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Citations sur L'Opéra de Vigata (7)

La dame, qui était assise à se vernir les ongles, s'était levée très lentement . De l'index de la main droite, elle lui avait indiqué cet endroit de son corps où Everardo Colombo trouvait, deux fois par semaine, l'or, l'encens et la myrrhe.
- Ca, c'est à moi, avait dit dona Pina, haute, ferme et terrible come un oracle . Et moi, je te le donne jamais plus. Pour moi, à partir d'aujourd'hui, tu peux rester les couilles en l'air.
Et elle avait tenu parole.
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Chez nous, en Sicile, parler latin signifie parler clairement.
— Et quand vous voulez parler de manière obscure ?
— Nous parlons en sicilien, Excellence. (p. 41 )
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-"les Vigatais doivent faire ce que j'ordonne, moi. Ce que je dis et ce que je commande. Le"brasseur de Preston" sera représenté et aura le succès qu'il mérite.
-Excellence, puis je parler "spartiate" ?
-Qu'est ce que cela veut dire ?
-Spartiate, ça veut dire avec des gros mots. Vous pouvez m'expliquer pour quelle putain de bonne raison vous êtes fourré dans la tête cette putain d'idée d'imposer aux Vigatais la represintation (sic) d'un opera que les Vigatais ne veulent pas s'avaler? Votressellence veut peut-être faire arriver un quarante-huit, une révolution ?"
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Puglisi se sentit comme un minot surpris en train de monter un bobard ; n'était ce qui s'était passé avec la femme, il ne se serait pas laissé prendre comme un débutant la main dans le sac.
- Ah oui, fit-il, pâteux. Et alors, comment ça s'explique ?
- La quistion se pose pas, dit Catalonatti. Ca s'explique comme ça.
Il fit quatre pas et contourna le mort, arriva à la hauteur des vitres, les ouvrit, sortit sur le balcon sous la pluie battante, un vrai déluge, tira de sa poche un mouchoir à carreaux rouges et blancs, s'en entoura la main droite, donna un coup de poing contre le carreau le plus près de la poignée de manière à que les débris tombent à l'intérieur, rentra dans la chambre.
- Continuez , diligà, dit-il, sournois. Maintenant, votre discours coule tout seul, que c'en est une merveille.
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Toucher le cul des poules pour sentir si elles étaient entrain de pondre était le passe-temps préféré du commandant Lillo Lumia , et c’est ce qu’il était en train de faire dans le poulailler de sa villa à mi-côte au-dessus de Vigatà quant un domestique vint en courant lui dire qu’au mas , il y avait u zu Memé arrivé au galop de son cheval.
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- Que votre seigneurie m'excuse, Excellence, dit-il en commençant à déboutonner ses bretelles.
D'un coup, le préfet se leva, courut à la porte, donna un double tour de clé, la glissa dans sa poche. Pendant ce temps, Ferraguto avait tiré de la jambe droite du pantalon un long rouleau qu'il posa sur le bureau, avant de se reboutonner en hâte.
- Ça me faisait marcher tout tordu, dit-il. J'avais peur que le papier prenne des plis. Avec une lupara [fusil de chasse à canon scié] dans le pantalon, il n'y a pas ce genre de problème.
Il rit longuement, tout seul, pendant que Son Excellence déroulait la feuille. C'était l'épreuve d'imprimerie d'une affiche annonçant la prochaine représentation de l'opéra Le Brasseur de Preston, pour l'inauguration du théâtre de Vigàta. A la fin d'une lecture attentive, comme il n'avait trouvé aucune erreur, le préfet rendit le rouleau à Ferraguto, qui le renfila dans son pantalon.
-Nous sommes aux portes avec les pierres, très cher.
- Je ne comprends pas, Excellence.
- C'est une façon de dire de par chez moi. Cela veut dire que désormais, il nous reste très peu de temps. Après-demain, d'ici trois jours plutôt, l'opéra sera porté à la scène. Et je suis très préo'uppé.
Ils s'offrirent une pause, les yeux dans les yeux.
-Moi, quand j'étais gamin (nicareddro)(3), je jouais aux comerdioni, dit très lentement, rompant le silence, Emanuele Ferraguto.
- Ah, oui ? fit, quelque peu dégoûté, le préfet qui s'imaginait les comerdioni comme des espèces d'araignées velues et gluantes auxquelles le petit Ferraguto arrachait les pattes une à une.
- Oui, continua don Memè. Comme on les appelle par chez vous, ces jeux que les gamins (picciliddri) fabriquent…
- C'est un joujou? l'interrompit le préfet, visiblement soulagé.
-Oui mon bon monsieur. On prend une feuille de papier de couleur, on la coupe à la forme, on y colle deux baguettes d'osier avec de la colle de farine… puis on l'envoie en l'air attachée à une cordelette.
-J'ai compris! Les cerfs-volants! Les aquiloni! s'exclama Son Excellence.
Les cerfs-volants, oui mon bon monsieur. On y jouait du côté de Punta Raisi, près de Palerme. Vous le connaissez, l'endroit?
- Quelle question, Ferraguto! Vous savez très bien que moi, je n'aime pas sortir de chez moi. La Sicile, je la 'onnais bien sur les dessins. C'est mieux que d'y aller en personne.
