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S'il y a encore pas mal de chemin à faire en faveur de la condition des femmes, force est de constater qu'on n'en est pas au même point dans toutes les régions du monde. En la matière, l'Inde demeure l'un des pays où la situation est le plus dramatique. Les violences qui leur sont faites atteignent en effet un niveau proprement insoutenable : viols, brûlures à l'acide, meurtres restent monnaie courante, sans même parler des mariages forcés et de l'état d'asservissement dans lequel elles sont si souvent placées. Sans oublier les avortements contraints lorsqu'elles sont enceintes d'une petite fille.

Clea Chakraverty, qui a vécu plusieurs années en Inde où elle a été journaliste et dont le patronyme laisse penser qu'elle y a quelque origine, a tiré de ce constat un roman passionnant. Passionnant parce qu'il ne s'agit pas d'un nouveau récit se contentant de mettre en scène une victime ou une femme cherchant à s'émanciper. Elle a en effet choisi d'aborder la question selon un angle tout à fait original permettant d'interroger les fondements culturels de ces pratiques d'un autre âge. Revenant aux sources de la culture indienne, elle sonde le Ramayana, cette épopée retraçant notamment l'union du prince Rama et de Sita, qui sera enlevée par un autre personnage, ce qui aura pour conséquence de faire peser sur elle une accusation d'adultère.

Ainsi, à l'occasion du dixième anniversaire de la mort de Nirbhaya, une jeune fille qui fut violée et subit d'atroces sévices dans un bus de New Delhi, et alors que les responsables politiques et religieux du pays continuent de considérer les femmes comme responsables des violences qui leur sont faites, le jeune avocat Madhu Chandra a-t-il l'idée d'assigner en justice le dieu Ram lui-même. Il suscite aussitôt de virulentes réactions de la part d'une partie de la population, emmenée par Shri Yogi Abhinyav, premier secrétaire de la VAR, la Véritable Armée de Ram, organisation fondamentaliste hindoue. Afin que chacun des deux hommes puisse faire valoir ses arguments, un débat télévisé est organisé. Madhu doit donc fourbir ses armes et, pour cela, tente de prendre langue avec Zulfiya Wallace, une anthropologue ayant étudié le Ramayana pour mettre en lumière les différentes interprétations qui furent faites du texte - attirant ainsi sur elle les mêmes foudres que Mahdu.

C'est ensemble qu'ils partent à la recherche de Sati, une mystérieuse adolescente habitée par Sita et s'adressant aux femmes qui, à mesure que sa renommée grandit, viennent de plus en plus nombreuses recueillir la parole de celle qui passe désormais pour la réincarnation de la déesse.

Clea Chakraverty a mis en place un dispositif là aussi assez original, entrecroisant plusieurs fils narratifs - l'histoire de Sati, le procès intenté par Madhu et les tribulations de Zulfiya - et laissant place à diverses voix et différents types de prise de parole. Si, assez logiquement, les différents éléments narratifs se rejoignent pour donner à l'intrigue une dimension tout à fait intéressante, l'auteure intercale également différentes interventions permettant de définir très précisément le contexte social et politique dans lequel elle s'inscrit. Ainsi, les stories d'une instagrameuse populaire viennent-elles ponctuer le récit de précieuses informations. Utilisant les codes de l'appli, c'est avec force hashtags, selfies avantageux et formules visant à instaurer la complicité avec ses followers que Miss Fantastic expose toutes sortes de statistiques rappelant la réalité de la condition des femmes indiennes. Ce personnage, pour marginal qu'il puisse paraître dans l'histoire, est pourtant emblématique du tiraillement d'une société prise entre une conception traditionnelle et une autre plus urbaine et contemporaine de la place des femmes en Inde. Un contraste que l'on retrouve également entre des éléments de récit légendaire et d'autres résolument ancrés dans la réalité quotidienne qui se mêlent avec une étonnante fluidité.

