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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Nous sommes en 1900 et des broutilles. le XXème siècle débute à peine. Quelque part dans le Nord de la France*, au coeur d'un petit bourg isolé, sobrement nommé le Village **. Une vraie vie d'antan y bourdonne ; active et campagnarde ; opulente pour certains, suffisante pour d'autres ; d'une ruralité qui n'avait pas encore déserté les labours, les vignes ou les chemins creux. Une mairie, une église, une brasserie, des boutiques pour tout ce dont on a besoin, la grande ville à côté pour le superflu, le pensionnat des soeurs pour de jeunes orphelines, une taverne, un grand marché pour tous les lieudits à la ronde ... Des familles comme partout ailleurs, implantées sur le même sol depuis des générations. Des aïeux en attente de trépas, des enfants à l'éternelle bougeotte, des cris et des rires, des haines et des jalousies, des grandes gueules qui se montrent et des amours qui se cachent …

« le Village » : un coin de terre comme un autre. Des gens bien, des saligauds, des entre les deux … et puis les autres, ceux que l'on rejette sans trop savoir pourquoi, ni idiots du village à moquer ni démons à exorciser. Les Carson par exemple, à l'autre bout du village, que personne ne fréquente. Des pestiférés repoussants. Rien que des sales « Bleus ». Des pas-comme-nous. La consanguinité vous pensez. de père en fils, victimes d'une maladie épidermique, bleu est leur épiderme, la méthémoglobinémie (ai-je appris par ailleurs). Des porte-poisse. A fuir. A bannir. A haïr comme si c'était normal, ancestral et obligatoire. le mauvais oeil, le diable presque, la maladie à les toucher, leur sorcellerie à endiguer.

Tout irait bien, pour les Carson dans le pire des mondes, dans le meilleur pour ceux du Village, si quelques fois, l'amour ne se mêlait pas de tout chambouler, de l'ordre des choses à l'inamovibilité apparente de destins tout tracés. le Village, bientôt cul par-dessus tête. L'Amour contrarié de deux êtres va tout emporter sur son passage, eux-mêmes, les êtres qui les aiment ou les haïssent. Lui, Charles Carson, est « bleu » ; Frida, l'orpheline, de carnation normale ; des amis d'enfance unis par la marginalité ; tout naturellement bientôt des amants à marier, d'autant qu'une naissance s'annonce … si ce n'est que le monde de Charles et Frida ne supporte pas le bleu et le leur fera savoir. Les amants maudits seront à l'origine de bien des changements.

La suite appartient au roman … Acceptation des différences ? Désastre tragique ? Rédemption des âmes ? Lent travail de sape des culpabilités, de celles qui rongent au détour d'une longue maturation. Happy end final ou son inverse ?

Charles et Arthur, Jean et Marie (les « bleus »); Frida (la passerelle entre deux mondes, le coin de bois poussé entre normalité et monstruosité ) ; Guillaume et Rose (les tenanciers de l'auberge en manque de parentalité); César (maire et brasseur, assoiffé de pouvoir et d'argent tel un Papet Soubeyran à la Pagnol) ; Maurice (un Ugolin comme issu de Manon des Sources) et son frère Louis (l'ordure de service) … tous coupables et responsables, tous innocents, ni blancs ni noirs, rien que gris sur le fil tendu des bonnes et mauvaises intentions.

« Bleu», à l'image de son titre et des peaux qu'il couvre, est tout en nuances de bleu ; il hésite entre la sérénité azur du ciel des jours heureux et les tons sombres et profonds des pluies diluviennes des ultimes chapitres.

Le roman se pose à la croisée de plusieurs genres littéraires. Tour à tour : cherchant les bons sentiments et se nuançant de rose ; raclant le noir des hommes et de leurs actes (polar) ; s'implantant dans le roman de terroir ; se faisant frissons de thriller (mises en abime systématiques en bas de chaque chapitre) et de ce fait page turner, dénichant dans sa conclusion finale une bien sensible touche de Fantastique … et à la croisée de tous ces « mauvais genres » : de la littérature générale .

C'est aussi un premier roman : de ses faiblesses (une ou deux pirouettes scénaristiques bien rapides) je ne retiendrai que les forces de fond (l'humanisme) et de forme (une belle prose avec le goût des mots au coeur des phrases ; une lecture fluide et rapide ; la polyphonie des chapitres entre les « je narratif » des différents protagonistes et la voix centrale de l'auteur).

