J'ai eu la chance d'étudier cette oeuvre de ce grand novelliste italien qu'est Buzzati dans mon cursus de lettres. Une lecture qui ne m'excitait pas à première vue, puisque je ne suis pas une adepte des
nouvelles. Mais
Dino Buzzati a su m'ensorceler et m'emmener dans son monde, un monde disjoint entre réalité et fantastique.
Beaucoup de ses
nouvelles abordent le thème de notre société individualiste et de la possible rencontre que l'on peut faire de l'autre via le langage et les mots.
Le style d'écriture de l'auteur est personnel, et très travaillé. En effet, il joue avec les genres littéraires et mélange réalisme des descriptions et fantastiques des scènes narrées. Un mélange hétéroclite, qui met le lecteur au pied du mur, ne sachant trop où se placer et que croire.
Sa première nouvelle, qui a donnée son titre à l'ouvrage,
le K, est sans doute l'une de mes préférées. Elle raconte l'histoire d'une bête mystérieuse, qui choisie sa proie et la suit jusqu'à la fin de sa vie. Une nouvelle énigmatique et effrayante, qui se dénoue d'une façon étonnante.
Quant au Veston ensorcelé, l'image que veut faire ressortir Buzzati est limpide. Ce jeune homme, doté d'un manteau magique qui lui octroie des pièces d'or à chaque fois qu'il plonge la main dans ses poches, fait clairement penser au système capitaliste de notre société.
La Tour Eiffel est également l'une de mes
nouvelles préférées de Buzzati. En s'appuyant sur un fait historique (la construction de la Tour Eiffel et ses 300 mètres de hauteur), il amplifie sa réalité et décide d'ajouter une touche de magie dans son récit. La Tour Eiffel continuera à grimper à l'infini, jusqu'aux nuages. Hélas, la médiocrité de la condition humaine, armé jusqu'aux dents, fait revenir les hommes du ciel sur terre. La réalité rattrape très rapidement la fiction.
Dans la nouvelle intitulée Jeune fille qui tombe… tombe, l'auteur nous met face à la futilité de la vie et nous renvoie en pleine tête notre mortalité. La jeune fille dégringole les étages de son immeuble et se retrouve vieille dame lorsqu'elle arrive tout en bas. Il y a de quoi frisonner.
Les bosses dans le jardin est également une nouvelle qui fait réfléchir à la mortalité de l'être humain, mais aussi à sa pérennité. Que restera-t-il de chacun une fois mort ? Une question que tout le monde s'est déjà posé une fois dans sa vie, mais qui malheureusement, ne peut trouver de réponse positive.
Je n'ai cité là que quelques-unes de mes
nouvelles préférées. le recueil en contient bien trop pour que je les aborde toutes l'une après l'autre. Néanmoins, un socle commun unie chaque nouvelle. En effet toutes font prendre conscience au lecteur de certaines choses qui régissent sa condition humaine. La futilité de la vie, sa mortalité, son rapport au monde et aux autres. Il nous inflige des leçons de morales bien dosées, qui agissent simplement et indirectement, via le fantastique. Grâce à ce subtil détournement fantastique, le lecteur revient plus brutalement au réel pour prendre conscience de sa nature et de l'image de la société.
Buzzati a un talent démentiel. A travers des
nouvelles fantastiques simples de compréhension, il y cache de nombreuses interprétations possibles. C'est riche, profond, majestueusement écrit. Amusez-vous à replacer des éléments concrets sur toutes ces narrations si magiques. Réflexions et questionnements assurés (et bon moment de lecture, aussi) !
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