- Quand tu es né, je suis venu te voir. A l'hôpital. Tu avais quatre jours et tu étais laid comme un pou. Je peux bien te le dire. Un affreux bébé.
- Je ne savais pas. Que vous étiez venu, pas que j'étais moche.
- Tu étais allongé dans ta coquille transparente, et tu dormais. J'avais fait l'effort de dire que tu étais mignon, mais je ne le pensais pas et elle a dû le sentir. Je n'ai jamais pu mentir à ta mère.
Il grogne quelque chose que je ne comprends pas.
- Pardon? je dis
- Ne t'excuse pas si tu n'as rien fait.
Toute la vie de mon grand-père résumée dans cette simple phrase.
La vodka me fait le même effet que la première fois. Une coulée de lave incandescente glisse en moi. Mon corps est pris d'un long frisson. Je ne peux retenir ma toux, encore une fois, preuve que la Volga n'est pas un long fleuve tranquille.
Mes parents avaient choisi cet internat, parce que c'était le lieu le plus éloigné où ils pouvaient raisonnablement m'envoyer sans passer pour des parents indignes. La quête de mon identité... Une fable bien pratique.