Moi qui n’ai jamais douté, je m’interroge.
L’homme de ce siècle a tant appris que je n’arrive pas à comprendre comment il en est arrivé à ce point de non-retour. L’homme a oublié qu’il n’avait qu’une seule maison et danse, insouciant, entre ses murs prêts à s’effondrer.
Si par le passé je n’ai jamais hésité à punir les hommes ou à les combler, cette fois-ci, je ne sais pas quoi faire.
Georges avait raison, cet homme est complètement fou, mais cette folie mystique le rend aisément manipulable. L'homme qui pense que des dieux s'inquiètent de son sort est d'une crédulité ahurissante... une chose que le passage des siècles ne change pas.
Tu es l’enfant d’une femme,
et le fils d’un homme,
et le frère de ton frère,
et le père des hommes.
Tu es la mémoire de ce qui a été
Et qui a disparu
tu es la source de ce qui est advenu
et de ce qu’il adviendra
Tu es le chant de tous les possibles
le juge de l’homme et le seul accusé
et ton nom, entends-le, est écrit dans ton sang.
Je suis un sang modifié par une pluie d’atomes, né de l’explosion du temps et reconditionné autour d’une unique pensée : mener à bien une mission dont j’ai tout oublié.
Je suis une naissance issue d’une extinction.
Je suis né de la mort, à l’origine de la vie.
Je suis l’Incréé, le Créateur, le Destructeur.
Mais je suis aussi bien plus et bien moins que cela.
Je longe le couloir sombre menant à la fosse commune. Au creux des murs, posés sur des oreillers, des crânes, parfois couverts de bijoux, attendent les prières qui permettraient à leurs âmes de quitter le purgatoire où une vie de péchés les aura conduits.
Je souris.
Purgatoire, enfer, paradis... l'imagination des humains pour combler le vide béant de leur existence est sans limite.
Comme moi, malgré des millénaires passés à chercher la Vérité, ils ne l'ont pas trouvée. Une fatalité que je partage avec l'humanité.
Et s'il n'y avait rien à trouver ?
Si l'existence n'était qu'absurdité ?
Mon rire éclate, violent, et dissout les ossements en particules infimes qui s'éparpillent autour de moi.
Un jour, il y a longtemps, ces poussières furent des êtres pensants. Ces poussières durent aimer et détester, furent bonnes ou mauvaises, donnèrent la vie ou l'ôtèrent... pourtant, aujourd'hui, s'envolant sous mon rire, cette poussière légère et volatile n'est plus rien.
Rien.
Voilà la vérité.
Il n'y a rien de plus pour les humains, rien qu'une courte vie sur cette Terre.
Une Terre qu'ils sont en train de détruire.
Depuis que la bulle noire s’est mise à chanter, la terre gronde. Quelque chose d’effrayant, d’inéluctable se met en place.
Une force que je ne connais pas et contre laquelle je ne sais pas quoi faire est en train de se réveiller.
Pour l'humanité, il n'existe pas de réponse toute prête, pas de fatalité. L'homme est ce qu'il décide et tous les futurs lui sont offerts: destruction ou reconstruction, vie ou mort. C'est à lui de choisir.
Puis je vois l'animal humain se dresser et asservir ses frères, mettre la Terre sous sa férule et perdre toute mesure. L'homme qui a oublié ce qu'il devait à la Terre, l'homme qui a oublié qu'il n'était qu'un animal parmi d'autres et qui se prend pour un dieu.
Puis je vois l'animal humain se dresser et asservir ses frères, mettre la Terre sous sa férule et perdre toute mesure. L'homme qui a oublié ce qu'il devait à la Terre, l'homme qui a oublié qu'il n'était qu'un animal parmi d'autres et qui se prend pour un dieu.