrouver l'homme ou la femme que l'on a rencontré(e) avec tant de bonheur, avec qui on partage des souvenirs inoubliables. C'est ce travail de mémoire qui permet la permanente renaissance, nécessaire à la longévité de l'amour.

Dans ma réflexion sur comment "Inventer le couple"
[notre : autre livre de l'auteur, Philippe Brenot],
je souligne cinq domaines sensibles qui peuvent permettre à chaque couple d'évaluer sa convergence d'intérêts, ses divergences d'idées et son désir ou sa capacité à vivre ensemble le quotidien, qui sont : la langue (communication), le sexe, la mémoire, l'entraide, le besoin de proximité.

Et je propose à chaque couple de bien réfléchir ensemble à leur conception mutuelle du partage, de la tendresse, de l'érotisme, de l'initiative, de la surprise, qui sont les points sensibles de l'organisation conjugale afin de renouveler régulièrement notre manière d'être ensemble.

Inventer chaque jour un couple nouveau est certainement l'un des grands secrets de l'amour au long cours.

Le temps
Il apparaît comme la première nécessité de l'amour.

Temps pour soi, pour se découvrir, pour prendre conscience, pour exister ... pour être soi.

Temps de la rencontre, de la séduction, de la découverte de l'autre, temps de l'observation, de l'admiration.

Temps qui passe sans la moindre obligation dans les premiers moments du vivre ensemble.

Temps du retour de la pensée, du rappel de la mémoire spontanée.

Prendre du temps et laisser au temps le temps sont un luxe que l'on ne se permet, le plus souvent, que dans les moments de la rencontre car ensuite la vie reprend son cours.

(...) Le temps sera aussi une solution aux éventuelles difficultés de vie ultérieures, lorsque la routine est trop prenante : retrouver le temps d'être ensemble, se donner le temps d'avoir le temps, se permettre de le perdre.

Dans cette préparation à l'amour et à la mise en condition pour "tomber amoureux(se)", le temps est un facteur essentiel : il me faut être libre dans ma vie et me rendre vraiment disponible

Le baiser joue un rôle bien particulier dans l'approche sensuelle.
A cette étape de la rencontre, il est le contact le plus intime qui puisse être.
Le toucher, l'odorat mais aussi le goût entrent en action en même temps que les lèvres s'effleurent

Nous serions donc manipulés par une force supérieure pour nous rapprocher, nous attacher et procréer ? C'est la thèse de l'évolution dont le seul but serait la reproduction et la survie de l'espèce.

On ne peut nier cet aspect utilitaire de l'amour mais, depuis près de cinquante ans que sexualité et fécondité ne sont plus obligatoirement liées, nous avons une preuve évidente que l'amour est avant tout désir, que l'amour est plaisir, que l'amour est attachement durable au-delà d'une fonction de reproduction.
Et surtout que l'amour est poésie, qu'il enthousiasme et fait rêver.

Plusieurs enseignements sont à tirer de ces contes à secrets : "Malgré tous les efforts que peuvent faire les parents pour empêcher l'éveil sexuel de leur enfant, avertit Bettelheim, il aura lieu de toute façon."

L'histoire nous apprend aussi que l'attente peut être longue, mais elle n'est jamais inutile puisqu'en fin de compte le Prince vient toujours à passer. (...)

La symbolique du coït (baiser) et celle de l'enfantement (longue attente) sont ainsi contenues dans l'histoire du Prince et de la Belle.
Le baiser du Prince réveille une féminité qui était, jusque-là, embryonnaire. Là où, un instant auparavant, se dressaient des obstacles infranchissables, s'ouvre la voie royale du grand amour, le buisson d'épines laisse place à un parterre de "belles et grandes fleurs".
Et Bettelheim d'en conclure : "Ce n'est qu'après avoir réalisé l'harmonie intérieure qu'on peut espérer la trouver dans ses rapports avec les autres."
Conseil ô combien précieux que nous retrouverons dans les pages à venir.

(La rencontre - suite)

Nous sommes maintenant plus près l'un de l'autre et nos réactions de défense se mettent en jeu pour préserver l'espace personnel, cette bulle individuelle dans laquelle nous n'acceptons que les intimes.
Si les sensations qui émanent de la personne sont positives, agréables, excitantes, cela peut nous inciter à laisser entrer cette dernière dans notre espace personnel, à quelques dizaines de centimètres de soi, réservé aux proches, aux amis.

L'échange de paroles complète la vue qui nous renseigne plus encore sur cet inconnu déjà en partie familier. On apprécie alors la finesse de ses traits, la mobilité du visage, l'expression des émotions, les formes corporelles.

