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Citations sur Les lauriers du lac de Constance : Chronique d'une co.. (28)

A gauche le salon beige et brun, à droite la salle à manger, tous deux lambrissés de bouleau de Norvège, donnant sur le hall par de larges ouvertures symétriques, coupées de portillons chromés aux arabesques ajourées que l'on retrouve, identique, sur la rampe d'escalier. Le même motif décore la mosaïque du sol et le tapis vieux rose qui la recouvre. Alice foule les quinze mètres de tapis jusqu'à l'escalier de marbre blanc, revêtu d'une moquette rouge, qui mène aux chambres du dernier étage. D'un œil lugubre recompte les Cariffa, seul peintre qui ait eu les honneurs du château. Pas un mur n'est épargné.
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Jean, mon petit Jean. Fini. Envolé dans les nuages sur les ailes d'un manège en feu. Et la grande maison grise résonnais de ses cris, atroce ritournelle, des entrailles de l'escalier sombre jusqu'à l'extrémité frémissante des branches de marronniers. Elle ne voulait pas, ne voulait pas qu'il parte. N'avait rien dit, n'était pas tombée. Hurle maintenant. Paul lui tenait la main, maman tu n'es pas seule, maman fais venir tes larmes, vide-toi de ce chagrin qui crie par ta bouche. Maman je suis là, ne me fais pas peur.
Elle s'était calmée, les sanglots de la tempête s'étaient défaits en petits ruisseaux qui s'écouleraient d'année en année au plus profond de ses clairières.
Elle s'était tue mais le cherchait partout. Dans les flammes des chapelles ardentes jusqu'à l'extase, dans le parfum de la terre humide, dans le vent des cyprès, le long des routes de France et d'Allemagne, au hasard des cimetières blancs et verts. Elle y marchait, chargée de fleurs, s'arrêtant devant les croix qui portaient l'inscription Unbekannt - inconnu - lançant froidement une fleur et continuant son pèlerinage de l'absurde. Disparu. Dispersé. Pourquoi là plutôt qu'ailleurs. Tous les Unbekannten de la terre étaient mes frères.
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[Ma mère] essuie ses larmes contre mon rire et chante essouffl ée chante à mon oreille « à perpétuité à perpétuité il est sauvé à perpétuité » et nous tournoyons sous le plafond de nacre bleu le soleil bourdonne dans le Palais et nous valsons sur l’air des travaux forcés à perpétuité.
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Les premiers souvenirs de la vie, bulles de rosée le long d'un fil de la vierge, sont suspendus entre un marronnier rose et une haie de troènes.
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Je suis née en 42.

D’autres sont les enfants de la guerre, on leur a fait absorber du calcium et des vitamines pour que leurs dents de lait ne tombent pas.

Moi je suis un enfant de la collaboration, du maréchal, de Doriot, de la Wehrmacht et de l’antisémitisme.
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Une nuit où elle ne l'attendait plus mais ne dormait pas, lampe de chevet en veilleuse, il est arrivé fourbu mais l'oeil vif et lui a dit : mets ta robe blanche et ta ceinture dorée, je t'emmène en Allemagne.
_ Pourquoi l'Allemagne ?
_ Pour te faire plaisir, pour des vacances, pour que tu revoies l'Alsace, nous y passerons, pour que tu parles cette langue qui est si belle quand tu la parles, toi, pour que je connaisse ta famille de là-bas, ma chérie, écris à tes cousines, nous partons dans huit jours.
Elle choisit les manteaux clairs, les bas fins, les gants de dentelle, sois belle. Tout est prêt, ferme les yeux, ouvres-les, tu ne rêves pas. Ils partent, ils sont partis. La main parfumée fait au revoir aux enfants alignés devant le portail. L'ombre du chapeau grège posé de guingois sur son front cache une petite larme que vite le vent sèche.
Un matin de juin 37, ils s'en allèrent tous deux, lui devant, elle suivant, Albert et Alice, au pays du national-socialisme.
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Tu as vécu l'approche d'un danger sans pouvoir le nommer, tu te replies, tu te caches. Sans le savoir tu as rencontré la bête qui rode sur les routes d'Europe de Berlin à Rome. Elle avance, cherche refuge et s'installe poussant son cri par la bouche des hommes en sueur.
Tu ignores son nom. Ferme les yeux, laisse-là passer tu la retrouveras toujours plus vivante, plus vorace, au détour de ton chemin. Elle bouleversera ta vie. Pudiquement tu l'appelles "politique" et tu t'éloignes d'elle, innocente. Bien assez si elle te dévore tes journées, ton sommeil, ton amour.
Qu'elle passe le plus loin possible de ton jardin, sans abîmer tes buis parfumés, tes iris blancs, tes volubilis. Qu'elle aille se nourrir d'autres passions. Loin de toi la violence. Désherbe tes allées, taille tes géraniums, fais tes gammes. Pendant ce temps, les portes s'ouvrent, la bête engraisse.
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Je suis née en 42. D'autres sont les enfants de la guerre, on leur a fait absorber du calcium et des vitamines pour que leurs dents de lait ne tombent pas en petits morceaux. Moi, je suis un enfant de la collaboration, du maréchal, de Doriot, de la Wehrmacht et de l'antisémitisme.
Je suis née à droite, avec la LVF et le Cri du Peuple. Mon père y écrit. C'est l'organe du PPF nouveau visage. On y tient dès 40, des propos antisémites. L'un des leitmotiv du journal est l'appel à l'épuration. Doriot soutient les lois de Vichy contre les juifs et les francs-maçons. Mon père suit la ligne.
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Il n'est pas difficile d'avoir un poste à Vichy mais il est beaucoup moins commode d'y découvrir un bureau ou quelque chose qui en tienne lieu. Jusqu'à ce qu'on m'en ait donné un à l'hôtel Astrid, je partage, avec Charles Vallin, une pièce que Tixier-Vignancour a mis à notre disposition dans les locaux de la radio (Tixier est alors secrétaire à la Radio), au dernier étage de l'hôtel du Parc. Observatoire de choix : c'est là que sont installés le maréchal, ses services et ceux du chef du gouvernement.
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Car Juliette était toujours là. Amarrée à notre bateau depuis dix ans déjà... Sa jeunesse, son rire, son incroyable vitalité, c'est à nous qu'elle les communiqua : elle fut le remède universel des années sombres. Les Marthe, les Marie, les Adèle s'étaient succédé "au service" de maman, dans une ère révolue. Nous nous avions Juliette. Le jour de ma naissance, elle était encore la bonne. Très vite, secrètement, je devins sa fille. Je n'avais pas de père, elle fut ma seconde mère.
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