En premier lieu, merci infiniment à Babelio et au
Cherche-midi pour m'avoir invité à participer à cette Masse Critique spéciale !
Il fallait bien que ça arrive un jour. Je le guettais, l'espérais, comme l'on peut attendre le grand amour et, finalement, le voilà, il est là, il existe : le bouquin qui m'a réconcilié avec la blanche. Ce n'est ni un exercice, ni une blague : j'ai vraiment surkiffé cette lecture d'un bout à l'autre.
De toutes façons, à partir du moment où tu me proposes une mise en forme aussi originale, tu marques des points. Ici, un « chapitre » ne fait qu'une seule page, s'attardant à chaque fois sur un personnage différent. Petite subtilité : la transition se fait de façon à la fois brutale et fluide, le texte inachevé d'une page servant d'amorce à la suivante, donnant parfois naissance à des enchaînements savoureux tels que « [... Tu ne peux pas te laisser aller comme ça !] Tu dois absolument tenir ton rang et faire => La bécasse ! [C'est la reine des bois ! ...] ». Évidemment, certains sont plus réussis ou saugrenus que d'autres, mais globalement, ça fonctionne très bien. En outre, quoi de mieux qu'une phrase inachevée pour donner envie de tourner la page ? L'effet est redoutable, surtout quand on a l'habitude de ne jamais interrompre sa lecture en cours de route... Double effet kiss-cool, lorsque l'on y parvient et qu'on récupère son livre le lendemain, on n'a pas l'impression d'être perdu, puisque le début de chaque page, en plus de compléter la précédente, se suffit à lui-même. Cerise sur le gâteau, la maquette rend honneur à la construction du texte, la police changeant elle aussi d'une page à l'autre. Il s'agit certes d'un détail purement cosmétique, mais ça rend l'expérience d'autant plus immersive.
C'est donc via sauts de puce littéraire, d'un personnage à l'autre, invités, employés, prestataires, inconnus de passage et même le chien, que l'on traverse le mariage (ah, non, pardon, c'est un pacs, même si ça n'en a pas l'air) de Camille et Laurent, entre les anecdotes et les galères. C'est simple : rien ne semble vouloir se passer comme prévu ! Des bribes de tranche-de-vie qui parlent de famille, d'amour, de boulot, de gamins, de la vie, tout simplement. Autant le dire tout net : malgré les arbres généalogiques en fin et début d'ouvrage, on renonce très rapidement à savoir exactement qui est qui. Parachutés sans préavis au milieu de ces deux immenses tribus, sans compter les amis, les collègues, la bonne, le wedding-planner... on ne s'en sort tout simplement pas. Au final, ça n'est pas vraiment gênant, on replace certains au fur et à mesure, et c'est suffisant.
Grâce à cette multiplicité des points de vue,
Antoine Cristau a réussi le tour de force de rendre irrésistibles des faits totalement banals, qui, sans la forme originale du texte, n'auraient été que le récit d'une union comme toutes les autres, avec ses imprévus et ses clashs. D'autant que Camille est issue d'une grande lignée de trous du... , son cher et tendre d'un milieu plus modeste, les deux clans ne se mélangent pas très bien, c'est du classique. Et c'est précisément pour ça que le récit fonctionne diablement bien : les vieux pots, les meilleures recettes, tout ça tout ça.
Grâce à son ton léger, Fêtes et défaites est un livre bourré de bonne humeur, même si tout ce qui y est évoqué n'est pas drôle, loin de là, l'aspect mélancolique ne prend jamais le pas sur le reste, noyé sous une grande vague de n'importe quoi le reste du temps. Pour peu que son aspect décousu ne vous fasse pas peur, c'est vraiment un livre parfait pour l'été, à conseiller aux amateurs de mariages, de romance, d'humour, de tranche de vie et surtout d'histoires familiales délurées !