14-18, tome 3 : Le Champ d'honneur (janvier 1915)

L’honneur est bien la dernière des choses auxquelles les familles de ces malheureux vont vouloir se raccrocher, lorsqu’on leur annoncera les conséquences de cette boucherie inutile…

- Ce qui signifie que j'ai perdu la moitié de me effectifs en vain...
- C'est la guerre, caporal...
- C'est donc la votre réponse à tout ? La guerre ?!
- Ces hommes sont morts au champs d'honneur... Nul n'a à rougir de ce qu'ils ont accompli, quel que soit le résultat...
- L'honneur est bien la dernière des choses auxquelles les familles de ces malheureux vont vouloir se raccrocher, lorsqu'on leur annoncera les conséquences de cette boucherie inutile...

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- Vous me demandez de sacrifier mes hommes ?
- Je vous demande d'obéir aux ordres.
- C'est un crime...
- Nous sommes en guerre, c'est de la stratégie.

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Des trucs bizarres, on en a tous qui nous trottent dans la tête, mais personne ne souhaite que ses fantasmes soient exposés sur la place publique!

-Quand même... sept jours tous les six mois... C'est maigre!
-C'est mieux que rien... arrêtez un peu de vous plaindre!
-Hé ho! Armand! Tu nous fait chier! On fait que subir, alors viens pas nous retirer le droit de donner notre avis et de râler! Merde alors!
-Jacquot a raison! On n'est pas des moutons! On est des français! On se plaint, c'est dans notre nature!

Chaque semaine, vous recevez des lettres de vos parents et de votre épouse... Du courrier rempli d'espoir et d'amour... Chaque jour, vous recevez des ordres de votre hiérarchie... Et à chaque instant, vous recevez les doléances de vos hommes, dont certains sont sans doute vos amis... Tout le monde exige quelque chose de vous... Vos proches veulent que vous reveniez vivant... Vos supérieurs vous veulent obéissant... Vos subalternes vous veulent indulgent et pas trop regardant... Chacun attend quelque chose de différent... Mais ce que chacun souhaite au plus profond de lui-même sans oser le verbaliser... ce que chacun espère en silence... ce que tous désirent en définitive... c'est qu'on en finisse! Que vous sortiez vivant ou pas, vos amours, vos amis, vos chefs, même s'ils ne vous le disent pas, veulent que cette guerre se termine le plus vite possible...

Cette expérience m'a beaucoup appris... Je sais à présent à quoi ressemble un héros... C'est un fou sanguinaire aveuglé par la haine, capable de broyer son ennemi, de l'anéantir sans pitié...

- Ces hommes sont morts au champ d'honneur... Nul n'a à rougir de ce qu'ils accompli, quel que soit le résultat...
- L'honneur est bien la dernière des choses auxquelles les familles de ces malheureux vont vouloir se raccrocher, lorsqu'on leur annoncera les conséquences de cette boucherie inutile...

Je crois qu'il est suffisamment mort, Armand...

- Jacques... t'étais où?
- Aux gogues... J'ai le droit de chier, quand même!
- T'as aussi le droit de partir à l'heure, comme les copains...
- Oui, mon général... Bien, mon général... La prochaine fois, je dirai à ma diarrhée d'attendre la Marseillaise et je chierai debout dans mon froc, mon général!