A distance plus proche encore, à la terrasse d'un café où l'on a accepté de "prendre un verre ensemble", les détails du visage sont très nets, parfois déjà l'odeur du corps et de la peau, le plus souvent d'un parfum (...)
Alors, pour se parler, on plonge les yeux dans le regard de l'autre. (...)

Encore plus proches, lorsqu'on a accepté l'autre dans notre bulle très intime, le toucher, le goût et l'olfaction nous permettent, au plus près du corps, de ressentir l'excitation de cette présence inconnue et les émotions qu'elle déclenche. (...)

A chaque étape de la rencontre, à chaque avancée vers l'espace le plus intime, nous pouvons estimer l'accord des réactions émotionnelles, le degré de sensualité, la manière d'être et le respect de l'autre. Si nous connaissons bien nos émotions, ce sont certainement les meilleurs guides de la progression amoureuse.

[Après les autres notions évoquées, sur le Prince et la Belle au bois dormant : le rêve d'amour absolu, l'homme idéal, beau et jeune, la quête de la "moitié" comme dans le mythe de l'androgyne, la prédestination de la rencontre, le sentiment de manque quand l'autre n'est pas là ...]

Dernier souhait qui complète le mythe : "Vivre heureux longtemps ensemble" est aujourd'hui largement partagé par les hommes et les femmes d'un monde occidental socialement protégé, mais confronté aux inquiétudes du quotidien et à l'angoisse de l'avenir. Le souhait d'un lien amoureux passionnel de longue durée, qui prolonge de manière permanente la passion de la rencontre avec tous les attributs de l'amour absolu : c'est l'union idéale et indéfectible. (...)

Seul bémol, ou plutôt seule évolution du conte dans notre modernité, la plupart des couples jeunes ne désirent pas avoir "beaucoup d'enfants".
Cette proposition qui était autrefois un gage de bonheur, de richesse et d'espérance à une époque où la mortalité infantile était un fléau, à une époque où une famille nombreuse était un signe de prospérité dans la mesure où l'on avait besoin de bras et d'entraide, n'est plus de mise aujourd'hui. (...)

Il est certain que les femmes jeunes désirent avoir un enfant avec l'homme de leur vie. Parfois deux. Rarement trois.
Cet enfant, qui n'est plus un gage de richesse ou de fécondité, est au contraire un symbole des forces qui unissent le couple, une preuve matérielle de l'amour-sentiment et, si l'on en croit Aristophane [avec le mythe de l'androgyne et des humains en quête de leur moitié], une confirmation de l'unité originelle enfin retrouvée.

Bien que d'origine médiévale, l'histoire de Tristan et Iseut nous fait toujours rêver en raison du caractère absolu de cet amour indéfectible dont l'exaltation ne peut conduire qu'à la mort tant il dépasse la mesure de l'amour des humains. Ni Tristan ni Iseut ne peuvent maîtriser ce désir absolu que leur a prodigué le philtre d'amour. Sa puissance est telle que les amants sont constamment épris et liés pour la vie. Mais lorsqu'au bout de trois ans cesse l'effet de la magie, comme dans la vraie vie où la passion n'est pas éternelle, la force de leur amour apparaît plus encore et rien ne pourra les séparer, pas même la mort. (...)

Cette histoire a été mise en musique par Wagner (...), elle a été plusieurs fois portée à l'écran, et a inspiré de nombreux films (...)

Car ce mythe essentiel contient les fondements de l'amour absolu dont nous rêvons tous : une passion inaltérable, un amour pour la vie et un philtre magique capable d'induire un désir à nul autre pareil, un lien indéfectible que rien ne peut contrarier, pas même la mort.
La vertu de cette histoire est de nous offrir un antidote puissant aux soucis quotidiens, aux écueils de la vie.

Les sociologues, quant à eux, ont bien montré la force de l'homogamie, c'est-à-dire le fait que l'on s'apparie plus entre semblables qu'entre différents.
Homogamie géographique, choix d'un conjoint issu de la même région.
Homogamie socioprofessionnelle, choix dans le même milieu d'activité et surtout le même niveau culturel ou d'éducation.

L'homogamie des femmes étant remarquable quand, par exemple, 52% des femmes ingénieurs diplômées ont également un conjoint ingénieur diplômé.
Il est certain que les conditions de la vie active renforcent la possibilité que le choix amoureux se fasse majoritairement dans le milieu social et professionnel auquel on appartient. Cette contrainte sociologique va encore dans le sens de la recherche du semblable.