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EAN : 9782130825364
384 pages
Presses Universitaires de France (29/09/2021)
4.05/5   48 notes
Résumé :
La "quête de sens" est devenue un commerce de "psys" et de "coachs". C'était jadis l'affaire de théologiens, qui cherchaient la main de Dieu dans l'Histoire. Entre les Lumières (XVIIIe siècle) et la Grande Guerre (début du XXe), le théologique a cédé la place au politique : dans l'Occident du "désenchantement" (Max Weber) et du retrait de Dieu, on chercha le sens dans ces "religions séculières" (Raymond Aron) que furent le communisme, le fascisme et le nazisme, mais... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
c'est un livre qui demande un effort de lecture, non pas par un style rebutant ou hermétique mais par un vocabulaire peu usuel et une densité des thèmes et des références traités. J'ai beaucoup appris et ce livre enrichissant m a ouvert de nouvelles portes à explorer. l'auteur, un historien spécialiste du nazisme, à travers le prisme du temps et par le biais d une analyse fine, nous invite à repenser les besoins immuables des sociétés à produire des récits afin d exorciser leur propre finitude et donc donner ainsi du sens à notre existence.
Il débute par un long chapitre sur le providentialisme qui fournit le grand récit judeo-chretien comme réponse à toutes les incertitudes. La Science transforme ensuite la lecture du monde et elimine la prééminence de la religion.
Le XX siècle se déploie avec des récits qui font appel au passé. le nazisme se réfère à l homme archaïque descendant de la virilité germanique. le fascisme se proclame de l Empire Romain.
Le récit communiste dans sa version stalinienne differe par son discours qui se base sur une vérité autour de la lutte des classes, les rapports de force sociaux.
Nous vivons actuellement une fragmentation des récits, comme celui du neoliberalisme qui met en récit l individu, le profit, toutes les nouvelles formes de complotisme.
J'ai été frappée par la justesse de cet essai, quand nos anciens prenaient le temps de méditer sur leur récit, combien le langage révèle nos divergences des conceptions du monde, l enquête historique et son évolution liée à la littérature.
Je terminerai par cette phrase issue du livre:" l historien, disait Ernst Cassirer, est lecteur. C'est là, sans doute, que l histoire parle le plus au citoyen et à celui qui entend être le mieux informé et le moins aliéné. "
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Avec le Grand Récit, l'historien Johann Chapoutot nous interroge sur le "sens" de l'histoire... Disons plutôt, leS sens puisque cet essai, publié en septembre dernier va revenir sur différents récits qui ont structuré les époques, les civilisations (occidentales), les idéologies.


Ce n'est pas la première fois que Chapoutot s'intéresse à l'imaginaire, aux idées davantage qu'aux faits. Dans ses autres livres, il s'est intéressé à la "culture" national-socialiste, à sa vision de l'Histoire, son imaginaire. Ici l'historien, nous parlera bien sûr de son domaine, l'imaginaire nazi (de façon plus succincte et moins approfondie que dans La loi du sang : Penser et agir en nazi) mais tout autant de la vision marxiste de l'Histoire, du providentialisme ou encore de la "fin de l'Histoire" (pour reprendre la fameuse expression de Francis Fukuyama) et bien d'autres. On pourrait croire que, la vision d'un sens de l'Histoire a aujourd'hui disparue du monde contemporain : J. Chapoutot nous démontre, s'il le fallait, que non. Complotisme, Déclinisme, Messianisme politique ne sont pas des inventions récentes mais prospèrent aujourd'hui.


Le résultat : un peu plus de 300 pages passionnantes qui reviennent sur les visions historiques qui ont marqué notre époque et le siècle précédent. Johann Chapoutot écrit bien et nous sort des sentiers battus avec une approche spécifique et un sujet original. Loin d'être des considérations abstraites, ces grands récits modèlent notre monde et ont des conséquences très concrètes (sur l'économie, les politiques publiques, la géopolitique, les guerres, etc.). Cet essai est tout à fait aisé à lire, l'historien nous donne des clefs pour mieux comprendre L Histoire et le point de vue de ses acteurs mais aussi pour nous permettre de prendre un peu de recul vis-à-vis de notre monde contemporain et des discours idéologiques souvent assenés comme des évidences.

Au fur et à mesure que l'on prend conscience de l'ampleur du sujet, on s'aperçoit de la principale limite du livre : quelques centaines de pages ne peuvent être suffisantes pour faire le tour d'un aussi vaste sujet. L'auteur en est conscient et limite le champ de l'ouvrage : Il ne s'attarde que sur un nombre relativement restreint de « récits » et privilégie les plus modernes (Généralement il ne remonte guère plus loin que les années 20) et ceux du monde occidental. A partir de là, bien d'autres « récits » sur lesquels j'aurais aimé m'attarder ne sont que brièvement évoqués (déclinisme romain) ou ne sont pas mentionnés (millénarisme, colonialisme civilisateur, positivisme etc.).