Pour conclure, dans ce qui, au départ, n'était pas trop ma tasse de thé (je suis plutôt SFFF, polar et BD), j'ai trouvé mon taf. Des bons sentiments dans un monde de brutes. On en a tant besoin ces temps. Merci Laurent Cappe pour ce moment hors du temps, ce goût des choses simples, ce sens à donner à nos vies et à celles des autres.

* Pas de localisation précise. Des indices tout au plus. Un flou délibéré. le Pas-de-Calais probablement, au regard (page 4) des sources de la photo de couverture : « le Cornet d'Or, village de le Wast, 62, en 1902 »

** Sans précision « Juste la volonté de laisser la possibilité au lecteur de s'imaginer n'importe quel village, en fait, de donner un peu "d'universalité" (en toute modestie) au lieu. » dixit l'auteur.
Lien : https://laconvergenceparalle..
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Bleu est le premier roman de l'auteur Laurent Cappe, que je remercie vivement pour m'avoir permis de découvrir ce très bon récit. Pour ce roman, il s'est librement inspiré d'un fait réel : l'histoire de la famille Fugate ,qui a vécue au Kentucky au début du 19e siècle . La particularité de cette famille, c'est qu'un certain nombre de ses membres avaient la peau bleue à cause d'un problème génétique.

Dans le roman de Laurent Cappe, c'est la famille Carson qui est atteinte de ce mal, à l'aube du 20e siècle. Bien entendu, l'origine du phénomène échappe alors à leur contemporains, et les Carson sont, logiquement, mis au banc de la société. On ne sait jamais, si leur maladie était contagieuse… Ils vivent donc comme des pestiférés, dans une petite maison loin du Village. le père et le fils, Charles. La mère a en effet, malheureusement, mis fin à ses jours.
La jolie Frida, qui a grandi au Manoir, l'orphelinat du Village, sera la seule à briser l'isolement qui les entoure. Elle tombe amoureuse de Charles. Mais le Village est-il prêt à accepter cette relation entre l'une de ses membres et un Bleu ?

C'est l'aspect historique qui m'a d'abord donné envie de découvrir Bleu, l'idée qu'un fait réel l'avait inspiré (dont je n'avais jamais entendu parlé, je me suis un peu renseignée ensuite).
J'ai dévoré le roman. Laurent Cappe maîtrise parfaitement son style (l'écriture est très agréable, travaillée et fluide) mais aussi le rythme de son roman (des chapitres courts, des péripéties qui s'enchaînent parfaitement). Alors on se dit sans cesse , « Allez, un dernier chapitre ». Et on a terminé notre lecture avant même de s'en rendre compte!

La construction du roman n'est pas linéaire: j'ai beaucoup aimé les chapitres en italiques, retranscription des paroles de Villageois qui ne sont pas nommés, qui s'expriment après l'histoire que l'on est en train de découvrir. Par conséquent, on sait où l'on va. On a le sentiment d'une fuite inexorable du Destin, où les personnages ne sont pas maîtres de leurs décisions, comme s'ils n'agissaient que comme une force supérieure les conduit à le faire.

Le roman traite très bien de la psychologie des personnages, des ravages de la peur, de la peur de ce qu'on ne connaît pas, de ce qu'on ne maîtrise pas. Comment certains hommes sont manipulés ou comment d'autres manipulent en se jouant de cette peur, mais aussi de tous les autres appétits humains : désir, ambition, jalousie, vengeance… de fait, c'est tout une gamme d'émotion que le lecteur ressent: on va souffrir pour certains personnages (Frida est vraiment très touchante), en détester d'autres, avoir pitié de certains...

Je vous recommande vraiment ce roman, qui m'a complètement séduite, et j'espère pouvoir découvrir bientôt le nouveau roman de l'auteur, May.
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Ayant eu un coup de coeur pour «May», j'ai souhaité continuer ma découverte de l'auteur en lisant son premier roman, «Bleu».

S'étant librement inspiré d'une histoire vraie, Laurent Cappe a écrit un récit qui évoque la famille, l'amitié, la différence, l'acceptation.

