En concluant son exposé, il (le médecin qui vient d'annoncer au narrateur que sa mère est atteinte d'un cancer) s'est levé, m'a désigné la porte d'un geste qui se voulait courtois et qui ne l'était pas. Je me suis retrouvé dans le couloir. Seul. Sonné.
" Tu es sûre qu'il ne faut rien dire à papa ?
- Sûre.
- Je crois qu'il se doute de quelque chose, tu sais... "
Elle cache son visage et me dit :
" Il y a un monde entre le doute et la certitude. "
J'essayais de graver dans ma mémoire sa silhouette et sa grâce. Je voulais me souvenir de ce moment. J'avais si peur qu'il soit le dernier.
Natalya expérimentait, sans le dire, la possibilité d'autres vies. Comme moi à travers le scénario. Nous fuyons tous le réel à notre manière. Nous inventons des histoires qui durent une heure, un jour ou des années pour donner un sens à ce chaos cruel et magnifique. Nous nous voulons multiples pour ne pas voir que chaque vie est une étincelle dans la nuit infinie du cosmos.
dans la poche de ma veste, j'ai glissé une photo: celle de mon père et ma mère sur ces mêmes marches, à leur premier festival de Cannes. c'est maintenant que commence notre histoire. Nos jours heureux.
Elle me fait un dégagement sur le mythe contemporain des vacances. La sacralisation du désœuvrement et du "temps pour soi". Du temps pour quoi ? La créativité rend heureux, les amis rendent heureux, fabriquer, construire, inventer, rire oui, mais cette idée qu'il faut se reposer ! Même les adolescents comptent leurs jours chômés, comme Harpagon ses écus. Un concept consternant, le repos ! Ne dort-on pas toutes les nuits ?"
Le spasme. Notre quête inlassable, dérisoire et vitale.
Ce moment animal et béni de l’oubli. Le cerveau qui
s’éteint, le corps qui jouit. Le spasme, celui qui secoue le
monde et que nous contemplons, impuissants, détruire
en quelques secondes ce que nous avons mis des années
– des siècles – à bâtir. Le spasme. Celui qui suspend le
battement du cœur, nous prive d’air, annonce que la fin
est proche. Naître de ce mouvement bref de suspension
de tout. Mourir pareillement. Nous ne sommes qu’une
contraction incontrôlée de douleur et de plaisir. Un
même visage crispé, au début et à la fin.
s'inquiéter, c'est vivre les évènements redoutés dix fois au lieu d'une