Citations sur Orthodoxie (67)
Telle est l'histoire véritable de l'humanité, c'est ainsi que les cités sont devenues grandes. Remontez jusqu'aux racines les plus obscures de la civilisation, et vous les trouverez enlacées autour de quelque pierre ou puits sacrés. Les hommes ont commencé par honorer un lieu, ensuite ils ont conquis pour lui la gloire. Les hommes n'ont pas aimé Rome parce qu'elle était grande : elle fut grande parce qu'ils l'avaient aimée.
Il n'y a pas d'argument philosophique contre les miracles. Il existe des choses telles que les lois de la nature, rationnellement parlant. C'est la seule chose que tout le monde sait : qu'il y a de la répétition dans la nature. Ce que tout le monde sait, c'est que les citrouilles donnent des citrouilles. Ce que personne ne sait, c'est pourquoi elles ne devraient pas donner des éléphants ou des girafes. Il y a une question philosophique sur les miracles et une seule. Beaucoup de rationalistes modernes très habiles n'arrivent apparemment même pas à se la mettre dans la tête. [...] La question des miracles est simplement celle-ci : savez vous pourquoi une citrouille continue à être une citrouille ? Si vous l'ignorez, vous ne pouvez pas savoir si une citrouille pourrait ou non se transformer en calèche.
Toutes les autres expressions scientifiques que vous avez l'habitude d'utiliser au petit déjeuner ne sont que du vent. Vous dites : « C'est une loi de la nature que les citrouilles restent des citrouilles. » Cela signifie seulement que les citrouilles restent des citrouilles, ce qui est évident ; cela ne dit pas pourquoi. Vous dites : « L'expérience est contre. » Cela signifie seulement : « J'ai connu personnellement beaucoup de citrouilles, et aucune d'elle ne s'est transformé en calèche. » [...] Ce que le christianisme dit est simplement que cette répétition dans la nature a son origine non pas dans quelque chose ressemblant à une loi, mais dans quelque chose ressemblant à une volonté. [...] Si vous ne pensez pas qu'il est extraordinaire qu'une citrouille reste une citrouille, détrompez vous. Vous n'avez pas encore commencé à philosopher. Vous n'avez même pas vu de citrouille.
Le militant athée dit que le christianisme a été quelque chose de sombre et d'ascétique, et montre du doigt la procession de saints austères ou féroces ayant renoncé à leur maison et au bonheur, avant de répudier la santé et le sexe. Mais il ne semble jamais lui venir à l'esprit que l'étrangeté même et l'intégralité de l'abandon par ces hommes donnent l'impression qu'il y avait vraiment quelque chose de réel et de solide dans ce pour quoi ils se sont perdus. Ils ont renoncé à tous les palais pour le seul plaisir de l'extase spirituelle. Peut-être étaient ils fous, mais il semble que ce plaisir ait réellement existé. Ils ont renoncé à toutes les expériences humaines au profit d'une seule expérience surhumaine.
La science admettra même l'Ascension, si on l'appelle lévitation ; elle admettra très probablement la résurrection, quand elle aura pensé à lui donner un autre nom.
Quand on se demande si l'âme d'un mort peut communiquer avec un vivant, il est grotesque de réclamer que cela se fasse dans des conditions telles que jamais deux âmes vivantes jouissant de leurs facultés ne communiqueraient sérieusement l'une avec l'autre. Que les fantômes préfèrent l'obscurité n'infirme pas plus l'existence des fantômes que la préférence des amoureux pour l'obscurité n'infirme l'existence de l'amour. Si vous tenez à dire : « Je croirais que Madame Mademoiselle Braun a appelé son fiancé "mon bleuet", ou tout autre mot tendre, si elle répète ce mot devant dix-sept psychologues », alors je vous répondrai : « Fort bien, si telles sont vos conditions vous ne saurez jamais la vérité, car elle ne le répétera certainement pas dans ces conditions. »
Aujourd'hui que la société s'agite de façon plutôt futile à propos de la sujétion des femmes, n'y aura-t-il personne pour dire combien chaque homme doit à la tyrannie et à la prérogative des femmes, au fait qu'elles seules contrôlent l'éducation jusqu'au moment où l'éducation devient futile : car on n'envoie un garçon à l'école que lorsqu'il est trop tard pour lui enseigner quoi que ce soit ? Le vrai travail a déjà été fait et, grâce à Dieu, il est presque toujours fait par les femmes. Tout homme est féminisé par le seul fait de sa naissance. On nous parle de femmes masculines ; mais tout homme est un homme féminisé. Et si jamais les hommes marchent sur Westminster pour protester contre ce privilège féminin, je ne me joindrai pas à leur cortège. Parce que je me souviens avec certitude de ce fait psychologique précis : c'est au temps où j'étais le plus soumis à l'autorité d'une femme que j'étais le plus rempli d'ardeur et d'esprit d'aventure.
Croyant qu'il existe un monde des esprits, j'y marcherai comme je marche dans le monde des hommes : à la recherche de ce que j'aime et crois bon. Tout comme dans un désert je chercherais de l'eau pure, ou que je travaillerais dur au Pôle Nord pour faire un feu confortable, ainsi j'explorerai le domaine du vide et de la vision, jusqu'à ce que j'ai trouvé quelque chose de frais comme l'eau, de réconfortant comme le feu ; jusqu'à ce que je trouve dans l'éternité un endroit où je sois littéralement chez moi. Il n'y a qu'un seul endroit de ce genre que l'on puisse trouver.
Un faux fantôme réfute la réalité des fantômes exactement comme un faux billet de banque réfute l'existence de la Banque d'Angleterre.
Si je dis : « Des documents médiévaux attestent certains miracles aussi sûrement qu'ils attestent certaines batailles », on répond : « Mais les gens du Moyen-Âge étaient superstitieux ! » et si je veux savoir en quoi ils étaient superstitieux, la seule réponse, en dernier ressort, est qu'ils croyaient aux miracles. [...] L'Islande n'existe pas, puisque seuls des marins stupides l'ont vu ; et les marins ne sont stupides que parce qu'ils disent avoir vu l'Islande !
Vous rejetez le récit du paysan sur le fantôme, soit parce que l'homme est un paysan, soit parce qu'il s'agit d'une histoire de fantôme. Autrement dit, soit vous niez le principe premier de la démocratie, soit vous affirmez le principe premier du matérialisme : l'impossibilité, dans l'abstrait, du miracle. Vous avez bien le droit de le faire ; mais, dans ce cas, c'est vous le dogmatique. C'est nous, chrétiens, qui acceptons toute preuve réelle ; c'est vous, rationalistes, qui refusez la preuve réelle, contraints par vos croyances.