- Pour les comerdioni, c'est un endroit nul, Punta Raisi. Certaines fois, il n'y avait pas de vent, et il n'y avait ni Dieu ni diable qui les fasse lever. Certaines fois, au contraire, du vent, il y en avait et le comerdione, à peine décollé, encaissait une baffe de courant fort qui le faisait plonger et puis l'envoyait s'écraser contre les branches des arbres. Moi, testard, je m'obstinais. Mais je me trompais, j'étais dans l'erreur. Je me suis bien expliqué?
Son excellence resta foudroyée par cette question inattendue. Merde, qu'est-ce qu'il y avait à comprendre, dans cette histoire de cerfs-volants et de vents contraires?
- Non, vous ne vous êtes pas bien expliqué.
«Une éternelle tête de con de Florentin, il est», pensa Ferraguto et en conséquence, il répondit par une question.
— Votressellence me permet de parler latin?
Le préfet sentit une rigole de sueur lui couler dans le dos. Depuis l'instant où il s'était heurté à rosa-rosae, il avait pris cette langue en grippe.
- Ferraguto, en 'onfidence, à l'école, je n'étais pas très bon.
Le sourire légendaire de don Memè s'élargit.
-Mais qu'est-ce que vous avez compris, Excellence? Chez nous en Sicile, parler latin signifie parler clairement.
-Et quand vous voulez parler de manière obscure ?
- Nous parlons en sicilien, Excellence.
- Allez-y en latin.
-Excellence, pourquoi est-ce que vous vous entêtez à vouloir faire monter ce comerdione de Brasseur justement à Vigàta où il y a des vents contraires ? Croyez-moi, croyez l'ami que je m'honore d'être, ce n'est pas une bonne idée.
Le préfet comprit enfin la métaphore.
- A Vigàta, bonne ou mauvaise idée, ils doivent faire ce que j'ordonne, moi. Ce que je dis et ce que je 'ommande. Le Le Brasseur de Preston sera représenté et aura le succès qu'il mérite.
-Excellence puis-je parler spartiate ?
- Qu'est-ce que ça veut dire ?
- Spartiate, ça veut dire avec des gros mots. Vous pouvez m'expliquer pour quelle putain de bonne raison vous vous êtes fourré dans la tête cette putain d'idée d'imposer aux Vigatais la représentation d'un opéra que les Vigatais ne veulent pas s'avaler ? Votressellence veut peut-être faire arriver un quarante-huit, une révolution ?
- Que de grands mots, Ferraguto!
(p 39/42)
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À la courtoise question du marquis, le chevalier gonfla la poitrine.
- Je parle de Ouagnère ! De sa musique de Dieu ! Du spectre de sa musique qui hante tous les autres musiciens ! Cette musique sur laquelle tous, aujourd'hui ou demain, devront se rompre les cornes !
- Ce Ouagnère, jamais je ne l'entendis, avoua Giosuè Zito, sincèrement étonné.
- Parce que vous être un homme ignorant ! entre vous et la culture d'un merlan, il n'y a pas de différence ! À moi, elle m'en a joué un morceau de cette musique, Mme Gudrun Hoffer, au piano. Et moi, je me suis retrouvé au paradis ! Mais par saint Belzébuth, comment fait-on à ne pas connaître Ouagnère ? Vous n'avez jamais entendu parler du Vaisseau fantôme?
Giosuè Zito, qui venait à peine de se réveiller du coup précédent, vacilla, se retint à un guéridon pour ne pas tomber.
- Alors, vous voulez vraiment me faire calancher! Pourquoi, merde, continuez-vous à parler de fantômes ?
- Parce que c'est comme ça que ça s'appelle, et que c'est un opéra très grand ! Moi, je m'en fous si vous chiez dans votre froc! C'est une musique nouvelle, révolutionnaire! Comme celle de Tristan!
- Aïe! Aïe! murmura la chanoine Bonmartino, spécialiste de patristique, occupé suivant son habitude à s'embrouiller lui-même avec une réussite.
- Qu'est-ce que vous voulez me signifier, avec votre aïe-aïe ?
- Rien, expliqua le chanoine avec un visage si séraphique qu'on eût dit que deux angelots lui tournaient autour de la tête. Je veux simplement vous signifier qu'en langue italienne, Tristan, c'est tristano, c'est à dire, "cul mélancolique" : Ano, anus, triste. Et alors, avec ça, je m'imagine que l'opéra doit être de toute beauté.
- Alors, même vous, vous y comprenez que dalle, à Ouagnère !
- En attendant, ça s'écrit double v, a, gé, ène, è, erre et ça se dit "Vagner". C'est un Allemand, très cher ami, pas un Anglais ni un Méricain. Et en plus, c'est vraiment un fantôme, comme vous dites et Dieu garde la santé de M. Zito. En fait, il est mort avant de naître, un avorton. La musique de votre Wagner est une chiure solennelle, une chiasse bruyante, faites de pets tantôt pleins et tantôt vides d'air. Des choses de cabinet, de retrait. Ceux qui font de la musique sérieuse pour de bon, n'y arrivent pas, à la jouer, croyez-moi. p 20/21
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