Un enfant frappe ses jambes en cadence, par excès de vie, et non par manque de vie. Parce que les enfants ont une vitalité débordante, parce qu'ils ont un esprit ardent et libre, ils veulent que les choses se répètent et ne changent pas.
Ils disent toujours : « Fais-le encore! » ; et l'adulte le fait encore, jusqu'à ce qu'il soit presque mort. Car les adultes ne sont pas assez vigoureux pour exulter dans la monotonie. Dieu, lui, est peut-être assez vigoureux pour exulter dans la monotonie. Il est possible que Dieu chaque matin dise au soleil : « Fais-le encore! » , et chaque soir à la lune : « Fais-le encore! »
Ce n'est peut-être pas une nécessité automatique qui fait semblables toutes les
marguerites; c'est peut-être que Dieu fait chaque marguerite séparément, sans être jamais fatigué de les faire. C'est peut-être qu'il a l'éternel appétit de l'enfance; car nous, nous avons péché et nous sommes devenus vieux, mais notre Père est plus jeune que nous ...
Les hommes qui croient réellement en eux-mêmes sont tous dans des asiles d'aliénés.
Le courage est presque une contradiction dans les termes. Il signifie un puissant désir de vivre prenant la forme d'un empressement à mourir.
Le courage est... un puissant désir de vivre prenant la forme d'un empressement à mourir.
Tout conservatisme repose sur l'idée que si vous laissez les choses telles qu'elles sont, elles resteront ce qu'elles sont. Mais c'est faux. Si vous laissez quoi que ce soit tel quel, vous donnerez naissance à un total boulversement.
Le monde moderne n'est pas mauvais : à certains égards, il est bien trop bon. Il est rempli de vertus féroces et gâchées. Lorsqu'un dispositif religieux est brisé (comme le fut le christianisme pendant la Réforme), ce ne sont pas seulement les vices qui sont libérés. Les vices sont en effet libérés, et ils errent de par le monde en faisant des ravages ; mais les vertus le sont aussi, et elles errent plus férocement encore en faisant des ravages plus terribles. Le monde moderne est saturé des vieilles vertus chrétiennes virant à la folie. Elles ont viré à la folie parce qu'on les a isolées les unes des autres et qu'elles errent indépendamment dans la solitude. Ainsi des scientifiques se passionnent-ils pour la vérité, et leur vérité est impitoyable. Ainsi des « humanitaires » ne se soucient-ils que de la pitié, mais leur pitié (je regrette de le dire) est souvent mensongère.
Les plus grands saints, de même que les plus grands sceptiques, prennent le fait positif du mal comme point de départ de leur raisonnement. S'il est vrai (comme ça l'est sûrement) qu'un homme puisse éprouver un suprême plaisir à écorcher vif un chat, le philosophe religieux ne peut en tirer qu'une de ces deux déductions : il lui faut soit nier l'existence de Dieu, comme le font tous les athées, soit nier l'union présente entre Dieu et l'homme, comme le font tous les chrétiens. Les nouveaux théologiens semblent penser que c'est une solution hautement rationaliste que de désavouer le chat.