J'avais déjà beaucoup apprécié La loi du sang : Penser et agir en nazi de cet auteur, je vous recommande également le Grand Récit, un essai bien écrit que j'ai trouvé stimulant et édifiant.
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Le récit !!! Tout une histoire.

En fait, c'est le "réel imaginaire" à une époque donnée donné, à un endroit donné. Un réel imaginaire qui a mu une population dans une certaine direction.

Le livre commence par quelques grands récits : la religion (providentialisme), l'après la Grande Guerre, les nazisme et fascisme, l'eschatologie communiste, ... et aussi les ismes, dont le complotisme.

Chacun de ces récits prend une trentaine de pages. Quoi ? Pas beaucoup ? En fait, Chapoutot ne récite pas l'histoire, quoi que très brièvement. Il explique les époques concernées par ces récits... comme des récits qui ont fait ces époques, comme les réels imaginaires de ces époques.

Il y a deux chapitres particuliers - "D'une voix blanche" et "Lire et vivre le temps". Ce sont, peut-être, les chapitres les plus intéressants. Dans ces deux chapitres on apprends quels sont les moyens, les outils des historiens : les récits mais tout un tas de connaissances nécessaires au métier de historien.

Dans ce cas, j'ai interprété les autres chapitres comme des exemples de récits produits par cet historien.

On a l'habitude de lire des livres de histoire comme si tout était clair... Mais non, leur métier consiste à reconstituer non seulement les faits, mais aussi les comprendre, le contexte, le comment, le pourquoi. Pour cela, ils se basent sur les récits connus (documents), mais aussi des connaissances en philosophie, linguistique, anthropologie, psychologie, ... le métier de historien est un métier multidisciplinaire, qui me semble de plus en plus passionnant.

Du coup, on comprends mieux la démarche de Chapoutot dans ses livres précédents et même, si j'ose le dire, la grande maturation de l'auteur en tant que Historien (avec un H majuscule). Dans ce livre, on peut se rendre compte de l'étendue des connaissances multidisciplinaires en place.
Lien : http://lecture.jose-marcio.o..
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« le grand récit » démonte les représentations que les sociétés se construisent pour donner « sens » à leur histoire commune et définir un avenir possible. En ce sens, il rentre en écho avec les débats actuels. Yohann Chapoutot, spécialiste de l'Allemagne nazie, étudie avec érudition et précision la construction des récits au rythme de l'histoire. Pendant de nombreux siècles, le judéo-christianisme fonde le récit collectif sur la providence divine. Les progrès de la technique, le développement des sciences déroulent une autre vision collective, le monde peut et pourra être expliqué par les découvertes scientifiques. Les terribles conflits du XXème siècle imposent de nouveaux regards. Comment reconstruire un récit commun après l'hécatombe de la Première Guerre. le fascisme veut édifier un empire en référence à la Rome antique. le nazisme entend revenir aux origines germaniques, les lois de la lutte des races expliquent tout. le communisme se fonde sur la lutte des classes pour bâtir une nouvelle société. Auschwitz et Hiroshima laissent les récits sans voix collective. le monde actuel est tiraillé entre les versions ignorantiste (peut importe le vrai…), le messianisme (la France gardienne des Droits de l'Homme….), le déclinisme (le thème rebondit depuis l'Empire Romain…), le djihadisme … L'intérêt de l'ouvrage est renforcé par l'étude de la construction du récit. Yohann Chapoutot souligne, avec précision, la structuration du récit par les mots (« le langage saisit le réel »), la langue (« On ne pense pas la réalité de la même manière en allemand et en français ») et la littérature (« conscience de la langue, elle est vitale pour l'être humain »). L'auteur recadre les fonctions de l'histoire et de l'historien. « L'histoire est lecture d'un langage culturel propre à un temps et à un lieu social particulier », elle donne un sens au vécu des hommes. L'historien se charge de comprendre pour construire un récit qui permet de « tenir dans le temps ». Les références aux théologiens, historiens, écrivains … sont nombreuses. La précision dans l'argumentation est rigoureuse, appuyée par un vocabulaire précis, technique. Au final, l' ouvrage est dense, il impose réflexion. Il demeure « optimiste » : « la littérature, au sens de conscience de la langue, nous permet de nous réapproprier notre humanité, notre dignité, notre liberté ». Sur le site de Babelio, la citation s'imposait !

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Retours aux sources et nécessairement revenir aux assises et bases qui antérieurement ont pu et su dicter nos courants de pensées
En notre époque présente où l'on se pose beaucoup de questions .cet essai fort complet nous offre comme un résumé mais en profondeur nous amenant à y réfléchir très sérieusement
Un traité de plus mais un aperçu un traité littérairement parlant novateur en ce sens qu il s'emploie à nous exposer bien des aspects des problèmes posés dans un esprit d'impartialité à partager pour se faire une idée plus précise
Et à resituer dans nos actualités
Un ouvrage important à mon sens
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Citations et extraits (44) Voir plus Ajouter une citation
Dans un contexte qu'il n'appelle pas encore néolibéral, Lyotard observe une « décomposition » généralisée — de la société en atomes individualisés, et des grands récits traditionnels en segments d'injonctions peu mobilisatrices […] La dislocation du social et du narratif sont, plus que concomitantes, ou analogues, pleinement consubstantielles :

De cette décomposition des grands Récits, que nous analysons plus loin, il s'ensuit ce que d'aucuns analysent comme la dissolution du lien social et le passage des collectivités sociales à l'état d'une masse composée d'atomes individuels lancé dans un absurde mouvement brownien.

