Le poète et les fous : Quelques épisodes de la vie de Gabriel Gale

Chacun d'entre nous vit dans son petit cosmos, avec ses propres catégories et classifications.

On dit que les voyages ouvrent l'esprit: mais encore faut-il avoir un esprit.

Je me sens proche des fous. Je sais m'y prendre avec eux mieux que la plupart des gens, car je parviens en quelque sorte à imaginer la manière fantasque dont leur esprit fonctionne.

- Je vais à un enterrement spécial, dit Garth, l'air sinistre ; le genre d'enterrement où l'on prend des précautions particulières pour éviter un enterrement prématuré.
- Que diable voulez-vous dire ? lui demanda son confrère, ébahi.
- Je veux dire que je dois enterrer un homme vivant, dit Garth avec un calme spectral. Mais c'est le genre d'enterrement qui nécessite deux certificats médicaux au lieu d'un.

- J’ai dit à Wilkes qu’une fleur était une étoile vivante, se disait-il. Une étoile de mer est encore plus littéralement une étoile vivante. Mais j’ai l’impression que je deviens fou. Et s’il y a une chose que je refuse fermement, c’est de devenir fou. En quoi serais-je utile à tous mes frères fous, s’il m’arrivait vraiment de perdre l’équilibre sur la corde raide au-dessus de l’abîme ?

(L’ombre du requin)

Sa véritable découverte était de celles qui rendent furieux les amis et non les ennemis. L'homme qui a le courage de dire qu'il s'est trompé doit affronter la pire des haines ; la haine de ceux qui pensent qu'il a raison.

De petites gouttes d'eau,
De petits grains de sable,
Font l'âme chancelante,
Et les étoiles filantes.

J'ai repeint six vieilles enseignes avec saint Georges et le Dragon, et même le Dragon sans saint Georges ; le nom du Dragon Vert sur une enseigne est généralement très évocateur pour toute personne pourvue d'un tant soit peu d'imagination ; on peut en faire une sorte d'esprit terrifiant des forêts tropicales. Le Sanglier Bleu est également suggestif ; quelque chose de nocturne, avec des étoiles comme la Grande Ourse ; comme cet énorme sanglier sombre qui représentait le chaos et la nuit originelle dans la mythologie celtique.

- Si, dit l’ecclésiastique d'une voix étrangement calme. J'ai été Dieu, un jour, pendant à peu près quatorze heures. Mais j'ai laissé tombé. J'ai trouvé cela trop fatiguant.

C'est tout ce à quoi je sers en ce monde ; avoir été toutes les sortes d'idiot possibles.