Citations sur Crépuscule (105)
« Certains d’entre nous ne sont jamais à leur place. Ni dans le lieu, ni dans le temps. Dénia était de ceux-là, à ne jamais se satisfaire du présent, à regarder toujours au loin de tout.…
Il parla de nouveau mais ses mots devinrent lents et maladroits.
Ils collaient à sa langue et devenaient pâteux :
« Certains d'entre nous ne sont jamais à leur place. Ni dans le lieu, ni dans le temps. Dénia était de ceux-là, à ne jamais se satisfaire du présent, à regarder toujours au loin de tout. Nous sommes des mécaniques plus ou moins bien agencées, vous ne croyez pas. Capitaine ? En fabriquant quelques-uns d'entre nous le Grand Horloger parfois égare des rouages, de petites vis, mais ce n'est pas pour autant qu'il met l'objet au rebut. Au contraire, il le remonte avec sa clé et le regarde s'éloigner, cahin-caha. Après, débrouille-toi malheureux ! Ma Dénia, ma si douce Dénia... »
Le pillage venait de commencer.
Si tant est que l'homme puisse avoir des scrupules, il a tôt fait de les étouffer, et le pire des êtres humains est le voisin. Sa proximité n'est que spatiale et on se trompe toujours sur son compte quand on s'arrête à ses sourires.
Le voisin est un fauve qui attend le moment de faiblesse pour dépecer celui qu'il observe et jalouse depuis tant d'années. Le voisin est le voyeur par excellence : il connaît tout de votre vie et elle lui semble toujours bien plus belle que la sienne. Aussi au fil du temps, et presque malgré lui, en vient-il à fabriquer un ressentlment qui, lorsque les circonstances s'y prêtent, fera de lui dans le meilleur des cas votre voleur et dans le pire, votre assassin.
Un bon voisin, cela n'existe pas.
Un bon voisin est un voisin mort.
Naît-on victime ? Naît-on bourreau ? Y a-t-il en chacun de nous, placé on ne sait comment ni par qui, les ferments de ce que nous allons devenir ?
Ou est-ce le cours de nos existences qui nous pousse à être qui nous devenons, séparant les hommes en deux peuples distincts, celui des victimes et celui des tortionnaires ?
Le suicide avait toujours paru au Policier la mort la plus lâche qui soit, non parce qu'elle était un outrage à la vie, que d'aucuns, mais pas lui, considèrent comme le bien le plus précieux, mais parce qu'elle évitait d'affronter l'inconnu majeur lié à la fin de toute existence.
Ne pas savoir où, comment, ni à quelle heure l'homme rencontre sa mort, être conscient de cela, ne rien pouvoir y faire, continuer à être malgré tout, témoigne d'un courage grandiose. Se confronter à ce mystère grandit l'homme. Toute chose que le suicide évite en signant la couardise de celle ou de celui qui choisit l'heure et la méthode.
L’attente on le sait est un délice violent qui donne aux heures vides de la vie un excitant remarquable.
« Votre intelligence souffre de myopie. Et dire qu'on m'avait vanté votre esprit souple, accommodant. On m'avait même assuré qu'en matière de vérité vous aviez théorisé le principe de... comment l'appeliez-vous déjà, la vérité efficiente, c'est bien cela ? Pourquoi l'oublier ? Elle pourrait pourtant nous être fort utile. »
Naît-on victime ? Naît-on bourreau ? Y a-t-il en chacun de nous, placé on ne sait comment ni par qui, les ferments de ce que nous allons devenir ? Ou est-ce le cours de nos existences qui nous pousse à être qui nous devenons, séparant les hommes en deux peuples distincts, celui des victimes et celui des tortionnaires ?
On le respectait car il savait tenir sa place et sa fonction, même si on ne l’aimait pas, car on n’aime jamais tout à fait ce qui est différent de nous et vient d’ailleurs.
L’être humain chérit les temps de possible désastre, qui donnent tout à la fois du prix à sa misérable existence et un piment violent aux lendemains dont il ne sait pas encore de quoi ils seront faits.