Enfin, si il n’y a chez le sage nul sentiment d’un mal présent, chez le commun des mortels, il y en a un : le chagrin, affection qui nait à l’idée de maux supposés, et sous l’emprise de laquelle l’âme, incapable d’entendre la voix de la raison, devient déprimée, se replie sur elle-même.
Un homme équilibré, constant, sans crainte, sans chagrin, sans allégresse excessive, sans désir passionné, n’est-il pas un homme heureux ? Or le sage est toujours cet homme-là : le sage est donc toujours un homme heureux.
Confions donc nos âmes à la philosophie, et souffrons qu’elle nous soigne : tant que ces maux ont leur demeure en nous, nous ne pouvons prétendre ni au bonheur ni à la santé.
Si donc cette âme est cultivée, si l'on a dirigé son regard avec assez de soin pour qu'elle ne soit pas aveuglée par les erreurs, elle devient alors une intelligence parfaite, c'est-à-dire une raison achevée ; et si le bonheur appartient à tout être à qui rien ne manque et qui est en son genre accompli et complet, et si c'est là le propre de la vertu, il en résulte certainement que tous ceux qui possèdent la vertu sont heureux.