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Citations sur Le nazisme et l'Antiquité (10)

Hannah Arendt souligne que la propagande et l'endoctrinement totalitaires se distinguent « par leur mépris radical pour les faits en tant que tels » et montre combien le mensonge est solidaire d'une volonté de puissance hypertrophiée : le mensonge du discours totalitaire « trahit son objectif ultime de conquête mondiale, puisque c'est seulement dans un monde qui serait complètement sous contrôle que le dirigeant totalitaire pourrait réaliser toutes ses prophéties mensongères ».
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Cette étude est née d'un étonnement : des recherches sur les mouvements de jeunesse et l'idée d'Europe m'avaient conduit à lire des discours où Alfred Rosenberg affirmait que les Grecs étaient un peuple du Nord. Vérification faite, ce curieux objet textuel ne faisait que suivre l'oeuvre canonique de la doctrine nationale-socialiste : Hitler écrit dans Mein Kampf qu'il existe une "unité de race" entre Grecs, Romains et Germains, et que ces trois peuples sont unis dans un même combat millénaire.
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Mais un "ethos" n'est pas un "genos", une éthique n'est pas une généalogie. La référence antique racialisée offre aux nazis l'opportunité de fabuler un discours des origines, la biographie d'un Urvolk ennobli par le prestige d'Auguste et de Périclès.
Car la référence proprement et purement germaniques est trop bute. Les archétypes de cette histoire souffrent d'un vice inamendable : le manque patent de prestige culturel dont la fruste germanité des origines est passablement dépourvue. Sur l'échelle de civilité de la culture humaniste occidentale, la rudesse germanique manque d'urbanité historique. Or le but répété d'Hitler était de retremper la fierté d'une nation humiliée par le Diktat de Versailles. Cette thérapie nationale ne passait pas seulement par le réarmement et par une politique architecturale mégalomaniaque, ou par les bruits de botte en Sarre, en Autriche ou en Moravie : la géographie de l'Europe devait certes sentir la dextre du Führer, mais son histoire pas moins. Le présent et l'espace ne suffisaient pas : le passé et le temps devaient aussi contribuer à rehausser une fierté mise à mal en 1918 et 1919. L'annexion du passé antique, de ses œuvres, de ses États, revêtait dès lors une importance idéologique cruciale.
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Hannah Arendt montre combien le totalitarisme vise à l'édification d'un « monde entièrement fictif ». Ce monde fictif est celui du postulat doctrinal totalitaire, qui prétend avoir révélé les lois du devenir. Dans le cas du nazisme, ce postulat est celui de la lutte des races, lutte qui se manifeste, chez les Sémites, non dans l'honneur du combat, mais dans la pénombre interlope du complot. Ce postulat est infalsifiable, au sens où l'entend Karl Popper : il ne peut être invalidé, pris en défaut par un discours de narration du réel qui devra en être une défense et une illustration, offrant ainsi une cohérence apaisante au mensonge totalitaire. Arendt note que le mensonge vient sans doute répondre à la demande d'un public disposé à l'entendre, à l'appel d'une « soif de fiction » qui serait « désir […] d'un monde complètement cohérent, compréhensible et prévisible » : le chaos d'une histoire qui n'est que bruit et fureur est avantageusement ordonné par le principe monovalent du postulat explicatif. L'imaginaire du complot, notamment, présente l'immense mérite d'être immune à la contradiction, mieux, de l'intégrer pour la dépasser, d'être simple et accessible, et de proposer une herméneutique totale du réel.
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On assiste à une réécriture de l'histoire qui annexe les Grecs et les Romains à la race nordique. La volonté de puissance exacerbée propre au totalitarisme nazi s'y exprime pleinement : il s'agit de maîtriser non seulement le présent et l'avenir, mais aussi le passé, pour parfaire la domination sur le présent et la maîtrise de l'avenir.
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Nous connaissons et concevons le national-socialisme comme l'achèvement du racisme en idées et en actes. Or qui dit racisme dit exclusivisme : le racisme est une séparation ami/ennemi fondée sur un strict déterminisme biologique qui vient motiver une ombrageuse sélection des vivants et des morts, des contemporains comme des ancêtres. La transmission des caractères biologiques de la race exclut tout aventurisme extra-lignager, toute digression généalogique, et exige, au contraire, une grande sévérité patrilinéaire, un agnatisme vétilleux. Les branches de l'arbre racial peuvent être multiples, mais l'unité et la pureté de la souche doivent être attestés historiquement : en ligne directe se succéderaient ainsi les Germains, lovés dans les contrées reculées de la paléontologie et du Urwald, les Porte-Glaive et les Teutoniques, Frédéric II et Bismarck, Hindenburg et Hitler, sceau des prophètes et acmé du lignage.
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Celle-ci [l'Antiquité gréco-romaine] a donc suscité un intérêt particulier sous le IIIe Reich, et ce jusqu'aux dernières heures d'avril 1945 où le "Völkischer Beobachter" et le journal "Das Reich" publient des textes sur la Seconde Guerre punique et le retournement de fortune de Rome contre Hannibal-Staline.
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La Grèce n'est, elle non plus, jamais oubliée, moins pour les armes que pour les mots. Elle est là pour le supplément d'âme, la noblesse du profil grec, le sublime de la philosophie. Une glyptothèque sera la bienvenue pour associer à la force la beauté de la statuaire antique. L'Allemagne philhellène de Frédéric II de Prusse, de la Weimarer Klassik et de Louis Ier de Bavière ne le démentira pas qui célèbre en outre, avec la Grèce de Missolonghi, le principe national.
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On sait que le recours au précédent romain est banal dans un Occident qui ne sait dire le pouvoir suprême que par des vocables latins : empereur vient d'Imperator, et Kaiser, comme Tsar, du reste, de Caesar. Depuis Charlemagne, tous les candidats à la domination universelle se sont parés des oripeaux de l'imperium romanum défunt et les Empereurs romains germaniques, autrichiens, français, britanniques, russes, allemands ont tous rêvé la restauratio imperii.
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Cette étude est née d'un étonnement : des recherches sur les mouvements de jeunesse et l'idée d'Europe m'avaient conduit à lire des discours où Alfred Rosenberg affirmait que les Grecs étaient un peuple du Nord. Vérification faite, ce curieux objet textuel ne faisait que suivre l'œuvre canonique de la doctrine nationale-socialiste : Hitler écrit dans "Mein Kampf" qu'il existe une « unité de race » entre Grecs, Romains et Germains, et que ces trois peuples sont unis dans un même combat millénaire.
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