AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de GURB


Le deuxième roman de la trilogie Terra Alta ne fait malheureusement pas mentir le dicton espagnol – cité dans Don Quichotte - selon lequel « les deuxièmes parties ne sont jamais bonnes » .
Pourquoi n'ai-je pas aimé Indépendance ? Que lui reprocher ?
Rien à dire sur l'intrigue de ce polar : le chantage à la sextape de la maire de Barcelone en 2025 - Ada appréciera ! - et l'élucidation de l'affaire par Melchior, le super flic, intègre et bourru. On a fait mieux, on a fait pire.
Cependant j'ai trouvé Melchior bien pâlichon ; son séjour dans la Terra Alta lui a donné un sacré coup de mou et il faut attendre au moins 200 pages pour le trouver quelque peu revigoré...lui le superman, le héros national qui a abattu, sans sourciller, rien moins que 4 méchants terroristes, il y a quelques années.
Mais c'est surtout la forme qui m'a déçu.
Comme il s'agit d'un second roman qui constitue une suite, mais qui peut être lu indépendamment, l'auteur se sent obligé de récapituler l'itinéraire chaotique de son héros et de nous présenter les différents personnages , déjà présents dans le premier volume. C'est là où le bât blesse. Gêné aux entournures, il le fait par bribes, un peu ici, un peu là, ce qui fait qu'il déçoit à la fois les lecteurs du premier tome qui n' ont nul besoin de tous ces rappels et ceux du seul Indépendance qui sont malgré tout un peu perdus. Bref, une surcharge plutôt lassante.
« Caressez les détails, les divins détails » tonitruait le professeur Nabokov du haut de sa chaire.
Cercas sait faire ; il nous l'a abondamment prouvé -et jusqu'à satiété - dans Anatomie d'un instant et l'Imposteur - entre autres - mais ici les détails n'ont vraiment rien de divin et la plupart du temps ils tiennent plus du remplissage que d'autre chose et n'ont aucune fonction en rapport avec la narration. Un exemple parmi d'autres. Lorsque Melchior rentre le soir chez lui, il retrouve sa chère Cosette – ah, Les Misérables ! - en train de regarder la télé...et pendant une longue page, le lecteur, qui n'en demandait pas tant, a droit au récit du film...dans ses moindres détails. Et tout à l'avenant, des détails, encore des détails, non agencés entre eux, sans aucun lien avec l'intrigue ou l'atmosphère du roman et totalement superflus. On dirait que le but est de « faire des pages ». Et c'est d'ailleurs une des caractéristiques du roman espagnol d'aujourd'hui...de vrais pavés A.Grandes, C. Zafón, F.Aramburu, I. Falcones etc. ne me démentiront pas, comme si la qualité était fonction du poids du livre. Ils semblent avoir complètement oublié l'aphorisme de Gracián : « lo bueno, si breve, dos veces bueno y lo malo, si breve, no tan malo » ( Ce qui est bon, si c'est bref c'est deux fois bon et ce qui est mauvais, si c'est bref, ce n'est pas si mauvais). Indépendance aurait pu tenir en 250 pages ; il y aurait gagné en force et en vivacité.
Autre défaut : le discours plaqué. Lorsque il mène une violente charge contre la poignée de grands patrons dénués de morale (los burgueses) qui dirige l'économie et la politique catalane, rien à dire, c'est parfaitement en accord avec l'intrigue et contribue à créer l'atmosphère dans laquelle se déroule le récit, mais lorsqu'il s'en prend au « Procès », aux indépendantistes et à leurs leaders, Mas, Puigdemont c'est un commentaire gratuit qui n'a pas de lien direct avec la trame. Tout cela est inutile et entrave le bon déroulement de l'action.
Voilà, souhaitons maintenant que Cercas après son troisième tome le Château de Barbe Bleue - qui sort ces jours-ci mais que je n'ai nulle envie de lire - délaisse cette littérature alimentaire , fasse l'inverse de Pierre Lemaître et revienne à ses premières amours. Les Soldats de Salamine était un pur chef d'oeuvre.

PS : le rêve de notre super flic, c'est de quitter la police pour devenir bibliothécaire. D'ailleurs - paraît-il - il l'est devenu dans le troisième tome. Nos amis , à qui nous empruntons tant de livres, devraient apprécier.
Commenter  J’apprécie          44



Ont apprécié cette critique (4)voir plus




{* *}