Encore une fois, je ne suis pas déçue par la plume de l'auteur. J'apprécie sa façon de nous raconter les évènements, nous avons l'impression d'être transportés dans l'histoire aux côtés des personnages.

Laurent Cappe nous livre une histoire touchante dans laquelle je suis passée par toutes les émotions.
Nous nous attachons aux personnages et à leur histoire.
Nous souhaitons une fin heureuse à Frida, Charles, Guillaume, Rose et les autres, je vous laisse lire le récit afin de découvrir si ils l'auront ou pas...

Je vous conseille grandement de découvrir ce récit, vous n'en ressortirez pas indifférents.
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Le Village, que Laurent Cappe n'a d'ailleurs pas nommé, est un microcosme représentatif de la province française au début du XXe siècle. le patron de l'entreprise qui offre l'emploi local est aussi le maire incontesté. Il mène le tout avec poigne : famille, travail, patrie. Sévère mais juste. Paternaliste. N'y a-t-il pas aussi un orphelinat pour jeunes filles ? Et une auberge pour distraire les dimanches pluvieux ? Boire, jouer aux fléchettes ou au javelot ? Et puis parler, médire, maudire...
Car il ne fait pas bon être différent des autres. Noirs, jaunes ou bleus, la société les écarte, les rejette, par peur, par dégoût, ou par une conviction cruelle : seuls les gens normaux sont fréquentables, seuls les gens normaux sont dotés de bonnes âmes.
Dès le préambule, l'auteur nous informe que la suite est une tragédie. Tout au long du récit, il joue très adroitement avec les émotions en créant des situations habitées de sentiments intenses : amour, amitié, violence, jalousie, haine, cupidité, abnégation, pardon, chagrin... le lecteur se plaît à espérer qu'à force de dialogues, d'actions solidaires, d'amour, la différence finira par être acceptée.
Je suis déçu, pour ma part, que l'auteur ait préféré repeindre le monde en rose pour que tout rentre dans l'ordre. Mais n'est-ce pas, hélas, un reflet fidèle de la réalité ?
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Bleu, un livre doux rempli d'humanité.

Je me suis laissé tenter par ce roman écrit par une personne que j'apprécie énormément, et son 1er roman est une réussite ! Il se lit si vite, qu'on attend le prochain avec impatience. Ce petit ouvrage m'a même fait verser une petite larmichette.

Pour résumer l'histoire : Cela se déroule fin du 19ème, dans un petit bourg dans lequel vit ou a vécu l'auteur, vu l'authenticité de la localisation du village.
Dans cet ouvrage, on suit la famille Carson, notamment le fils, qui ne descend au Village qu'à l'occasion des marchés pour acheter le nécessaire, personne ne leur adresse la parole sauf quand ils ont besoin de leur acheter des tonneaux, des barriques ou de petits meubles pratiques et solides de leur fabrication. Tout cela parce qu'ils ont la peau bleue. Et pour les villageois c'est un peu les colorés du village ! Ils sont alors maudits, les villageois en ont peur et s'amusent aux plus grandes moqueries pour ce teint qui leur est propre.
Charles, le fils Carson tombe alors fou amoureux de la belle Frida du village, une orpheline du pensionnat. Tout commence après l'adoption de Frida, et c'est alors que l'histoire bondit de par et d'autres d'émotions.
On s'attache à tous les habitants de ce petit bourg, le couple de l'auberge qui adopte Frida, les méchants frères Duriez et leur incroyable paternel et maire du village, la nonne et tous les autres qu'on aime a détester au vue de la méchanceté de ceux là envers les Carson et ceux qui s'en approche.
Bref, une histoire de différence, sur un fond d'amour Shakespearien qui a su m'emporter dès les premières pages.

Bleu, de Laurent Cappe, est un roman que je vous conseille de lire absolument ! Il a tout pour plaire, dites vous que je suis un grand lecteur de bande dessinée, je m'arrête parfois sur quelques romans chaque année, et celui ci en fait partie alors pour la finesse de son écriture, la facilité de lecture et la douceur dramatique de l'histoire, je vous le conseille grandement !

Je tiens à remercier Laurent cappe, directeur et metteur en scène du rollmops, et Madame Hibon L. pour l'envoi rapide de l'ouvrage.

Au plaisir de pouvoir lire le prochain roman.
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