La première guerre fasciste est une guerre à l'hypérite. Canons, mitrailleuses et fusils ne sont plus que des armes d'appoint.
Un vrai traitre a besoin de trahir pour se sentir en accord avec lui-même. La fidélité est une amertume secrète qui pourrit sa vie. La loyauté, c'est du fiel saupoudré de sucre, le jour sa violation, ce qu'il ressent est un bonheur qui le paie de tout le reste. La trahison, c'est intime.
Quand ils venaient en permission, ce n'était pas le moment de leur refuser quelque chose. Alors, on se ramassait des gosses. En veux-tu, en voilà. Après, on apprenait que le père était mort en héros ou il revenait infirme, et il fallait se coltiner les gosses quand-même! Les gosses de guerre comme on les appelait.
Effet de l'université, à quoi servent les étudiants s'ils ne remettent pas en cause le système en place?
-C'est vrai que nous ne sommes plus rien?
Elle dit "nous" du ton de ces épouses qui n'existent qu'à travers la carrière de leur mari.
La population aime l'ancilu. C'est son héros, alors se forme le fameux mur des Siciliens, mélange de silence et de haine envers l'occupant, le tout accompagné d'amabilités hypocrites.
Les Siciliens veulent bien s’accommoder du fascisme, ils en ont vu d'autres, mais à la condition que ce soit un fascisme sicilien. Lee reste, ils n'en veulent pas.
L'élégante, la belle Carmela fait partie de ces femmes qui donnent le ton. Elle fait la mode, lance les débats et entretient les conversations.
Margherita éclate de rire :
- La liberté, les Italiens s'en fichent du moment qu'ils ont un chef et qu'il leur donne la fierté.
- Et les pauvres ?
- Les pauvres, ils veulent bouffer. C'est tout ce qu'ils attendent de toi. Aux riches, l’orgueil d'être italiens, aux pauvres, de quoi remplir l'assiette. La liberté, c'est pour les philosophes, pour Benedetto Croce*. La liberté, ce n'est qu'une idée !
* Grand intellectuel italien qui avait rallié le fascisme, avant de le quitter publiquement et de devenir l'un de ses plus farouches opposants. Mussolini avait dit dans un discours qu'il n'avait jamais lu une page de lui.
Dans une Italie où la religion catholique est le fondement de la société, être considéré comme l'écrivain du diable est un statut qu'il (Cavalcanti) est prêt à revendiquer.