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EAN : 9781092723121
Editions Louise Bottu (12/02/2016)
5/5   1 notes
Résumé :
Dans le passage un pope « Pour traverser la large avenue mais pas seulement. Trois escaliers, trois descentes pentues grossièrement bitumées y plongent, ou, c'est selon, débouchent sur les trottoirs de deux rues plus modestes et sur ceux du boulevard, sur la place aussi, en tout six voies d'accès, on emprunte avant tout les deux bouches principales, celle de la place, celle du boulevard, de l'une à l'autre et de l'autre à l'une le passage comme un tube. Un boyau. Po... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
"Dans le passage un pope"
de L.N. Petrov
traduit du russe par Pauline J.A. Naoumenko-Martinez
aux éditions Louise Bottu http://www.louisebottu.com/
février 2016.
120 pages
14 €



Le contexte
Le milieu dans lequel les personnages évoluent est décrit dans le détail. Une place à l'abandon, une tour qui n'en finit pas de se construire, et ses ouvriers caucasiens, un quartier en plein bouleversement. Et surtout, qui donne sur la place, un passage souterrain comme il y en a, semble-t-il, beaucoup à Moscou, pour traverser la grande artère passante. À l'intérieur du passage, en plus des nombreux passants qui l'empruntent pour aller d'un côté à l'autre de l'avenue, toute une population d'exclus, miséreux en tout genre.
Parmi eux, pauvre parmi les pauvres, mendiant parmi les mendiants, un pope.


Le sujet
Ce pope est le fil conducteur d'un texte sans climax, sans épisode marquant et même sans réelle histoire. Des tranches de vie, ou de survie. C'est sans doute la raison pour laquelle l'éditeur parle de documentaire (« documentaire métaphysique »). Il ne s'y passe rien de spectaculaire. Certes il y a un crime, mais il vient tout naturellement, si l'on peut dire, il n'est pas dramatisé, il fait partie de ces incidents qui ponctuent le quotidien du passage. 



Le pope
Le pope (un pope christique lavant symboliquement les pieds dans le passage), par sa présence et les propos que le narrateur lui prête, apporte le côté « métaphysique » dont parle l'éditeur, contrepoint à la réalité crue du passage : se contenter de ce que l'on voit, sans espoir, ou chercher autre chose, derrière, ailleurs ? (« Il y a, c'est exact, beaucoup de folie à s'occuper d'autre chose que de ce qu'on voit. » Céline, page 110)



Le narrateur (1)
Le narrateur prête au pope des propos que personne n'entend (« On croit entendre "voir". On croit. Rien qu'un mot. C'est peu. Alors on imagine » (page 35). Mais quel narrateur ? Un narrateur absent, en tout cas impossible à identifier. Le récit est impersonnel. C'est toujours « on » qui raconte, autrement dit personne. Un regard anonyme et neutre qui rappelle le ton du haïku.
Car il ne s'agit pas de prendre parti. Les choses sont ainsi. Le quartier change, on démolit, on reconstruit, cela n'a pas tellement d'importance, le monde se répète dans ses changements même. « Un air de reconstitution permanente. Qui, sans cesse recomposé ? le présent ? le passé ? le même, différent à peine. Valse et ritournelle. » (page 99) Une ritournelle, une valse, pareille à celle qu'on entend chez le marchand de CD du passage.
(À cause de ce regard sans jugement sur la société moscovite, je ne suivrai pas l'éditeur quand il parle d'un texte « imprégné de tradition littéraire russe ». L.N. Petrov n'est inspiré ni par Tolstoï, ni par Dostoïevski, par exemple, auteurs, s'il en est, de la « tradition littéraire russe ». À peine lui trouvera-t-on, et pour la même raison, une parenté avec Tchékhov, mais celui-ci n'est-il pas le plus occidental des écrivains russes du XIXème siècle ?)


Le narrateur (2)

Le narrateur est-il vraiment absent ? Il y a ces pages, déchirées, arrachées au livre. Quel livre ? Celui qu'un brocanteur essaie de vendre, dans le passage, appelé « vieux livre », ou « livre ouvert », « qu'on consulte, à l'occasion, quand on ne sait pas quoi faire, quoi dire » (page 69) « comme on compulse un guide, un vade-mecum, un bréviaire » (page 73). 
La page du vieux livre est, soit déchirée (p. 95 « page déchirée du livre ouvert ») soit arrachée (p. 115 « page arrachée du vieux livre »). On notera que la « page 93 du livre ouvert »correspond à la page 93 du livre que l'on est en train de lire. Comme s'il n'y avait en réalité qu'un seul livre, comme si ce livre, vendu dans le passage, et celui qu'on est en train de lire, ne faisaient qu'un. Comme si les scènes auxquelles on assiste étaient racontées dans le livre du brocanteur. LE livre unique qui dirait comment les choses se passent, comment chacun agit et parle (« c'était écrit »).
 Qui en est l' « improbable auteur » ? Le brocanteur lui-même ? Qui d'autre, « que personne ne connaît, à se demander s'il existe » ? (page 70)
S'agit-il d'un livre ouvert "dans" le passage, ou d'un livre ouvert "sur" le passage ? Ou les deux à la fois, un livre ouvert qui nous dit le passage. le passage étant dans le livre qui est dans le passage, double mise en abyme.


L'écriture

Autant qu'un texte sur la société russe de la transition, j'y ai vu un livre sur l'écriture. Une écriture qui se mord la queue, comme les chiens bâtards du passage, « cent fois brossant le mur de leur flanc maigre, leur flanc pelé, le même mur et toujours pas d‘issue, ni la queue d'un pourquoi », comme cette valse qui se répète en boucle, dans un passage abandonné (« la vieille qui se lamente, pourquoi nous avoir abandonnés, pourquoi ? »). Une littérature réduite à des « procédés » (page 108).

Le passage est « un tube » (page 9), « un boyau »(page 9) dans lequel on trouve non seulement le vieux livre mais « le hors-série d'une revue médicale consacré aux transit, bol, flore intestinale… » (page 69)
« Le passage lui-même est un lieu commun » (page 31). Un passage qui avale ses usagers et les expulse.
On dira vulgairement qu'on y est jusqu'au cou et répètera après Artaud que « toute l'écriture est de la cochonnerie  » (dès lors qu'elle veut voir « les choses qu'il y a derrière les choses. » page 23)

« Qui se contenterait de ce qu'il voit. Et des mots pour le dire. » (page 35)
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Pour traverser la large avenue mais pas seulement. Trois escaliers, trois descentes pentues grossièrement bitumées y plongent, ou, c’est selon, débouchent sur les trottoirs de deux rues plus modestes et sur ceux du boulevard, sur la place aussi, en tout six voies d’accès, on emprunte avant tout les deux bouches principales, celle de la place, celle du boulevard, de l’une à l’autre et de l’autre à l’une le passage comme un tube. Un boyau. Pour traverser la large avenue essentiellement.
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