Lyotatd n'entend pas céder à la nostalgie d'une « société organique perdue ». Il reste que, s'il n'est jamais totalement seul, l’horizon offert à l'atome social est bien « la maximisation de ses performances », et elle seule.
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Connaissez-vous l’inventeur de la comptabilité en partie double, ou plutôt, ce qui revient au même, celui qui l’a théorisée, enseignée et popularisée dans le premier traité de comptabilité jamais écrit ? Cette invention, déjà en usage au XIIIe siècle dans les banques italiennes, a été formalisée par un moine franciscain, Luca Pacioli, auteur en 1494 d’une Somme des connaissances mathématiques, dont trente-six chapitres exposent les principes et les méthodes de la comptabilité. Par le truchement de l’imprimerie et du livre, cette méthode s’est diffusée rapidement en Occident : compter en débit et en crédit, en actif et en passif est devenu le fondement de l’économie capitaliste et de l’économie tout court, des États aux ménages en passant par les entreprises. Voilà une invention utile et un inventeur majeur. Mais personne ne le connaît. Du XVe siècle italien finissant, on retient mille autres noms, par exemple ceux de Léonard de Vinci ou de Michel-Ange, comme si, en bons humanistes, ces créateurs enrichissaient davantage notre être humain que le père des tabulateurs.
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L’histoire est le produit le plus dangereux que la chimie de l’intellect ait élaboré. Ses propriétés sont bien connues. Il fait rêver, il enivre les peuples, leur engendre de faux souvenirs, exagère leurs réflexes, entretient leurs vieilles plaies, les tourmente dans leur repos, les conduit au délire des grandeurs ou à celui de la persécution, et rend les nations amères, superbes, insupportables et vaines. L’histoire justifie ce que l’on veut
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Faire du français à l'école, ne peut se réduire à un apprentissage instrumental de la langue, à rédiger des CV et des lettres de motivation. La déshérence des humanités, des savoirs littéraires, c'est la déchéance de l humain en nous, de ce qui nous rend libre.
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(p. 318)
Quant à comprendre, ce mode d'élucidation propre aux "sciences de l'esprit", par opposition à l'explication des "sciences de la nature", cela apparaît bien difficile. Marc Bloch, en pleine Seconde Guerre mondiale, alors que, Juif et résistant, il est traqué par les nazis, écrit, dans "Apologie pour l'histoire", que la vocation de l'historien est de comprendre et non de juger. Comprendre - mot magnifique - et non qualifier, absoudre ou condamner, avec la suffisance du tard-venu et la bouffissure de l'anachronique impénitent. Mais comprendre les nazis ?...

Un mot, pour tout dire, domine et illumine nos études : comprendre [..]. Mot surtout chargé d'amitié. Jusque dans l'action, nous jugeons beaucoup. Nous ne comprenons jamais assez.
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Videos de Johann Chapoutot (24) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Johann Chapoutot
Table ronde, carte blanche aux Presses universitaires de Lyon Modération : Julien THÉRY, directeur scientifique des Presses universitaires de Lyon Avec Johann CHAPOUTOT, professeur à Sorbonne Université, Éric VUILLARD, écrivain, lauréat du Prix Goncourt 2017
À l'occasion de la réédition des écrits politico-théologiques majeurs de Thomas Müntzer (1490-1525) dans une magnifique traduction signée Joël Lefebvre, les Presses universitaires de Lyon invitent à découvrir ce penseur méconnu en France, alors qu'il fut l'un des principaux artisans de la Réforme protestante. Prédicateur de talent, partisan de Luther de la première heure, Müntzer prend toutefois rapidement ses distances et assume des positions bien plus radicales : il prône la fin de l'oppression culturelle entretenue par les doctes et les clercs, la fin de l'oppression politique instituée par les princes, la fin de l'exploitation économique dont profitent les seigneurs. Il rejoint bientôt un mouvement de révolte, qui donnera naissance à la “guerre des Paysans”, et devient l'un des chefs de la rébellion, appelant à une révolution à la fois spirituelle et matérielle. Rapidement capturé, il est torturé puis exécuté. À travers la traduction de sept textes fondateurs et d'une vingtaine de lettres, Joël Lefebvre met en lumière l'intérêt à la fois philosophique, historique et linguistique de l'oeuvre de Thomas Müntzer. Les préfaciers de cet ouvrage, l'historien spécialiste de l'Allemagne Johann Chapoutot et l'écrivain Éric Vuillard, auteur d'un livre récent inspiré par l'action de Müntzer, évoqueront la portée de ses écrits dans une discussion animée par Julien Théry, directeur scientifique des Presses universitaires de Lyon et historien des relations entre religion et politique.
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