lls s'organisent déjà, sans me demander mon avis, comme si c'était eux qui avaient découvert ce trou. Ils n'entendent pas les sifflements et les murmures qui en proviennent, qui montent jusqu' à moi, me serrent la gorge et me donnent envie de fuir.
C'est désarçonnant de devoir consoler ses parents. Peut-être qu'elle est là, la fin de l'enfance ? Ce moment où on réalise que ceux qu'on croyait solides, indestructibles, peuvent s'effondrer.
La rage est un acide qui circule dans mes veines.
- Tu lui racontes quoi comme conneries ?
La voix de Léandre me fait presque sursauter.
- Comment va ton frère, Léandre ?
- Il t'emmerde.
Je comprends que je ne suis pas la seule à ne pas apprécier Fabien.
Quand Elisa était à terre, à gémir, j'ai senti une joie monter en moi.
Pareil pour Fabrice, avec son sang qui coulait de sa main. Les quatre petits trous bien nets que la fourchette avait laissés. Son nez plein de morve...j'avais jubilé. Et j'avais souhaité la mort de Kamel. Que son crâne se fracasse contre la margelle carrelée.
Personne ne le sait.
Ce ne sont pas des choses que l'on avoue.
" Voilà, c'est bon, on l'a vu, le pont ! "
On ne va pas en faire tout un plat de ce truc.
Il est étroit. Nous passons sans qu'il s'effondre.
Il aurait peut-être dû.
Apprenez à apprivoiser vos fantômes.
Votre famille est maudite ! Votre sang est damné !
Un hululement étrange retentit. Un cri qui s’étire dans la nuit, s’amplifie et s’éteint aussi vite qu’il est apparu. Il me glace le sang. Quel animal peut hurler ainsi ? Une bestiole blessée ou rageuse, que j’ai dérangée dans son sommeil ou qui chasse… Un prédateur nocturne. Une marmotte vampire. Je tente de sourire.
Un pont de pierre, un simple trait d’union en équilibre au-dessus du vide. Une fine arche entre deux falaises.