Tout cela donne à ce roman une couleur singulière et rend le propos extrêmement efficace et convaincant. Sera-t-il de nature à susciter un mouvement féminin de grande ampleur comparable à celui qui se forme peu à peu en son sein ? Rien n'est moins sûr. C'est pourtant ce que l'on aimerait croire.
Lien : http://delphine-olympe.blogs..
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Ce roman entre mythologie et réalité nous dépeint l'Inde et plus particulièrement la condition des femmes indiennes.
L'idée initiale était originale, Madhu un jeune avocat indien assigné le dieu Ram en justice en tant que coupable à l'origine de la violence faite aux femmes de tous le pays.
Le roman oscille entre différentes époques, lieux, personnages. Et bien qu'il est intéressant de voir ce soulèvement des femmes, d'avoir une idée des textes fondateurs indiens et de suivre le parcours de Sati/Sita/Choti-Devi ainsi que du duo Madhu/Zulfiya… J'ai parfois eu du mal à suivre… beaucoup de noms différents, de changement d'espace temps.
Ce livre est beau et nécessaire par son message. Sur la forme je me suis tout de même parfois un peu perdue.
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En 2012, Nirbhaya est victime d'un viol atroce dans un bus de New Delhi. Torturée, elle ne survivra pas à ses blessures. En 2022, l'Inde s'apprête à commémorer le dixième anniversaire de sa mort. Mais en dix ans les choses n'ont pas changé, les politiques et religieux continuent de porter une parole ambigüe, une parole destructrice qui remet toujours en cause les femmes. Les femmes ne sont toujours pas écoutées, les violences continuent et ne sont pas plus punies qu'avant.

Madhu est avocat et décide alors de porter plainte contre le dieu Ram. le Ramayana, l'un des textes fondateurs en Inde, est souvent cité et serait la source de ce patriarcat qui relègue les femmes au rebut et servirait bien trop souvent d'excuses dans les violences qui leur sont faites. Il sera aidé de Zulfiya, une anthropologue.

Sati est une jeune fille abandonnée, pas très bien traitée par celle qui l'a recueilli, elle ne parle pas. Mais le jour où Sita prend possession de son corps, sa parole se libère et petit à petit, les femmes l'écoutent et l'entourent.

J'ai énormément à dire sur ce livre. Ce sujet me parle et me révolte toujours autant. Je me rappelle de ce drame en 2012. Ca m'avait terriblement choqué, mais surtout énervé. Cette société patriarcale qui donnera de toute façon tort aux femmes, peu importe ce qu'il arrive. Sous couvert de traditions, de religions. Cette société qui dit que la femme doit tout accepter, se soumettre. C'est une colère que je porte en moi malheureusement et cette lecture m'a remué et transporté. Les tensions religieuses du pays pour justifier toutes les violences, violences sur les femmes pour punir "leurs hommes", les femmes peu importe l'âge n'est-ce pas... du bébé à la vieille dame... Aucune morale. Trop de personnes justifient encore cela...

Un homme va décider de se battre, sur un coup de tête, il va s'attaquer à l'un des fondements de l'hindouisme et donc de l'Inde. le dieu Ram. Et ça tombe plutôt bien, Sita va réapparaître, prendre la parole grâce à Sati, raconter son histoire et celle de Ram, la vraie, pas la version pour mecs virils. Les femmes vont se réunir, se souder, se soulever contre ces hommes qui leur prennent tout. Si seulement c'était vrai... Mais les choses ne changent pas, n'est-ce pas ?

Un livre que je vous conseille vivement, pour vous rendre compte que dans certains pays, le combat a à peine commencé et n'est pas prêt de se terminer.
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Pour comprendre le grand projet de Clea Chakraverty, il faut saisir les mythes et légendes hindoues (très bien expliqués dans ce roman), comprendre leurs valeurs dans le quotidien des indiens d'aujourd'hui et respecter silencieusement la voix des femmes qui souhaitent se faire entendre.

Il n'a pas du tout été évident pour moi de faire le lien entre les chapitres "fantastiques" et les personnages de notre ère. Pourtant, lorsqu'on saisit les méandres de leur relation, on ne peut rester de marbre.

L'autrice a fait le souhait d'étudier avec une narration romancée les impacts d'un mythe millénaire qui a façonné la société indienne siècle après siècle.

A la suite d'un entretien télévisuelle mettant en lumière un chef religieux donnant son avis néfaste sur l'évènement tragique de cette jeune fille dans ce bus. Un avocat décide de porter plainte contre le dieu Ram. Tout au long du livre, cet avocat accompagné d'une anthropologue, va tenter d'expliquer dans quelle mesure la narration du mythe au fil des âges a impacté la vie des femmes. Son acte courageux n'est pas du goût de tous mais il va repousser l'ordre établi pour penser en dehors du cadre spirituel imposé. C'est passionnant.

Malgré quelques longueurs, je remercie l'autrice de m'avoir amené dans son univers, d'avoir pu prouver que le questionnement des fondations de nos sociétés est nécessaire pour que tout le monde trouve sa place dans le plus grand respect.

En vérité, j'aimerais que ce procès ait lieu partout dans le monde ... que l'on continue de s'autoriser à penser en ouvrant grand ses yeux sur le vivant.
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